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Réponse au cadeau empoisonné de Bertrand Cantat via le téléchargement libre. Je te salue Marie...

20 novembre 2008, 14:37, par Franca Maï

 Ma chère Franca

Ciao La Louve

La Louve -Comme tu le sais je suis désemparée face à ton article dont je ne comprends pas le but ni la signification.

F.M Tu es aussi désemparée que moi face à ce « cadeau empoisonné » téléguidé par l’industrie cynique du disque dont je perçois très bien la finalité : La thune. Les maquignons du show biz sévissent avec morgue et sans états d’âme.

-Critiquer le système du show bizzzz ? Le mauvais mélange art/fric ? Oui ----mais cela ne pouvait il se faire autrement que sur le dos de Cantat ?

Il se fait que c’est Cantat qui chante sur les deux titres proposés au téléchargement libre

-Exprimer ton aversion pour Noir Désir ou leur musique ? Ou ce que tu penses être leur "posture" engagée ? Fallait il déterrer une morte pour cela ?

Je te poste une réponse que j’avais rédigée le 25 septembre 2005 à propos d’un autre article sur le même sujet qui pose questionnement sur le crime dit passionnel.

L’être humain est fleur bleue. Il trouve toujours des circonstances atténuantes au crime passionnel -histoire d’amour réputée destructrice- où l’un reste à terre pour l’éternité. Il se contente de justifier sa compréhension sertie de mansuétude par un on ne sait pas, on n’y était pas, on ne peut pas juger, cela relève de l’intime. C’est un accident.
Mes pensées se figent sur le feu couple Marie Trintignant et Bertrand Cantat. Leur nuit tragique d’un mois de juillet 2003.
Mes pensées télescopent également ces milliers de drames domestiques où la femme subit des violences conjugales quotidiennes pour finir par un jour se taire définitivement sous les coups d’un compagnon ou d’un mari, laissant sa cohorte d’orphelins, de blessures irréversibles et de tendresse volée.
La passion amoureuse ayant bon dos, comme une explication suffisante et une compréhension complaisante d’une situation volcanique non contrôlée à un instant donné.
Or, lorsque l’on explore les méandres de cette pseudo passion dévastatrice -souvent à sens unique- et que l’on plonge dans l’abîme de l’âme humaine, on y découvre les tares suivantes : possessivité, jalousie, intolérance mais également alcool, drogue et frustration (liste non exhaustive) Rien qui ne ressemble à de l’Amour.
Mais parce que le cœur a ses raisons que la raison ne comprend pas, l’être humain opère un arrangement avec sa conscience et se contente d’écouter les pulsations de l’organe thoracique.
L’être humain est fleur bleue. Il est prêt à comprendre ce qu’il baptiste par commodité et confort moral un « accident » parce que dit-il, « Il n’était pas présent sur le lieu du drame. Et que ma foi, la vie continue, la vie doit continuer » Même si l’autre, petit tas d’os calcinés ou bouffé par les vers continue sa lente et irréversible décomposition. Laissant son lot de souffrances et de manque à jamais.
La première anomalie de l’être humain fleur bleue vient du fait qu’il accepte l’idée première, que lors d’une dispute, l’un puisse lever la main sur l’autre. Par énervement ou par colère, tel un automatisme toléré.
Or, cogner pour se faire entendre relève déjà d’une prise de pouvoir sur l’autre. L’intimidation remplaçant le respect. Si la colère ou la rage n’est plus contrôlable. Pourquoi l’azimuté de la boîte crânienne, ne tape-t-il pas sur un mur afin de canaliser sa violence sous-cutanée ? Peut-être se briserait-il le poignet et calmerait-il dare-dare ses nerfs à vif… Oui mais voilà, il se ferait du mal à lui-même. Et c’est là que le nœud du problème réside. Il veut faire du mal à l’autre. Donc, en exerçant ce choix puisque c’est un choix, de diriger le coup sur le corps ou le visage de l’autre, il entame sciemment ou non, le processus de la destruction de ce qui lui échappe, de ce qu’il ne peut pas contrôler. Avec le risque majeur que l’autre ne s’en relève pas.
La parole existant, pourquoi bloquerait-il les mots de sa bouche et utiliserait-il sa force si ce n’est que pour dominer l’autre physiquement en le terrorisant ?
L’être humain est fleur bleue. Toujours prêt à retourner voir les concerts de Noir Désir, en valsant macabrement sur le spectre d’une femme comme si de rien n’était et que le temps s’était suspendu, juste le souffle d’un deuil qu’il estime à deux années. Comme si Noir Désir pouvait toujours être le groupe Noir désir, mythique, écouté et adulé alors que Bertrand Cantat, -voix charismatique du groupe- purge toujours sa peine, derrière les barreaux pour six années encore. Une forme de schizophrénie de l’Art et de son approche. L’écoute dédoublée !
L’industrie du disque qui connaît bien l’être humain fleur bleue capable de tous les compromis pour satisfaire sa nostalgie, sa dose musicale journalière et ses besoins égoïstes s’ébroue dans les eaux malsaines d’une promotion insolente et provocatrice sans tenir compte de la douleur de ceux qui aimaient et aiment Marie. Le tiroir caisse à la main Le bruit des pépites d’or au creux de l’oreille.
Le groupe Noir Désir s’est sabordé le jour de la mort de Marie. C’est ainsi. Même si les musiciens n’y sont pas pour grand-chose. Plus rien ne sera comme avant.
Le groupe Noir désir en rédempteur est une partition que certains ne veulent pas entendre. Elle sonne faux et elle perturbe les morts.
Le silence serait bienfaisant.

Réponse d’aujourd’hui :

Il ne s’agit aucunement d’aversion pour une musique que j’ai aimée. Avant.
Mais depuis, je me suis sentie trahie. L’écoute n’étant plus innocente.
Personnellement je suis incapable d’entendre leurs chansons. J’ai besoin de temps pour voyager à nouveau dans leur univers.

-Cantat a payé. Il a pris 8 ans pour coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner et non assistance à personne en danger. Il a bénéficié de remise de peine, exactement comme la loi le fait pour les trafiquants d’héro (des assassins aussi pourtant et avec préméditation non ?).

Oui c’est un fait, il a payé sa dette.
Je constate également que pour les membres d’action directe c’est 20 ans de taule dont 10 en quartier d’isolement dans des conditions extrêmement dures. Il ne fait pas bon d’avoir quelques clairvoyances politiques.
Quant aux faits divers, ils ne dérangent pas grand monde. Donc chantons !

-Cantat, on ne peut pas savoir et on ne saura jamais ce qu’il vit, ce qu’il pense (puisque comme Rouillan en effet, le droit de parler de son acte lui a été dénié ad vitam aeternam - en les privant de paroles on les transforme, sur ces sujets , en "bêtes").

Je n’aimerais pas être à sa place. La prison est très certainement dans sa tête. Sa souffrance réelle.
Mais je n’aimerais pas être à la place de Marie, non plus.

-Mais je ne mettrai pas ma tête à couper que sa vie est super belle, et qui sait ce qu’il va devenir ? surtout face au lynchage dont il est à nouveau l’objet ?

Mon article n’est pas un lynchage c’est un questionnement sincère. Comment peut-on envisager un retour du Groupe ? Susciter l’empathie et les applaudissements d’un public comme si de rien n’était.
Bien entendu, Bertrand Cantat a payé sa dette mais le métier de chanteur n’est pas « neutre » et le retour d’un groupe mythique encore moins.
Si Cantat ne peut que chanter, il serait souhaitable que le groupe invente une nouvelle forme. Surtout en ce qui concerne la promotion. Pour ne pas trop heurter et raviver les plaies béantes de la famille. J’imagine que découvrir Bertrand Cantat en format gigantesque sur les murs des villes pour ceux qui ont aimé Marie ne peut être que très éprouvant.
Tu as écrit un article très virulent que je partage : Une minute de silence pour qui ? Donc tu comprendras ce que je tente de souligner.

-Quelqu’un dit ici : Cantat a perdu sa voix - je suis d’accord. Je ne crois pas que les choses soient aussi simples, aussi machiavéliques que tu les dépeignes , pour LUI.

Je le redis ici, je suis surprise qu’il ait encore envie de chanter. Peut-être même n’en a-t-il plus envie et qu’il ne fait que répondre à la pression de sa maison de disque – à laquelle il doit encore contractuellement un disque-
ou de son groupe.

On peut toutefois observer que dans la plupart des cas, tout « accidenté » change de vie et tourne une page.

Il vit ou survit différemment.

-Il ne s’agit pas de plaindre Cantat - il s’agit juste de lui foutre un peu la paix.
Paix

-De ne pas en faire le représentant de tous les salauds de cette terre.
Je te rassure il y a pire :)

-Je dis : Liberté pour Rouillan. Liberté pour Cantat.
Droit à l’oubli pour Rouillan. Droit à l’oubli pour Cantat.

D’accord sur ce point. Même s’il me paraît fort contradictoire de chercher l’oubli avec la machine promotionnelle d’une major.

-Les gens qui lynchent Cantat même maintenant sont des gens qui en règle générale sont favorables au rétablissement de la peine de mort.

Inutile de m’affubler d’oripeaux qui enlaidissent et salissent mon questionnement -sans haine- sur la nature humaine et sur le devenir de Bertrand Cantat et de son groupe Noir Désir, en particulier.
Je ne suis ni pour la peine de mort, ni pour la double peine. Tu connais mes engagements et mes prises de position.
J’attendais seulement un peu plus d’élégance et de cohérence de la part de Cantat. Il aurait ainsi trouvé cette « paix » et « ce droit à l’oubli » dont tu parles et peut-être regagné une certaine relative respectabilité.

 Qu’est ce qu’on souhaite ? que Cantat se tire une balle dans la tête ? Comme le député de Moselle ? Là on sera soulagés et contents du point de vue de la justice ? Là, alors, il aura sa minute de silence à l’Assemblée ? Mais c’est la loi du talion, ça ! un mort ne remplace pas une vie.

On ne répare pas la mort malheureusement.
Mais on peut soulager la peine et la douleur de l’entourage et des proches de Marie en restant discret ou anonyme.

-Hitler aussi s’est flingué - cela a t il effacé ses crimes ? La mort a t elle un pouvoir particulier de "transmutation" ?
Hors sujet

-C’est vrai que pour bcp, les cimetières sont plein de gens irremplaçables...
Ils sont toujours irremplaçables pour ceux qui les ont aimés.
 Je sais que tout ça, cette mentalité, c’est très loin de toi, toutes ces idées de MERDE.

Ce ne sont pas des idées de merde. Elles ne correspondent pas à ta vision.
Un peu d’éthique souhaitée, surtout de la part d’un chanteur engagé réputé sensible.

-Je te connais assez pour ne pas pouvoir penser autre chose que : tu as mal exprimé ton point de vue.

Dis-moi La Louve, une question concrète : comment entrevois-tu le retour de Noir Désir ?
Es-tu prête à retourner voir leurs concerts, à mouiller ta petite culotte, à vibrer sur leur musique ?
En ce qui me concerne, le silence de Marie est plus fort que leurs chansons.

-J’en reviens donc à mon début : je ne comprends pas ton article et je partage pas (pour une fois) ce qu’il semble dire.

Cet article n’engage que ma sensibilité mais s’il pose problème sur le site bellaciao en vous positionnant en porte-à-faux, tu peux le retirer.

Je terminerai en citant un lecteur du e-torpedo :
« Ce qui n’est pas stéréotypé c’est que cette société ne s’embarrasse d’aucune considération morale quand des hommes ont une valeur marchande. Ce qui est regrettable c’est que le groupe Noir désir n’en est pas conscience au point où il aurait pu trouver une nouvelle manière de composer et de faire de la musique, une manière qui n’infirme pas la combat sincère que nous avons toujours cru qu’il menait.
Je ne crois pas que quiconque ici ait souhaité faire de la vie de Cantat un enfer. Bien au contraire. Sa croix il la porte probablement bien assez.
Il y a des compromis qui relèvent de l’éthique. Ils consistent à épargner la famille de la victime, ils consistent à contrer l’idéologie sordide du moment en s’extirpant de sa valeur marchande et en donnant une orientation plus morale et plus en adéquation avec son combat, à la carrière du groupe.
Heureusement qu’il écrit, qu’il compose, qu’il joue. Heureusement qu’il est entouré. Mais il et ils leur appartient de se défier du rôle odieux qu’on fait leur jouer. Pour ma part j’aurai souhaité qu’ils rejoignent une maison de disque plus modeste, qu’ils ne jouent pas en public. C’eut été des signes révélateurs... »

-Je pense que tu dois clarifier ton propos. Mais je t’embrasse !
La Louve

Je t’embrasse également
Sans rancune.
Franca Maï