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Conflits d’intérêts du Gardasil : les principaux chercheurs français travaillent pour Sanofi Pasteur MSD
Publie le samedi 7 février 2009 par Open-Publishing
L’article que j’ai fait sur Pharmacritique s’appelle
(Ici, j’ajoute quelques éléments pour faciliter la compréhension, vu que l’article original fait partie d’une série difficile à résumer, mais que vous pouvez découvrir sur le blog, par exemple à partir des catégories dont je donne les liens à la fin.)
J’anticipe sur un article plus long qui s’intéressera aux conflits d’intérêts qui entachent le Gardasil et le Cervarix en France. Un lecteur m’a demandé de parler déjà des liens financiers des auteurs de l’étude de référence en France - et puis cela facilitera la lecture...
On nous sert toujours l’étude EDiTH comme LA référence française censée démontrer que le Gardasil sera utile en France parce que les deux génotypes de papillomavirus humains (HPV) contenus dans le Gardasil et le Cerarix seraient présents chez nous à des mêmes taux qu’en Haïti...
QUELQUES ELEMENTS POUR CONTRER LA DESINFORMATION
Alors que Pharmacritique a dit et redit, en présentant les résultats d’études et de monographies indépendantes sur le sujet, qu’il y a une très grande variation géographique de la distribution des 16 souches cancérigènes du virus, et que les souches 16 et 18 sont en fait rares, voire très rares dans les pays industrialisés et occidentaux. (Les détails et les références peuvent être lus dans les notes de la catégorie "Gardasil (divers)").
Une infection par l’une des 16 souches de papillomavirus - même à supposer qu’elle soit persistante et non neutralisée par le système immunitaire comme dans 90% des cas - ne suffit pas à déclencher une lésion précancéreuse (dysplasie moyenne puis de haut grade). Il faut d’autres causes supplémentaires pour qu’une dysplasie sévère et qu’un cancer du col de l’utérus s’installent. Pharmacritique a énuméré ces co-facteurs dans la deuxième partie de cette note : "Prévalence géographique très contrastée des papillomavirus, rappelle la monographie de l’agence de l’OMS. Gardasil et Cervarix devraient être utilisés en conséquence..."
L’EFFICACITE GLOBALE DU VACCIN GARDASIL EST DE... 17% contre les lésions précancéreuses, loin des 70% rêvés... Les filles du groupe placebo ont elles aussi commencé à être vaccinées, donc les essais ne mèneront plus à des résultats scientifiques concluants...
Pour des détails et des liens vers les critiques faites par des spécialistes étrangers - et qui contrastent fortement avec l’unanimisme français -, vous pouvez lire l’article assez synthétique "Gardasil, vaccin HPV très critiqué en Allemagne et ailleurs. Avis de spécialistes et synthèse des aspects essentiels". Ou encore l’entretien avec le spécialiste espagnol Pr Carlos Alvarez-Dardet, qui parle d’une expérimentation directe du Gardasil sur la population, compte tenu de l’absence de preuves d’efficacité, de la corruption par l’industrie pharmaceutique, des risques, etc. Il y a près de 50 articles sur Pharmacritique, aux catégories liées au Gardasil et au Cervarix, impossible de les lister ici.
LA QUESTION DES CONFLITS D’INTERETS - liens financiers des médecins et chercheurs avec l’industrie pharmaceutique - QUI JETTE UN SERIEUX DOUTE SUR LA VALIDITE DES ESSAIS CLINIQUES ET DES DONNEES VEHICULEES EN FRANCE
Ici, je voudrais parler non pas des aspects scientifiquement contestables, comme je l’ai fait dans d’autres articles sur Pharmacritique, mais surtout des conflits d’intérêts, des liens financiers des chercheurs français avec Sanofi Pasteur MSD, société détenue à 50% par l’américain Merck (qui a les droits partout en dehors de l’Europe et de l’Australie, où il les partage) et à 50% par Sanofi Aventis.
Et posons-nous la question autrement : pour qui parle le Pr Didier Riethmuller ? Interrogé par le journal 20 minutes , il a déclaré dans un entretien intitulé "Vers un cancer anecdotique" que le Gardasil serait une révolution ( !!) et que "Avec l’arrivée du Gardasil, ce cancer peut devenir anecdotique d’ici à vingt ans". Il a pris soin de donner une fourchette d’âge très large pour assurer un marché conséquent au vaccin : celui-ci serait destiné en priorité "aux préados et ados. Mais la cible, c’est surtout les 11-13 ans." (Les autorités sanitaires ont dit 14 ans).
Pour le Pr Riethmuller, Gardasil serait utile même aux femmes plus âgées, "mais son efficacité est maximale autour de 17 ans"… C’est une vue très démocratique : Gardasil pour tout le monde !
Mais est-ce le médecin qui parle ou le consultant pour Sanofi Pasteur MSD ?
Le Pr Riethmuller nous en a mis plein la vue avec une superbe présentation en couleurs des résultats de l’étude EDiTH, mais vous aurez beau chercher, vous ne trouverez nulle part la moindre mention de ses liens avec Sanofi Pasteur MSD… Non seulement ses conflits d’intérêts ne sont pas mentionnés dans les présentations qu’il fait, mais ils ne sont accessibles nulle part dans les revues françaises qui publient ses textes.
OU SONT LES DECLARATIONS D’INTERETS DES AUTEURS DE L’ETUDE FRANCAISE EDITH ?
Réponse : là où on les leur demande ! A savoir dans les revues médicales étrangères. La France ne demande rien en général aux firmes et aux médecins, donc, logiquement, elle n’a rien…
Prenons la publication des derniers résultats de l’étude EdiTH, dont voici les références exactes : Human papillomavirus genotype distribution in low-grade squamous intraepithelial lesions in France and comparison with CIN2/3 and invasive cervical cancer. The EDiTH III study. (L’étude EDiTH III : La distribution des génotypes HPV dans les dysplasies de bas grade en France et comparaison avec les dysplasies modérés et à haut grade (CIN 2/3) et les cancers invasifs du col de l’utérus). Gynecologic Oncology, Volume 110, Issue 2, August 2008, Pages 179-184.
Que voit-on à la fin, juste avant les références ?
« DECLARATION DES CONFLITS D’INTERETS :
Jean-Luc Prétet est un consultant pour Sanofi Pasteur MSD.
Anne-Carole Jacquard est une employée de Sanofi Pasteur MSD qui a développé et commercialise actuellement la vaccin Gardasil (contre les souches HPV 6-11-16-18).
Maëlle Saunier : Pas de conflits d’intérêts.
Christine Clavel a été conférencière pour le compte de Sanofi Pasteur MSD lors de la réunion Eurogin 2007.
Roger Dachez : Pas de conflits d’intérêts.
Jean Gondry : Pas de conflits d’intérêts.
Pierre Pradat : Pas de conflits d’intérêts.
Benoît Soubeyrand est un employé de Sanofi Pasteur MSD qui a développé et commercialise actuellement la vaccin Gardasil (contre les souches HPV 6-11-16-18).
Yann Leocmach est un employé de Sanofi Pasteur MSD qui a développé et commercialise actuellement la vaccin Gardasil (contre les souches HPV 6-11-16-18).
Christiane Mougin : Pas de conflits d’intérêts.
Didier Riethmuller est un consultant pour Sanofi Pasteur MSD. »
Il faudra vérifier de près s’il n’y a pas d’autres conflits d’intérêts, notamment pour ceux qui déclarent ne pas en avoir, mais cela prend du temps...
VOYONS DONC CONCRETEMENT QUI A FAIT LES ETUDES ET SOUS LE CONTROLE ET AUX ORDRES DE QUI ?
Il y a la rubrique « Remerciements », dans le même article de Gynecologic Oncology, où l’on peut lire : « Nous manifestons notre gratitude à Emilie Maillard, de Therapharm, Boulogne Billancourt, France, pour la gestion et l’analyse des données, ainsi qu’à Nubia Muñoz pour sa lecture critique du manuscrit ». Ainsi on apprend donc que les données n’ont pas été gérées et analysées par les auteurs eux-mêmes, mais par Therapharm, une CRO ou société de recherche sous contrat avec Sanofi Pasteur MSD… On apprend sur son site que Terapharm fait tout pour ses clients, de la recherche jusqu’à la… rédaction des articles (medical writing)…
Les grands pontes n’auraient donc qu’à donner leurs noms et apposer leur signature sur des articles livrés clé en main et faits en fonction de la volonté du client, à savoir la firme pharmaceutique. Citons le site : « Notre Département s’engage en partenariat avec vous [c’est-à-dire le client : la firme pharmaceutique] à respecter tous ses engagements afin de satisfaire à l’ensemble de vos exigences. »
On ne lit nulle part qu’il s’agit de mener un essai clinique selon les règles de l’éthique, de la transparence et de la science, indépendamment des payeurs, mais on lit partout à quel point la société de recherche sous contrat est soucieuse de rassurer le client de la place déterminante qui lui reviendra dans l’ensemble du processus. Le mot d’ordre est « satisfaire à l’ensemble [des] exigences » du laboratoire qui paie… De plus, il est clairement dit que « toute décision est prise avec le promoteur [le payeur, Sanofi Pasteur MSD en l’occurrence] », y compris la « revue du plan de validation » ou la « discussion des données présentant problème »…
Toute la page sur le "data management" est intéressante, mais soulignons juste quelques aspects : concernant la « revue médicale », « les points à contrôler sont définis avec le promoteur » et « les demandes issues de la revue médicale suivent le même circuit que les autres demandes de correction », à savoir, comme il est dit plus haut, discussion et décision prise avec le promoteur. C’est très intéressant que la firme qui finance ait son mot à dire quant au contrôle, à la validation, aux corrections des données et à tout autre aspect médical…
Pas besoin de traduction, là…
Rappelons-nous ce que pensait la Pre MARCIA ANGELL, ancienne rédactrice en chef d’une prestigieuse revue médicale du danger que représente la délégation de la recherche à ces sociétés privées de recherche sous contrat (CRO : contract research organisations), justement parce qu’elles n’ont pour seuls clients que les firmes pharmaceutiques... C’est une occasion de (re)lire son excellent texte, traduit par Pharmacritique dans la note "Marcia Angell dénonce la manipulation de la recherche clinique et le contrôle de l’information médicale par les firmes".
Pharmacritique tient le texte original de Gynecologic Oncology, qui mentionne les conflits d’intérêts des médecins et chercheurs français et n’est pas en libre accès, à la disposition des incrédules.
OU SONT CEUX QUI TIRENT LES FICELLES ? LES MANAGERS DE L’OMBRE ? LES REDACTEURS FANTOME ?
Cela ne vous rappelle-t-il pas le ghostwriting et le ghost management ? Cette gestion fantôme faite par des gestionnaires industriels cachés dans les coulisses, mais qui prennent les décisions auxquelles se conformeront ceux qui sont sur le devant de la scène et prêtent leur nom alors qu’ils n’ont pas eux-mêmes analysé, validé, contrôlé, corrigé les données…
Par ghostwriting je veux dire présence de ces auteurs fantôme qui rédigent les articles selon les exigences des services marketing des firmes pharmaceutiques. La technique de l’écriture – ou de la réécriture - par des rédacteurs médicaux non mentionnés et spécialisés dans la présentation des données sous la lumière voulue par les firmes – est régulièrement dénoncée comme une façon de manipuler les données des essais cliniques, par exemple par cet éditorial du JAMA (la prestigieuse revue de l’association des médecins américains) que Pharmacritique a traduit, et qui s’insurge contre la non concordance entre les auteurs figurant dans l’intitulé de l’article et les rédacteurs fantôme (ghost writers) qui sont là pour enjoliver les résultats en fonction de ce que demande le laboratoire qui produit le médicament ou le vaccin en question et a financé les essais cliniques.
On se demande quel a été le véritable rôle des pontes tels le Pr Riethmuller et le Dr Prétet dans ces essais cliniques, vu que c’est la SRC (société de recherche sous contrat) Therapharm qui a fait le boulot et pris les décisions directement avec le commanditaire (payeur promoteur), à savoir Sanofi Pasteur MSD ? On pourrait supposer, à la lecture de tous ces détails, que c’est leur nom qui compte, comme une garantie de scientificité, et que leur rôle principal vient après les essais : dans la promotion du Gardasil (et/ou du Cervarix, pour certains).
"GHOST MANAGEMENT" : GESTION EN COULISSES, GESTION FANTOME par l’industrie pharmaceutique, mais bien présente et efficace...
Les remerciements adressés à la Pre Nubia Muñoz dans le même article de Gynecologic Oncology ne sont pas non plus anodins, lorsqu’on a appris à regarder les choses d’un œil critique, exercé à la recherche des conflits d’intérêts… Elle est carrément membre du comité de pilotage stratégique (steering committee) de Merck, tout comme le Dr Jospeh Monsonego, le saint patron scientifique d’Eurogin…
Eurogin, c’est à lui seul toute une histoire, un entrelacs de conflits d’intérêts d’une étendue jamais vue, et qui nécessite des semaines des recherches pour débusquer les conflits d’intérêts des uns et des autres et avoir une idée d’ensemble des tentacules par lesquelles Merck, Sanofi Pasteur MSD, mais aussi GSK ont étouffé la pensée critique et se sont assurés des vassalités et des ouvertures pour faire du pharmacommerce de la peur à un niveau jamais atteint.
DES LIENS POUR APPROFONDIR : Vu le nombre important de notes à ce sujet et pour faciliter la lecture, les près de 50 articles sont répartis en quatre catégories :
Gardasil, Cervarix – conflits d’intérêts.
Gardasil, très critiqué à l’étranger
Publié d’abord sur Pharmacritique par moi-même.