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Début 2008, nos élites savaient que le secteur bancaire européen et américain était en faillite. Nos élites l’ont dissimulé.

Publie le lundi 3 janvier 2011 par Open-Publishing
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Paul Jorion revient sur la divulgation d’un document historique par Wikileaks : dès le 17 mars 2008, les dirigeants anglais et étatsuniens savaient que tout le secteur bancaire européen et américain était en faillite.

Lisez cet article :

« Depuis l’été dernier, la crise des marchés financiers a changé de nature. »

Un câble diplomatique datant du 17 mars 2008, récemment divulgué par Wikileaks, rapporte une conversation entre Mervyn King, le président de la Banque d’Angleterre, Robert Kimmitt, alors Sous-Secrétaire au Trésor américain, et Robert Tuttle, l’Ambassadeur des États-Unis en Grande-Bretagne, et répond indirectement à une question que l’on se pose à propos du déclenchement de la crise :

parmi les instances dirigeantes de l’époque, incompétence ou dissimulation ?

La réponse dans ce cas-ci est claire : dissimulation.

Parce que le diagnostic posé par Mervyn King ne diffère en rien de ceux qui furent proposés par les commentateurs de l’actualité financière à l’époque – je veux dire ceux d’entre nous qui n’avaient ni responsabilité politique, ni responsabilité au sein d’une banque, que celle-ci soit centrale ou commerciale.

Du côté des responsables, le message est resté identique, du plongeon du prix des titres adossés à des crédits hypothécaires subprime en février 2007 à aujourd’hui, et en contradiction flagrante avec les faits : "la crise bancaire est une crise de liquidité et non pas de solvabilité". Autrement dit, elle résulte d’un problème purement technique de circulation de l’argent au sein du système financier et non de la faillite de fait du secteur bancaire dans son ensemble.

Or, le Président de la Banque d’Angleterre le dit sans ambages lors de ce déjeuner d’affaires à Londres en mars 2008 : la crise bancaire est maintenant une crise de solvabilité et non pas de liquidité. Il ne date pas ce verdict du moment où se tient la conversation, mais de six mois auparavant : en août 2007, c’est-à-dire du moment où un responsable de BNP Paribas prononça à propos des titres subprime les mots fatidiques : « Pas de prix ! » (après moi, en fait).

Quel aurait été l’impact a posteriori d’un diagnostic vrai ?

Admettre l’insolvabilité de fait du secteur bancaire aurait débouché sur sa nationalisation, impliquant sa mise sous tutelle de l’État et un règlement par les investisseurs des pertes subies dans ce secteur.

Refuser de reconnaître l’insolvabilité a conduit au résultat que l’on connaît : le règlement de l’addition par le contribuable à la place de l’investisseur, et un boulet attaché à son cou pour une durée indéfinie.

Paul Jorion.

http://www.pauljorion.com/blog/?p=19899#more-19899

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