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Du G8 d’Evian au Stade de France...

Publie le jeudi 29 mai 2003 par Open-Publishing

Du G8 d’Evian au Stade de France, la police montée reprend du service

http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3228--321851-,00.html

LES CAILLOUX du chemin volent sous les sabots des deux chevaux lancés au galop à la poursuite du fuyard. Les cavaliers le rattrapent, leurs montures piaffent autour de lui pour l’intimider. L’homme est saisi au collet, plaqué contre l’épaule d’un cheval, menotté.

Il ne s’agit pas d’une scène de western, mais d’une démonstration de technique policière : les cavaliers appartiennent à l’unité équestre départementale de la Seine-Saint-Denis, basée au parc de La Courneuve, et ils se produisent devant Jean-François Etienne des Rosaies, chargé en janvier par le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, de réaliser un état des lieux sur la situation et les missions de la police à cheval en France.

Depuis les années 1930, la France a abandonné le recours à la cavalerie pour le "maintien de l’ordre". En revanche, le cheval est de plus en plus apprécié, depuis une dizaine d’années, pour le "service d’ordre" (canalisation et missions de secours dans une foule non hostile) ou la "surveillance générale" (lutte contre la petite et la moyenne délinquance) dans des milieux naturels, des zones périurbaines, voire en pleine ville : le préfet Etienne des Rosaies indique qu’il reçoit "chaque semaine 10 à 15 lettres d’élus" qui demandent un audit pour créer une brigade à cheval. Parallèlement à ce retour des gendarmes et des policiers à cheval, des "gardes", aux statuts et aux uniformes variés, patrouillent sur les plages ou participent à la prévention des incendies de forêt. Une journée consacrée au retour du "cheval dans la ville" a d’ailleurs été organisée à l’hippodrome d’Auteuil, dimanche 25 mai.

L’unité équestre de La Courneuve a été mise en place en 1994, pour contrer l’activité des bandes sur les 700 hectares du parc. Aujourd’hui, cinq départements de l’Ile-de-France ont une unité équestre. Celle de la Seine-Saint-Denis a étendu ses missions à cinq sites, dont des cités urbaines sensibles de Montreuil, où les policiers à pied ne s’aventuraient plus. Les fonctionnaires assurent qu’ils y reçoivent un accueil sensiblement différent.

UN OUTIL D’INSERTION

Le cheval assure prévention, répression mais aussi relations publiques. Les policiers laissent les enfants caresser leurs chevaux, mais ils ont aussi dressé ceux-ci - tous de grande taille pour être encore plus dissuasifs - à taper du pied ou à esquisser un cabré face à un récalcitrant. L’effet est garanti.

Autour de La Courneuve, expliquent le major Le Borgne et le brigadier Tarlet, il arrive que les policiers poursuivent à cheval un auteur d’infraction jusque dans les cités avoisinantes. Mais le cheval est aussi un outil d’insertion : des policiers servent de moniteurs d’équitation à des jeunes des cités.

Le préfet, qui doit rendre son rapport le 30 juin, préconisera trois mesures : la création de formations publiques et de diplômes d’Etat pour les nouveaux métiers de "gardes" à cheval ; l’achat par le ministère de l’intérieur de ses propres chevaux, pour ne plus dépendre, comme c’est le cas aujourd’hui, des élus locaux ; le regroupement de ces policiers dans une structure de type "régiment".

La police se retrouverait ainsi dans une situation parallèle à celle du régiment de cavalerie de la garde républicaine. Dans un passé récent, la traditionnelle rivalité police-gendarmerie s’est exercée jusque dans l’usage du cheval. Mais le rapprochement entre les deux corps décidé par Nicolas Sarkozy a fait bouger les lignes. Sur proposition de M. Etienne des Rosaies, une quarantaine de gardes républicains et de policiers montés participeront conjointement à la sécurité du G8 d’Evian, du 1er au 3 juin. Les deux corps y utiliseront pour la première fois la même fréquence radio : les gendarmes seront branchés sur le système Acropol de la police.

L’unité équestre de la Seine-Saint-Denis prépare une autre première : le 7 juin, au Stade de France, elle participera à cheval au service d’ordre de la finale du championnat de France de rugby. Pour ce type de mission, "7 policiers à cheval remplacent 35 hommes à pied", a calculé le major Le Borgne.

Jean-Louis Andreani