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L’appel de Charles Tillon du 17 juin 1940

23 octobre 2007, 10:25

arrgghh francis t’es méchant !!
Le cuisinier de la marche ?Bon, je suis pas invitée officiellement à participer au concours mais je vais vérifier - cependant, à vue de nez j’aurais pu dire peut être ton père ? ... pour gagner une bouffe , moi, je ferai des bornes ;-)

J’espère que mon message a été assez clair sur un point :
Si on doit , je pense, condamner d’un point de vue moral (ah oui je suis "moraliste" comme on dit) et critiquer d’un point de vue communiste ce qu’on a appelé le stalinisme (et Staline, si ça vous amuse la psychologie de comptoir..), en revanche et d’un point de vue communiste également, on ne peut pas critiquer "tête en l’air" les alliances qui ont été faites par les communistes avec les staliniens à cette époque, et cracher par principe sur tout ce qui a été plus ou moins proche des staliniens soviétiques. Ce serait nier le fondement même du marxisme à savoir la contingence, la dialectique et le matérialisme.(je ne sais pas si c’est beaucoup plus clair ce que je viens d’écrire mais bon...).

Quant au pacte germano soviétique, nous savons très bien ce qu’il en est (oui c’était la réponse du berger à la bergère au pacte Daladier Chamberlain - je me permets de rappeler que celui qui est revenu de Berlin en disant que "Mr Hitler était un parfait gentleman" , je crois, ne s’appelait pour le coup ni duclos, ni Staline, et que l’Occupation ET la collaboration sont des faits Français et certainement pas communistes alors....), oui , ce pacte, ça a pu être une manière de temporiser, bref c’est cela que je voulais dire quand j’ai dit "il faut dire la vérité à propos du pacte germano soviétique" - sous entendu : ce n’est certainement pas dans les livres d’histoire officielle qu’on trouve cette vérité - (mais ce n’est certainement pas non plus dans des brulôts pro stal de quelques allumés qui demeurent ici ou là).

L’histoire du monde c’est aussi une histoire d’alliances, bonnes ou mauvaises ,certaines plus dangereuses ou critiquables que d’autres. L’essentiel est de faire cesser les mauvaises alliances le plus vite possible et de ne pas y revenir.

Bonne journée
La Louve
PS : Et j’ajoute ce super article paru dans l’Huma en 1990, à l’attention spéciale de mon "amoureux communiste" mais qui sera bon à lire pour tout le monde ;-)


UNE CHAINE HUMAINE

http://www.humanite.fr/1990-07-04_A...

Dans Paris occupé, imprimer un texte en faveur de la « Liberté et l’indépendance nationale » était une gageure.

L’appareil clandestin du PCF, en pleine réorganisation, y parvient au prix d’immenses sacrifices.

« J’AI voulu prendre date avec l’histoire » avait dit Jacques Duclos à Jean Laffitte (1) lors de leur première entrevue au début de décembre 1940. La défaite, l’exode, l’occupation : l’été 40 est celui de la terrible tourmente qui plonge la France dans une nuit qui durera 5 ans. Interdit depuis l’automne 1939, une bonne part de ses militants mobilisés, le PCF va devoir reconstituer, dans les conditions que l’on imagine, son organisation. Mounette Dutilleul qui assurera la liaison avec le Secrétariat du parti dispersé, nous précise : « Il est décidé à l’arrivée des troupes nazies, qu’une partie de la direction restera à Paris sous la responsabilité de Jean Catelas et de Gabriel Peri. Une autre équipe rejoindra Limoges avec Benoit Frachon et Arthur Dallidet. Une troisième se dirigera vers Bordeaux où se trouve Charles Tillon, responsable inter-régional : ce sont Victor Michaut, Danielle Casanova et Georges Ternet. Ils ne trouveront pas Charles Tillon, replié en grande banlieue de Bordeaux, mais écriront vers le 15 ou 16 juin un manifeste édité par les camarades de Bordeaux un mois avant celui de Tillon ».

Lorsqu’ils partent tous, le 12 Juin 1940, ils sont coupés de toutes relations avec Bruxelles d’où « Jacques Duclos était parti début juin, mais restait bloqué par les combats de la « tenaille allemande » du Nord et l’encerclement de la poche de Dunkerque (2). Hélas ! Jacques Duclos arrive à Paris le 12 Juin quelques heures après le départ de Benoît Frachon. De son côté Pierre Villon, responsable de « l’Humanité » est au lit avec 40° de fièvre ! Dans la première quinzaine de Mai, par liaison radio, Maurice Thorez et Jacques Duclos, s’étaient mis d’accord sur l’analyse de la situation ».

Jacques Duclos est logé chez Etienne Virlouvet, 1 rue du Docteur Labbé dans le 20 éme. C’est là, qu’il va rédiger cet appel dit du « 10 juillet ».

Le 14 Juin, les troupes allemandes occupent Paris. Le 18 Juin, Colette Godfrin (3), fille de l’imprimeur Roger Tirand, cherche la liaison avec le Parti. Elle décide d’aller chez son amie Suzanne Virlouvet. Suzanne aussi est heureuse de savoir les Tirand restés à Paris, car elle a entendu dire par son beau-frère, que la direction du Parti cherche un imprimeur. Elle dit à Colette : « Attends-moi - Je vais aux nouvelles et je te dirai ce qu’il faut faire ». Quand elle revient, Suzanne lui dit : « Dis à ton père de ne pas bouger de Paris, Jacques Duclos va avoir besoin de lui ».

Vers le 27 ou 28 Juin (Colette que nous avons interviewée hésite sur la date), Jean Catelas arrive chez les Tirand avec un texte manuscrit intitulé « Appel au peuple de France ». C’est Henriette Maranne qui va faire une première mise en page sur stencil. Son fils Jean, qui n’a pas encore 15 ans, l’accompagne dans un petit pavillon du 19 ème, près d’une entrée des Buttes-Chaumont, nous confie-t-il. Il se rappelle avoir diffusé l’Appel avec les camarades de son quartier. Dans le même temps, l’équipe réduite de direction cherche Jean Jerôme. S’il se fait démobiliser rapidement, il peut trouver du matériel d’impression. Or il vient de rentrer et cherche la liaison ! Jean Jerôme, dit « Leblanc » pour Colette, amène chez Tirand d’abord une Gestetner toute neuve et du papier. On refait un nouveau stencil et l’Appel continue à sortir. Il est transporté par Francis Virlouvet qui loue une petite poussette chez le bougnat du coin de la rue de la Huchette. Il porte les paquets chez Maria Serre-Oria. Celle-ci est concierge. C’est chez elle que les équipiers de Brechet, responsable de la diffusion de la région parisienne, viennent prendre le matériel pour les faire parvenir aux sections de leur région au fur et à mesure de la reprise des contacts avec les démobilisés ainsi que les premiers camarades revenus de l’exode. GabrieL Peri et Pierre Villon donnent des extraits de cet appel dans « l’Humanite » clandestine qui est tapée depuis octobre 1939 par Blanche Gourdin, à qui le parti a demandé de prendre avec son mari, petit artisan en bâtiment, un poste de Concierge rue de l’amiral Roussin dans le 15 ème. Blanche Gourdin était dactylo au Comité Central avant guerre, elle connaissait bien l’écriture de Jacques Duclos ainsi que celles de Georges Politzer et de Pierre Villon.

De son côté Simone Lampe, autre dactylo de l’appareil clandestin reproduisait les stencil pour Brechet. Elle se souvient d’avoir tapé « l’appel du 10 Juillet » : « Le Blanc (Jérôme) a trouvé de beaux caractères Cheltenham pour que soit enfin imprimé l’appel. Tirand les met en page, le texte ne rentre pas, Leblanc et Colette proposent de couper le texte. Mais le camarade Tréand arrive. Il exige de conserver tout le texte. Il menace de sanction si celui-ci est modifié ! Il faut donc retrouver des caractères plus petits, que Leblanc ramène à nouveau ! Le temps est passé vite avec tous ces aléas de la clandestinité. On édite ainsi les premiers 30 000 appels. Les évènements du 10 Juillet 1940 (vote du Parlement à Vichy qui supprime les libertés républicaines en donnant les pleins pouvoirs à Pétain) et du 13 (remaniement du gouvernement dont sont exclus tous les anciens élus républicains) obligent la direction du Parti à demander de revoir le texte et d’interrompre le tirage. Colette Tirand-Godfrin voit Pierre Rebière qui avec Janin a remplacé Tréand, écarté. Pour « rentrer » le nouveau texte qui fait évidemment référence aux évènements du 10 et 13 Juillet 40,il faut rechanger la présentation pour gagner de la place. Les archives du Musée de la Résistance Nationale conservent ces différents exemplaires de l’appel.

Roger Tirand avait appelé son vieil ami, Marcel Lemarrec à tirer l’Appel avec lui dès son retour d’exode les premiers jours d’Août. Ils en avaient réalisé 600 000 exemplaires, quand la police allemande, guidée par un renégat, les arrête le 6 Septembre 1940 avec Francis Virlouvet et la camarade Maria Serre. Nos imprimeurs et leurs compagnons furent condamnés à des peines allant de un à un an et demi de prison. Ils purent « prendre le large » en sortant de prison et rejoindre la Résistance. Marcel Lemarrec à nouveau arrêté, bénéficie encore d’une sottise du greffe de la prison qui aurait dû le maintenir dans un camp. Les trois enfants de Maria Serre, responsables d’un autre centre d’édition dans le 18 ème, arrêtés en Février 42 furent déportés à Auschwitz en Janvier 1943. Roger Tirand, Marcel Lemarrec et Francis Virlouvet sont décédés. Maria SERRE-ORIA a 90 ans. Elle habite Marseille avec sa fille, Lucienne Thevenin, revenue d’Auschwitz, maintenant aveugle et près de sa fille Jeanne également revenue d’Auschwitz mais qui ne marche plus guère. Blanche Gourdin-Coureuil a été déportée dans le dernier convoi d’Août 1944 à Ravensbruck. Son mari, arrêté avec Politzer, a été fusillé en Septembre 1942. Jean Catelas, arrêté en mai 1941 a été guillotiné le 24 septembre 41, Pierre Rebière a été fusillé le 5 Octobre 1942.

Grâce aux sacrifices de ces hommes et de ces femmes, bientôt l’union des résistants se réalisera pas à pas, pour rendre à notre pays, son indépendance et ses traditions démocratiques.

Collaboratrice du Comité Central Clandestin 1939-1941 - Agent de Liaison entre les directions des deux zones 40-41. Dirigeante des Comités Féminins de la Résistance : Septembre 41

* Novembre 42 - Zone interdite puis zone Nord - internée à Loos et Cuinq

(1) Jean Laffitte. « Ceux qui vivent ». Editions Messidor

(2) cf. Jacques Estager « Ami entends tu ». Editions Messidor

(3) cf « Ralph, vive le PCF » de Raymond Daudet. Editions Messidor

Josette Cothias-Dumeix