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Qui est Jean-Pierre DENIS, Président du Groupe Crédit Mutuel Arkéa ?

25 mars 2013, 22:03

Jean-Pierre Denis, 36 ans, actuel secrétaire général adjoint de l’Elysée en attendant mieux dans le privé. Rastichirac

15 janvier 1997 à 15:59

Ce cerveau bien fait, Jacques Chirac l’a nommé à 35 ans secrétaire général adjoint de l’Elysée. Les dossiers économiques transitent par ses neurotransmetteurs : le mariage Dassault-Aérospatiale, l’opération GEC Alsthom-Framatome, l’avenir de Thomson. Un feu a été allumé dans la cheminée. Autour du jeune secrétaire général adjoint, le décor paraît un écrin déployé à dessein. Mais l’avenir de Jean-Pierre Denis est ailleurs, dans une entreprise privée. Le héros de sa génération, c’est Jean-Marie Messier, le patron de la CGE. « Une référence, un modèle de trajectoire », dit Denis. Messier a renouvelé la mythologie de l’inspecteur des finances. Père de cinq gosses, le kangourou diplômé a enchaîné les sommets dare-dare. Inspecteur des finances, cabinet d’Edouard Balladur, banque Lazard, et, enfin, les Grandes Jorasses, la succession de Guy Dejouany à la Générale des eaux, le tout en moins d’une décennie. Le nirvana, la CGE, pour ce genre de personnage : à l’interface entre la politique et les affaires. Dans les sphères du pouvoir, là où l’oxygène se fait délicieusement rare.

En attendant, Jean-Pierre Denis « fait du cabinet ». Le dossier Thomson lui a donné du souci, même s’il a été sauvé par le gong de la Commission des privatisations. Favorable à Alcatel, il a vu le Premier ministre préférer Matra. Et la presse annoncer sa démission. Une presse, dit-on, désinformée par des collègues de travail hostiles. Dominique de Villepin, par exemple.

Jean-Pierre Denis, disent ses proches, a été fort dépité de cette mésaventure. Une amie insolite l’a consolé : Anne Lauvergeon, aujourd’hui associée-gérante de la banque Lazard. Elle l’a précédé au même poste élyséen : « Il y a chez Jean-Pierre, sous des dehors conformistes, quelque chose de direct et de loyal qui suscite l’amitié », note Anne Lauvergeon. Elle lui a expliqué qu’à ce poste, ce très haut poste d’observation, on voyait surtout remonter les problèmes. « Le pouvoir d’un conseiller de l’Elysée est limité. Vous n’êtes là que pour préparer des décisions qui ne sont pas les vôtres. Vous n’êtes pas un politique. » L’Etat l’a sélectionné, avec ce système censé assurer la sélection des meilleurs. Finistérien, Jean-Pierre Denis a grandi à Audierne, petit port de pêche et de plaisance. Son père était médecin. Il a été pensionnaire au lycée Saint-Louis de Châteaulin, dans une école confessionnelle, comme 65% des enfants bretons. Les grandes écoles ont parachevé sa mise en condition : HEC, l’ENA, l’inspection des Finances. Brun au regard intense et bleu, les traits presque féminins, Jean-Pierre Denis rajoute une bûche dans l’âtre. Sûr de son excellence. « Jean-Pierre a sauté un maximum de haies le plus vite possible. C’est un solitaire de cours de récré. Un cérébral pur, qui l’emporte en interro écrite... » dit un ancien camarade d’école.

Ce garçon perfectionniste a pris épouse dans la noblesse républicaine. Marie-Laure, conseillère d’Etat, est fille de Jean-René Bernard, récemment nommé au Conseil de la Banque de France. Sous Georges Pompidou, elle jouait à l’Elysée, où son père occupa la fonction de secrétaire général adjoint. « Si moi-même j’étais né dans les plus beaux quartiers de la capitale, j’aurais peut-être eu moins d’appétit », note son mari, affichant ses ambitions. Mais au service de quoi, cette énergie ?

De son bureau d’angle, au second étage du palais, on aperçoit toitures, beaux nuages parisiens, jardins. Les K2 des énarques. On se grise, sur le toit du monde, mais on ne décide pas de grand-chose. « Si, chaque matin, la couleur de mon costume. » Bien coupé, le costume de crooner, avec des souliers qui miroitent. « Je ne me sens pas l’appétit d’une carrière politique. Et la haute administration, c’est difficile... » Il ira dans le privé. On gagne mieux sa vie, on peut agir. L’Elysée, c’est 40 000 francs par mois, le portable 24 heures sur 24. Après l’inspection, Denis songeait à travailler dans une banque privée. Mais Juppé recommande Denis au maire de Paris. « C’était hors norme, travailler avec un personnage de premier plan, et qui m’était sympathique. » Cordial avec tous, intime avec personne, Chirac a vite fait de séduire. Un an plus tard, Denis est candidat au poste de directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, ministre du Budget. Sarkozy lui préfère un autre inspecteur des finances. Denis doit rester aux côtés d’un Chirac isolé.

« Là, j’ai eu peur de ne plus travailler. De n’avoir plus rien à mouliner. » Jean-Pierre Denis parle de lui comme d’un robot ménager. Il évoque sa valeur marchande et même son absence de valeur marchande. Aussi négocie-t-il avec Jacques Chirac un accord avantageux : Denis monte un réseau de patrons pour préparer la présidentielle ­ et remplir son carnet d’adresses. « Il m’a servi de produit d’appel », dit Denis, ingénu. Premier patron à inaugurer son carnet d’adresses : Didier Pineau-Valencienne, le patron de Schneider.

Pendant la campagne électorale, Denis dirige la cellule présidentielle. En février 1995, il commet un chef-d’oeuvre d’équivoque politique, le discours de la porte de Versailles. Le républicanisme de Seguin et l’ultralibéralisme de Madelin sont concassés avec les idées de Juppé, pour donner le plus extravagant catalogue de promesses électorales. « Jean-Pierre est un ordinateur. Les synthèses, il adore », dit Denis Conus, un ancien camarade. Mais quelle est la doctrine de cet ordinateur. « La doctrine de Jean-Pierre ? Non attendez... » Le collaborateur d’Alain Juppé éclate de rire. « Directeur de cabinet de Sarkozy, il aurait été plus balladurien que Balladur ! Sa doctrine, c’est lui-même. »

Vers quel éden regarde ce jeune Breton ? « Il ne faut pas partir trop vite. » Jean-Marie Messier lui a proposé de rentrer à la CGE. Denis aurait offert sa démission au président de la République, celui-ci aurait refusé. « Je songerai à partir quand je n’aurai plus de grain à moudre », dit l’intéressé... Havas, banque Lazard, CGE ? Ou le groupe François Pinault, breton comme lui, avec lequel il fait du vélo le week-end... « Il y a encore ici des dossiers qui m’amusent », dit Denis. Un dossier fun, la redéfinition de la politique économique et sociale ?

Des Jean-Pierre Denis, la technostructure en compte une petite ribambelle. Au service des politiques. Encore faut-il qu’il y ait de nouvelles voies à ouvrir. Faute de mouliner dans le vide."

Jean-Pierre Denis en 5 dates

1960 Naissance.

1984 HEC, promotion « Allez les cadres ».

1988 ENA, promotion Montaigne. Juin 1992 Directeur-adjoint du maire de Paris, chargé des finances et du budget.

Mai 1995 Secrétaire-général adjoint de l’Elysée. "

http://www.liberation.fr/portrait/0101203318-jean-pierre-denis-36-ans-actuel-secretaire-general-adjoint-de-l-elysee-en-attendant-mieux-dans-le-prive-rastichirac