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Nous ne verbaliserons pas les travailleurs !

Publie le mercredi 31 janvier 2007 par Open-Publishing
4 commentaires

Il est frappant de voir comment ce qui était impossible hier peut soudain devenir possible, et dans l’urgence, en fonction des priorités politiques.

La possibilité de sanctionner un employeur directement lors d’un contrôle, la mise à disposition de carnets à souche, est un débat ancien qui agite les agents de l’inspection du travail. Réservée à certaines « infractions matérielles », infractions immédiatement constituées (non présentation du registre du personnel, des décomptes d’heures, etc…, elle permettrait d’éviter la longue liste des PV classés par le parquet. Elle pourrait permettre une action plus efficace et plus visible de nos services.
Cette revendication était jusqu’alors constamment rejetée par le Ministère. Mais ils viennent encore de nous le prouver, c’est de volonté et de courage politiques dont ont manqué et manquent encore nos responsables. Volonté politique de s’attaquer vraiment à la délinquance patronale, au sentiment d’impunité qui règne dans les entreprises. Sentiment malheureusement souvent fondé malgré l’action des organisations syndicales et de l’inspection du travail.
Ce qui était irréalisable hier devient donc soudain possible. Au nom de la lutte contre le tabagisme, de l’interdiction de fumer sur les lieux de travail applicable au 1er février, les carnets à souche sont sortis des presses du ministère, et ordre est lancé aux agents de l’inspection que nous sommes de débouler en masse dans les entreprises pour y traquer le fumeur impénitent !
Mais n’allons pas croire que cette création pourrait être la brèche permettant que le champ d’utilisation de ces carnets à souche s’étende. Cette évolution n’est absolument pas à l’ordre du jour et aucun signe permettant de l’espérer dans un avenir plus ou moins proche n’a été aperçu.

Loin de l’inspection du travail indépendante des pouvoirs politiques et économiques, telle que nous la concevons et telle qu’elle est prévue par la Convention n°81 de l’OIT, notre ministère rêve d’une inspection aux ordres, agissant en fonction de ses priorités politiques, et non en fonction des besoins et des problèmes rencontrés par les travailleurs.
Utilisation des agents pour la chasse aux travailleurs sans-papiers, mise en place de sections spécialisées sous les ordres du Préfet, et aujourd’hui accentuation de la tendance à la spécialisation dans le domaine de la santé publique, voilà le sens dans lequel on veut cloisonner notre action. La spécialisation signifie la soumission aux priorités politiques immédiates et l’abandon de nos missions de contrôle sur les autres champs (durée du travail, entrave aux IRP, respect des conventions collectives, etc…). Nous réaffirmons notre attachement à une inspection du travail organisée en sections territoriales, généralistes et indépendantes.
Outre ce risque de la spécialisation de nos activités, ces dispositions récentes sur le tabagisme dans l’entreprise sont également porteuses d’une évolution dangereuse pour nos services. Les agents de l’inspection du travail auraient la possibilité de verbaliser non seulement l’employeur qui n’assure pas le respect de l’interdiction de fumer, mais également le salarié qui ne s’y soumet pas ! Si nous acceptons cette dérive aujourd’hui, comment croire que nous serons en capacité de l’arrêter demain ? Devrons nous bientôt verbaliser les salariés qui n’ont pas de chaussures de sécurité ou d’équipements de protection individuelle ? Et pourquoi pas ceux qui dépasseront la durée maximale du travail pendant qu’on y est ? Une inspection du travail sanctionnant les salariés, même les pires talibans libéraux du MEDEF n’auraient pu le rêver !

Il est des principes sur lesquels on ne peut transiger. Le rôle de l’inspection du travail n’est pas et ne sera jamais de verbaliser ou de sanctionner les travailleurs. Notre rôle est d’être à leurs côtés et de leurs représentants pour la défense de leurs droits. Le lien de subordination, né du contrat de travail, impose en contrepartie des devoirs et des obligations à l’employeur. Parmi celles-ci, l’obligation d’assurer la santé et la sécurité des salariés sur leurs lieux de travail. Le respect de l’interdiction de fumer s’intègre dans ce cadre, elle ne peut pas être une disposition à part, permettant ce genre d’ « innovation » dangereuse. Pour ce qui nous concerne, nous refuserons d’appliquer ces dispositions, nous refuserons de verbaliser des travailleurs et nous appelons tous les agents de l’inspection du travail à faire de même.

Agents de l’inspection du travail en colère !

Messages

  • Je suis content de lire cela, car je viens effectivement de voir un reportage evoquant cette disposition.

    Au delà du stérile débat pour/contre l’interdiction de fumer, cela met encore une fois un agent publique dans le rôle d’un policier.

    En fait, les non-fumeurs se trompent lorsqu’ils pensent que les fumeurs sont tous des egoistes qui ne songent qu’à leur liberté d’enfumer les autres.

    Il y en a, dont je fais parti, qui voient surtout que toute ces mesures restrictives, contre telles ou telles catégories de personnes, ont pour effet premier une atomisation des rapports entre les gens, avec pour conséquence un unique modèle de relation ; flic - intervenant.

    jyd.

    • Qui verbalisera les fonctionnaires de l’inspection du travail qui fument en voiture ?
      Qui fume à la DGT ? Les policiers fument avec ou sans uniforme ? Fumer après l’amour dans une maison close c’est verbalisable ? faudra voir...
      Depuis que j’ai arrêté de fumer je ne fume plus ! (je sais c’est bête..)

  • BRAVO YASSINE !

    Bon travail à l’UGFF et salut à Jean-Marc (CANON) et Bernard (L’HUBERT) !
    Un ancien du BN,

    NOSE DE CHAMPAGNE

  • Pour le Français qui se veut Libre et Démocratique

    Bien que cet article n’a aucun mérite à obtenir une réponse, il permet néanmoins de démontrer non seulement l’ignorance mais également l’incompétence de l’organisme que celui-ci semble représenter.

    L’auteur de cet article démontre clairement ses convictions jusqu’à faire comprendre ce que l’on connaît depuis toujours et qui est de trouver ou créer le "Bouc émissaire".
    Dans ses propos : "Les agents de l’inspection du travail auraient la possibilité de verbaliser non seulement l’employeur qui n’assure pas le respect de l’interdiction de fumer, mais également le salarié qui ne s’y soumet pas ! Si nous acceptons cette dérive aujourd’hui, …"

    Les choses sont très claires, l’employeur jusqu’à ce jour, ne faisait pas de distinction entre le non-fumeur et fumeur, ce qui comptait était les compétences et qualités de l’individu.

    Monsieur "Cédric" oublie la chose la plus importante, c’est que lors d’une embauche, nul n’est contraint à se soumettre aux conditions de l’entreprise pour cela les portes sont ouvertes pour y accéder, ceux qui acceptent d’entrer sont censés y trouver leur compte pour les autres il ont le droit de ressortir. L’ignorance de "Monsieur Cédric" démontre que si l’employé ne se soumet pas à l’interdiction de fumer, c’est l’Employeur qui devrait être sanctionné et non pas l’employé.

    Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais !

    Très belle perspective pour la Liberté du futur.

    Jene Pigerien