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Constitution européenne : les Français à l’heure du choix dimanche
Publie le dimanche 29 mai 2005 par Open-Publishing"Oui" ou "non" ? Quelque 41,7 millions d’électeurs français sont appelés aux urnes, dimanche, sous le regard inquiet de leurs partenaires européens, pour un référendum sur la Constitution européenne lourd de conséquences pour l’avenir de l’Europe comme pour la vie politique française.
C’est la dixième fois depuis le début de la Ve République que le peuple est ainsi appelé à se prononcer directement, mais rarement consultation aura été aussi incertaine. Alors que le "oui" caracolait début 2005 à 60 pour cent d’intentions de vote, c’est désormais le "non" qui a le vent en poupe : dans la dernière ligne droite de la campagne, il atteignait entre 53 pour cent et 56 pour cent des intentions de vote, selon les instituts de sondage.
Dans ce contexte, le taux de participation, dimanche, sera observé à la loupe, une forte mobilisation des électeurs pouvant plutôt favoriser le "non". Lors d’un autre référendum au résultat incertain, sur le traité de Maastricht en 1992, plus de 69 pour cent des Français étaient allés voter.
Si le camp du "oui" continue à espérer un ultime sursaut des Français le jour J, ce référendum menace d’être le deuxième perdu par le pouvoir en place, après celui de 1969 qui avait entraîné la démission du général de Gaulle.
Jacques Chirac, lui, exclut de démissionner, mais une victoire du "non" serait un grave revers politique pour le chef de l’Etat à seulement deux ans de la fin de son mandat. La sanction serait comparable à celle subie après la dissolution ratée de 1997.
La vague de contestation, fondée sur le mécontentement social qui s’était déjà exprimé dans les urnes aux régionales et européennes de 2004, est telle que l’Elysée se prépare déjà à en tirer les conséquences. Dans son ultime intervention jeudi soir, Jacques Chirac a annoncé qu’il entendait donner "une nouvelle impulsion" à son action après le référendum, semblant ainsi confirmer un remaniement gouvernemental.
Après trois années passées à Matignon, le premier ministre Jean-Pierre Raffarin devrait donc céder la place la semaine prochaine. Reste à savoir qui lui succédera : pour l’heure, les noms du ministre de l’Intérieur, Dominique de Villepin, ancien proche collaborateur de Jacques Chirac, et de la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, ancienne présidente du RPR, reviennent avec insistance, le premier semblant tenir la corde. Interrogé sur France-2, l’intéressé s’est refusé à tout commentaire.
Un "non" déstabiliserait le pouvoir en France mais ouvrirait surtout une crise en Europe, dont les dirigeants ne savent pas vraiment comment ils en sortiraient. Car pour entrer en vigueur, la Constitution européenne, conçue pour permettre le fonctionnement d’une Union élargie à 25 Etats membres, doit impérativement être ratifiée par tous les pays européens. Certes, un "non" français ne stopperait pas le processus de ratification dans les autres pays, mais ces procédures paraîtraient dès lors assez vaines.
Déjà, plusieurs dirigeants européens, semblant se résigner à un rejet du traité en France, parlent de faire revoter les Français. "Ceux qui n’ont pas voté la Constitution, on leur demandera de la revoter", a ainsi déclaré Valéry Giscard d’Estaing, "père" de la Constitution européenne. "Il faudra attendre la fin du processus de ratification dans l’Union européenne", mais "si à la fin de ce processus, on n’arrive pas à résoudre les problèmes, les pays qui auront dit non devront se reposer la question", a également expliqué le président en exercice de l’Union européenne, Jean-Claude Juncker.
Mais un "non" français pourrait aussi être contagieux : selon les derniers sondages aux Pays-Bas, les électeurs s’apprêteraient également à rejeter le traité mercredi. Des référendums sont aussi prévus au Luxembourg le 10 juillet, au Danemark le 27 septembre, en Pologne et au Portugal en octobre, en Irlande et au Royaume-Uni en 2006, et peut-être en République tchèque. "Nous ne serons pas les seuls, nous serons les premiers", parie donc l’ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius, tenant du "non".
En revanche, si le "oui" l’emportait finalement dimanche, la France serait le dixième pays, après l’Allemagne vendredi, à ratifier la Constitution européenne. La procédure de ratification pourrait se poursuivre et les Européens pousser un "ouf" de soulagement. PARIS (AP)