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23 septembre 2009, 03:45

Résistance obstinée au Liban sud

TANDIS que se poursuivent les tractations entre la Syrie et Israël sur une éventuelle reprise des négociations de paix, M. Ehoud Barak a annoncé son intention de retirer l’armée israélienne du Liban sud d’ici au mois de juillet 2000. Pourtant, au mois de septembre 1999, son aviation a effectué une centaine de sorties aériennes contre le Liban, un record depuis l’opération « Raisins de la colère », en 1996. Ces bombardements s’effectuent dans l’indifférence des médias internationaux, mais ils n’ébranlent pas la résistance obstinée de la population à l’occupation israélienne.

Par Walid Charara et Marina Da Silva

Il y a d’abord eu les tirs d’obus de part et d’autre, nourris et constants. La position israélienne sur le massif de Sojoud fait face au village de Jarjou’, la cible parfaite. D’ici, chaque village, chaque route en contrebas dans la vallée est sous surveillance de l’armée israélienne, qui domine le paysage à partir de trois positions, Sojoud, Sweida, Birkelab. L’intensité des salves indique qu’une opération de la résistance a eu lieu. Nous apprendrons très vite que le responsable de l’Armée du Liban sud (ALS), la milice pro-israélienne, à Beit Yahoun, un des cinq points de passage reliant la zone occupée au reste du Liban, a été tué.

La journée sera placée sous le signe de la « riposte ». Les chasseurs bombardiers israéliens zèbrent le ciel juste au-dessus de Jarjou’. Ils volent bas et plongent en piqué pour mieux épingler leurs cibles. Un vieux paysan, droit dans leur ligne de mire, continue à bêcher son jardin, imperturbable. Deux bombes s’écrasent à moins de 150 mètres de la maison d’Ali, dégageant d’épais champignons de fumée noire.

Ali a cinq ans. Il a été blessé à l’oeil par une roquette il y a deux ans. Cela n’a pas ébranlé la détermination de ses parents, qui n’ont jamais quitté le village situé sur la ligne de front, même aux périodes les plus dures. « Ils peuvent bombarder autant qu’ils veulent. Nous ne partirons pas. Nous ne sommes pas des errants », affirme sa mère, serrant contre elle son dernier bébé. Les bombardements sont quotidiens, à peine mentionnés dans la presse internationale. Depuis le début de l’année, 22 civils libanais ont été tués et 144 blessés par les « représailles » israéliennes (1), tandis que 19 miliciens de l’ALS ont été tués et 67 autres blessés dans les attaques du Hezbollah.

Chaque jour, les combattants du Hezbollah lancent une, deux, trois opérations, et chaque jour la région est méthodiquement frappée. « Depuis les accords d’avril (2), les Israéliens ne peuvent plus nous pilonner aussi systématiquement, mais ils ne cessent de faire monter la tension. La résistance les combat, assure les soins aux blessés et nous aide à reconstruire nos maisons », indique Ali Mahmoud, un ancien agriculteur reconverti dans la vente de café. Près de 700 personnes habitent à Jarjou’, un village mixte chrétien-musulman. Ils étaient 2 000 naguère et vivaient principalement de la terre. Avant l’invasion de 1982, l’agriculture assurait au Liban sud 40 % de ses revenus. « Le secteur agricole, les réseaux d’irrigation ont été totalement détruits, poursuit-il . Une grande partie des oliviers et des pins ont été brûlés ou coupés pour empêcher la pénétration des résistants. Mais nous ne partirons pas. Ici, chaque homme, chaque femme, chaque enfant est un résistant. »

Un peu plus loin, Heikal Habib Elias affiche la même conviction et le même attachement à la terre. « Nous sommes comme le poisson dans l’eau : si on nous sort de l’eau, c’est fini. Nous avons peur que ce qui s’est passé en Palestine ne se reproduise ici. » Cette hantise de la dépossession palestinienne revient souvent dans les récits.

Situé dans la continuité géographique de la Galilée, le Liban sud formait avec la Palestine une même zone culturelle et économique, d’où l’extrême sensibilité des habitants à la tragédie de 1948. Des dizaines de milliers de Palestiniens se réfugient alors dans le sud du Liban, tandis qu’Israël annexe sept villages libanais. Entre 1949 et 1964, le Liban enregistrera 140 agressions israéliennes ; entre 1968 et 1974, 3 000 (3). Le début de la guerre civile, en 1975, accélère les ingérences israéliennes, notamment à travers un soutien militaire à l’extrême droite chrétienne. M. Shimon Pérès, à l’époque ministre de la défense, soutient quelque 400 officiers et soldats dissidents de l’armée, qui s’uniront avec 300 miliciens phalangistes et membres des gardiens du Cèdre pour former l’Armée du Liban libre, l’ancêtre de l’actuelle ALS.

Avec l’opération « Litani », en 1978, l’armée israélienne envahit le Liban sud et occupe une zone de 700 km2. Bilan : 1 186 morts civils, 285 000 déplacés, 82 villages lourdement touchés et 6 totalement détruits. Quatre ans plus tard, durant l’été 1982, l’opération « Paix en Galilée » et le siège de Beyrouth font près de 20 000 morts civils libanais et palestiniens, et 500 000 déplacés.

Abou Zeid est né à Arab Salim, un autre village qui se dresse sur la ligne de front. Avec ses nombreux petits commerces et ses places, il semble défier la guerre. « Notre maison a été détruite deux fois. Mon fils a été blessé. Ici, nous sommes loin d’un hôpital, les blessures signifient souvent l’hémorragie et la mort. Mais la terre nous a été confiée, nous devons la préserver. On ne peut la quitter, quelles que soient les conséquences. »

Ahmad, lui, n’a pas hésité à rejoindre la résistance après l’invasion de 1982. « Mon père et mes deux frères avaient été arrêtés. Les Israéliens rassemblaient tous les hommes du village qui avaient entre quinze et soixante ans. Ils les entassaient par groupes de cinquante dans quelques mètres carrés et leur faisaient subir les pires humiliations. Ils ont commis plusieurs massacres à Sohmour [Bekaa ouest], à Zarayé, à Saïda. » Les pratiques de l’armée israélienne rappellent celles de toutes les armées d’occupation. Au détournement des eaux des rivières Wazani et Hasbani (4) s’ajoutent les arrestations arbitraires, l’ouverture de camps de détention, les punitions collectives, l’expulsion des familles...

Emergence du Hezbollah

A la sortie de Nabatiye, Maher Youssouf Aboud a trouvé refuge avec deux autres familles dans un immeuble dévasté par les tirs et ouvert à tous vents. A la fin de 1989, sa maison a été dynamitée et il a été chassé d’Odeysse. « Odeysse est le dernier village avant la Palestine. L’une des maisons se trouvait sur la frontière fixée par les Israéliens. Ils ont fait passer du fil barbelé à l’intérieur, plaçant une pièce au Liban et l’autre en Palestine occupée ! Ils ont essayé d’acheter la terre, ils proposaient aux femmes des emplois, imposaient le couvre-feu après 18 heures et assuraient l’ordre avec des chars. »

A la suite de l’invasion de 1982, la résistance s’est organisée très rapidement. Les organisations de gauche (Parti communiste, Organisation d’action communiste libanaise, Parti d’action socialiste arabe) constituent, le 16 septembre 1982, le Front de la résistance nationale libanaise, que rejoint le mouvement chiite Amal à partir de la mi-1983. La mouvance islamiste n’avait pas alors de structure organisationnelle unifiée.

Les différents groupes qui composeront le Hezbollah sont nés dans les espaces de « rurbanité » que forment la banlieue sud de Beyrouth et une partie de sa banlieue est (le quartier chiite Nabaa, détruit par les phalangistes en 1976). Ils étendront plus tard leur influence en direction des villages d’origine de ces populations, situés dans les zones périphériques délaissées par l’Etat (Bekaa et Liban sud), et jusque-là bastions des partis panarabes et de gauche, alliés à la résistance palestinienne. Cette sensibilité particulière parmi les populations rurales, souvent déclassées et déracinées, contrastait avec le légitimisme des populations urbaines chiites des villes côtières (Tyr, Saïda et Beyrouth), qui se reconnaissaient davantage dans le projet du mouvement Amal de M. Nabih Berri, de réforme et d’intégrité de l’Etat. L’enthousiasme suscité par la révolution iranienne de 1978-1979, l’invasion israélienne de 1982 et l’occupation seront l’occasion d’une structuration de la mouvance islamiste dans la résistance.

La gauche voit son rôle politique et militaire refluer. Le tournant communautaire pris par la guerre civile, les stratégies régionales et internationales, l’effondrement de l’URSS, ses dissensions internes sur le bilan de la guerre civile et la stratégie à suivre après la guerre l’affaiblissent considérablement. Le mouvement Amal sera quant à lui, après le premier retrait israélien d’avril 1985, l’un des principaux protagonistes de la guerre civile - s’attaquant notamment aux Palestiniens -, ce qui limitera sa participation à la lutte contre l’occupation. A partir de la seconde moitié des années 80, le Hezbollah devient la principale force de résistance et essaye d’incarner la lutte nationale. Il opère une synthèse entre cette dimension et la dimension religieuse et marque sa différence avec un discours qui ne prend pas en compte les réalités nationales. Ce que confirme M. Ali Fayad, membre du bureau politique de l’organisation : « Le problème avec certains mouvements islamistes, c’est l’absence de programme politique avec des priorités claires, l’absence de vision géopolitique du monde contemporain. Ces mouvements doivent accepter l’idée du pluralisme politique, de la divergence, et renoncer à la transformer en conflits antagoniques. Ils doivent abandonner aussi l’usage de la violence dans la lutte pour le pouvoir et éviter de sombrer dans la logique de guerre civile qui menace l’unité des sociétés arabo-musulmanes. »

La zone occupée par Israël couvre désormais une superficie de 1 100 km2, soit la moitié du Liban sud et 10 % de la superficie du pays. Elle constitue une bande territoriale de 79 kilomètres de long dont la profondeur varie entre 7 et 17 kilomètres. Elle englobe 113 villes et villages et 60 hameaux. Les agressions militaires et une politique d’éviction délibérée ont fait passer le nombre de ses habitants de 800 000 à 70 000.

L’occupation se traduit par une présence militaire sur la ligne de crête, le long de la frontière libano-israélienne et sur certaines collines stratégiques. La ligne de front ainsi que l’intérieur de la zone occupée sont contrôlés par la milice collaboratrice (ALS), qui dispose d’une cinquantaine de positions et de cinq casernes. En 1990, l’ALS était forte de 3 000 officiers et soldats. En 1999, l’activité de la résistance a ramené les effectifs à 1 500.

Adel et Ryad Kalakish sont détenus au centre de détention de Khiam respectivement depuis quatorze et sept ans. Leurs parents ont obtenu récemment un droit de visite (une demi-heure tous les trois ou quatre mois). « Nous sommes originaires de Debbin, à côté de Marjayoun, que nous avons dû quitter en 1994. Il y avait près de 4 300 personnes à Debbin avant l’occupation, il en reste à peine 200. Les collaborateurs menacent et imposent toutes sortes de taxes, sur les voitures, pour entrer et sortir du village... Ils sont venus arrêter nos enfants à la maison. » Ouvert en 1985, Khiam est un centre de détention et de torture. Quelque 140 prisonniers, de tous âges et de toutes confessions, pour la plupart de simples villageois ayant refusé de collaborer, y sont détenus sans aucun procès, dans les pires conditions (5).

Même les enfants n’échappent pas aux sévices. Mohammed et Hassan Reda ont été arrêtés il y a deux mois. Tous deux sont âgés de quinze ans, et avec eux il y aurait encore au moins cinq mineurs. Dernièrement, le cas d’une jeune journaliste de vingt-cinq ans, Cosette Brahim, a mobilisé l’opinion libanaise. Arrêtée le 2 septembre 1999, accusée de fournir des renseignements à l’armée libanaise, elle a été violemment torturée et conduite à Khiam. Pour la première fois, « l’armée israélienne a reconnu que le service de sécurité intérieure [Shin Bet] entraîne des membres de l’ALS à interroger les détenus de la prison de Khiam (6) », et aussi que ceux-ci sont payés par Israël.

La résistance s’est développée sur un terreau culturel marqué par l’islam chiite. Elle mobilise les ressources spirituelles, symboliques et morales de la population pour compenser la supériorité militaire et technologique de l’occupant. « La résistance et la fermeté face à l’occupation dans cette région trouvent leurs racines dans un fondement culturel dont l’islam constitue le cadre général, souligne M. Mohammed Hassan El Amin, théologien et intellectuel du Liban sud. Nous ne pouvons comprendre la prédisposition au sacrifice et au martyre sans la lier à l’exemplarité de ceux de l’imam Hussein et des siens à Kerbala (7) dans la conscience populaire. Le martyre constitue une victoire sur la mort (8). »

La mère de Mohamed Assaf vit la mort de son fils comme un acte de foi. « Mon fils est né et a grandi à Beyrouth, mais ses grands-parents étaient originaires d’Ansar. Il avait six ans au moment de l’invasion israélienne de Beyrouth. Dès l’âge de treize ans, il a voulu commencer à s’entraîner pour rejoindre la résistance. Il est tombé dans une opération lorsqu’il avait tout juste dix-neuf ans. Pour nous, il n’y a pas d’autre solution. Et puis, la mort, ce n’est pas la fin. » Ces convictions pèsent sur l’action militaire du Hezbollah, qui sera le précurseur des opérations kamikazes.

La fin de la guerre civile, en 1990, marque le début d’une étape décisive dans l’histoire de la résistance islamique. Le nouveau contexte libanais et régional (fin de la stratégie d’« exportation » de la révolution iranienne avec la conclusion de la guerre Iran-Irak, guerre du Golfe de 1990-1991 et début des négociations de paix de Madrid auxquelles participe la Syrie) favorise une plus grande intégration du Hezbollah dans la vie politique et son ouverture en direction des autres forces politiques et de l’Etat. Cette situation, qui lui permet de se consacrer exclusivement à la résistance, se traduit par des exploits militaires et une popularité croissantes. Le nombre des opérations est passé de 292 par an, entre 1989 et 1991, à 936 par an, entre 1995 et 1997 : embuscades, bombes télécommandées, attaques de positions militaires, bombardements, actions kamikazes, tirs de katiouchas, etc. L’utilisation toujours plus fréquente de bombes télécommandées prouve l’existence d’un service de renseignement aguerri. Plusieurs responsables israéliens ont été tués, comme le général Erez Gerstein, en février dernier. En août 1997, un commando d’élite israélien a été durement frappé lors d’une tentative d’attaque contre le village d’Ansaryé.

« Depuis longtemps, la bande de sécurité est devenue la bande de l’insécurité », titre, le 16 juillet 1996, le quotidien israélien Maariv. Depuis de longues années, l’occupation du Liban sud est devenue un sujet de dissension dans la société israélienne, dont certains secteurs (principalement les parents des soldats) expriment vigoureusement leur opposition.

Soutien de la population et... de l’Etat

DANS la société libanaise, la résistance fait l’objet d’un consensus parmi l’ensemble des forces politiques, communautaires ou laïques, consolidé par le changement d’orientation politique du Hezbollah. Celui-ci a accéléré le développement de ses institutions civiles et s’est intégré dans la vie politique et sociale. Le mot d’ordre de « République islamique » a disparu de son programme politique, et ses objectifs intérieurs coïncident, selon le membre du bureau politique Ali Fayad, avec ceux des partis de gauche et des partis laïques : « Nous agissons pour une réforme du système politique, pour qu’il devienne plus juste et plus représentatif, ce qui passe par l’abolition du communautarisme politique. Nous luttons pour la préservation de la liberté d’expression et d’association. Nous joignons nos forces à ceux qui combattent le capitalisme sauvage incarné par le néolibéralisme, pour la protection de l’économie libanaise des lois du marché, des défis de la mondialisation. Nous réclamons un plus grand rôle de l’Etat dans la protection des classes défavorisées, le développement des services et de la protection sociale. »

Depuis 1992, le Hezbollah a intégré le Parlement à travers des alliances avec les différentes forces politiques : il a obtenu 12 députés en 1992 et 9 députés en 1996 (sur 128). Ses relations avec le gouvernement de M. Rafic Hariri étaient assez froides. Un rapprochement significatif s’est effectué avec l’actuel premier ministre, M. Selim Hoss, et le parti soutient ouvertement le projet réformateur du président Emile Lahoud, qui, lorsqu’il dirigeait l’armée, était l’artisan de la coopération militaire entre celle-ci et le Hezbollah. Le discours officiel s’est d’ailleurs modifié : le précédent gouvernement affirmait ne pas pouvoir arrêter l’action de la résistance, l’actuel président assure que l’ensemble du pays est dans son camp, des propos que le gouvernement israélien qualifie, le 25 juin 1999, de « jamais entendus de la part d’un chef d’Etat libanais ».

Depuis plus de dix ans, l’armée israélienne n’effectue plus d’incursions terrestres en dehors de la zone occupée du Liban sud. En riposte aux actions militaires de la résistance, elle se livre à des bombardements intensifs, aériens et terrestres, des zones contrôlées par celle-ci. Ces pilonnages ont à plusieurs reprises frappé différentes régions du pays. Appliquant à une échelle plus réduite le modèle de la guerre du Golfe ou de celle du Kosovo, l’armée israélienne prend pour cible les infrastructures économiques, urbaines et routières, avec l’usage fréquent d’armes intelligentes. Les agressions particulièrement meurtrières de juillet 1993 (sept jours) et d’avril 1996 (un mois) ont provoqué chaque fois l’exode d’environ 400 000 habitants. L’objectif recherché était de retourner les populations civiles et l’Etat libanais contre la résistance, mais cette stratégie s’est révélée vaine.

Le réseau d’institutions sociales du Hezbollah apporte un soutien matériel et moral considérable aux populations civiles. Ces institutions se sont spécialisées dans différents domaines. El Shahid (Le Martyr) prend en charge les familles de ceux qui sont tombés dans la lutte. Jihad El Binà (L’Effort de construction) assure la reconstruction de milliers de maisons détruites ou endommagées. L’institution El Jarih s’occupe de 3 150 blessés, tant pour les soins que pour leur formation et leur réintégration sociale ; Imad, qui y travaille, a eu la jambe arrachée dans un combat en 1989 : « L’agression israélienne a eu des conséquences extrêmement dévastatrices. Les Israéliens ont répandu des milliers de mines antipersonnel et de bombes à fragmentation. » L’hôpital El Rassoul Al-A’azam et l’école Shahed complètent le dispositif d’aide. Ces institutions sont financées par des donations privées, de plus en plus nombreuses, ainsi que par les institutions sociales de la République islamique d’Iran et commencent à percevoir une aide de l’Etat libanais.

Le Hezbollah représente aussi, comme le note son porte-parole, M. Naïm Kassem, « une carte gagnante aux mains du Liban, de l’Iran et de la Syrie (9) ». Son efficacité militaire, son enracinement populaire et son réalisme politique l’ont rendu inévitable pour beaucoup d’acteurs régionaux et internationaux.

Une solution est-elle en vue avec le gouvernement Barak ? Pour Damas et Beyrouth, il ne saurait y avoir de « paix séparée », les deux dossiers libanais et syrien sont liés. Mais les négociations semblent difficiles. Le journaliste et chercheur Mustapha El Husseini (10) remarque que les tractations entre les deux parties avaient comme point de départ la formule proposée par le secrétaire d’Etat américain Warren Christopher : « Une paix globale contre un retrait total. » Mais M. Barak y a introduit quelques « nuances » : la profondeur du retrait israélien dépendra de l’importance des arrangements de sécurité, qui restent le sujet le plus complexe des négociations. D’autre part, l’ampleur des arrangements de sécurité dépendra aussi du rythme de normalisation entre les deux parties, le premier ministre israélien préconisant une « coopération » économique avec un développement de réseaux d’infrastructures communes.

Durant les négociations israélo-syriennes de 1995-1996, la délégation israélienne - à laquelle avait participé le général Barak en tant que chef d’état-major - avait formulé un certain nombre de conditions à son principal adversaire militaire : la restriction des effectifs de l’armée syrienne ; la limitation, sinon la destruction, des missiles balistiques et des armes de destruction massive en possession de la Syrie ; l’installation de postes de préalerte sur le territoire syrien. Tous ces éléments laissent à penser que l’accord est encore lointain.

Peut-on alors imaginer que M. Barak mettra à exécution sa promesse de retrait unilatéral du Liban sud avant juillet 2000 ? Le Hezbollah refuse de dire comment il réagirait, mais on peut penser qu’une telle décision ne mettrait pas un terme à une guerre qui dure depuis plus de vingt ans.

Walid Charara et Marina Da Silva.

Walid Charara

Journaliste, auteur, avec Frédéric Domont, de Hezbollah. Un mouvement islamo-nationaliste, Fayard, Paris, 2004.

Marina Da Silva

Journaliste.

http://www.monde-diplomatique.fr/1999/11/CHARARA/12643