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ENTRE RESPUBLICA ET LES INDIGENES DE LA REPUBLIQUE

Publie le vendredi 5 janvier 2007 par Open-Publishing
6 commentaires

ENTRE RESPUBLICA ET LES INDIGENES DE LA REPUBLIQUE
(A propos d’une polémique résiduelle mais réccurente dans ATTAC)

Le débat antiraciste en France semble monopolisé par un affrontement des extrêmes avec d’une part les "indigènes de la République" et d’autre part les partisans de "Respublica" . Laisser croire qu’il n’y a aucune place pour penser l’antiracisme entre, par exemple, Pierre Tévanian animateur du site LMSI et Bernard Teper de "Respublica" est un mensonge
dommageable pour la pensée libre et critique. De fait ces pensées organisées qui s’opposent si frontalement et parfois de façon caricaturale se trouvent souvent un point d’ancrage sur le thème de la République ; les uns pour l’encenser et en faire un étendard vertueux fournissant réponse à tout les problèmes de l’heure, les autres pour y voir un objet de haine (la République postcoloniale) et de combat libérateur.

Ainsi pris dans cette opposition les antiracistes seraient sommés de choisir entre le camp des anti-républicains islamo-gauchistes (car ils font le jeu de l’intégrisme islamique en ne défendant pas la République) et des républicanistes dogmatiques haineux et sectaires pour qui la République est le cache sexe d’un discours essentialiste sur la religion musulmane et les musulmans ce qui les amènent tel Redeker à tenir un langage clairement raciste.

Le MRAP ne se réclame d’aucun de ces courants . Certes des membres du MRAP se reconnaissent dans chacun de ces deux courants et ils en ont le droit bien évidemment. Mais d’une part l’immense majorité des adhérents du MRAP se positionnent clairement entre ces deux extrêmes et dans un spectre variable selon les thèmes abordés ; d’autre part le MRAP
lui-même procède à des analyses qui ne sauraient le rattacher à l’un de ces deux courants extrêmes.

Ainsi,on ne saurait accuser le MRAP d’être "le cheval de Troie de l’islamisme politique" (1) même si le MRAP a mis du temps à reconnaître l’existence de l’intégrisme religieux, lequel ne se réduit d’ailleurs pas à la version maximaliste de l’islamisme politique . La position du
> MRAP contre les propos racistes de Redeker prend en compte cette dimension. De même les militants du MRAP ne sauraient faire "le lit des zélateurs d’une idéologie sexiste, homophobe, et antisémite". Le MRAP "ne cèdera pas à l’idée selon laquelle la spécificité des traditions culturelles, des conditions sociales,des convictions individuelles peuvent autoriser le sexisme, l’homophobie, ou l’antisémitisme".

Ceci dit, l’avancée - ignorée par les partisans de Respublica - du combat contemporain du MRAP consiste à montrer que les musulmans ne relèvent pas d’un ensemble homogène tenté par le sexisme, l’homophobie et l’antisémitisme. La présence d’une minorité d’individus particulièrement réactionnaires ne sauraient frapper l’ensemble des croyants de cette religion qui ne sont ni plus ni moins sexistes que les autres (chrétiens,juifs, athées). Le MRAP n’ignorent pas non plus que de nombreux musulmans et musulmanes sont attachés à la laïcité. Ils n’ont pas non plus un sens de la communauté si intense qu’il empêcherait une
participation citoyenne à l’identique des autres citoyens français. Le MRAP revendique à ce propos le droit de vote et d’éligibilité aux résidents étrangers extracommunautaires (d’origine non européenne).

Pour ma part au lieu de me focaliser sur une République sans adjectif, une République-rempart incertaine je préfère articuler altermondialisme, antisexisme, antiracisme et laicité ; une laïcité qui ne saurait effectivement être confondue avec une tolérance aveugle et sans principes car " en affirmant le principe de séparation entre la sphère privée et la sphère publique, la laïcité fait cran d’arrêt à toutes les forces qui travaillent à communautariser le lien politique". La République à laquelle je me réfère dépasse son horizon borné couramment assigné : elle serait simplement "sociale et laïque" .

La République est porteuse d’une dynamique forte qui va au-delà de sa version bourgeoise. Elle est potentiellement altermondialiste si l’on veut bien se souvenir que ce mouvement se fixe un but : un autre monde, une autre europe, une France non dominé par le capital et le marché. Elle peut s’ouvrir à l’éco-socialisme (2).

Christian DELARUE
Secrétaire national du MRAP
Membre du CA d’ATTAC France

1 in " Redonner son sens à la lutte contre tous les racismes" appel signé par :
> Catherine Kinztler, Philosophe
> Antoine Peillon, membre fondateur de "J’Accuse"
> Marie Perret, Présidente du Conseil Scientifique de l’UFAL
> Alain Policar, Professeur de Sciences Sociales
> Pierre-André Taguieff, Philosophe et historien des idées
> Bernard Teper, Président de l’Union des Familles Laïques

2 Sur l’écosocialisme voir texte personnel sur Bellaciao

Messages

  • parler de République post coloniale, comme parler d’indigènes de la République, c’est se tromper deux fois, et par ces deux expressions fautives, participer au génocide en cours, accéléré ces jours ci, des VRAIS indigènes de la République toujours coloniale.
    Les Indigènes de la République, c’est le titre de l’article publié dans Le Monde par l’anthropologue Simone Dreyfus-Gamelon.
    Elle décrivait la dernière colonie de la France où la République occupe les terres de 6 nations indigènes, 6 sur les 30 qu’il y avait au début de la colonisation de la Guyane. Parler de " post colonial", c’est nier le fait que la France colonise encore et toujours dans le Pacifique et en Amérique tropicale. Parler d’indigènes de la République en déguisant sous ce terme un ressentiment de populations de la Xeme génération, venues des colonies anciennes ou toujours actuelles, c’est participer à l’occultation du fait que des peuples indigènes ont été contre leur gré "départementalisés " en 1946, et se sont retrouvés artificiellement intégrés à l’intérieur de la République. Voila les vrais indigènes de la République, ceux qui viennent d’écrire au président Chirac le 28 décembre, pour le supplier in extrémis de ne pas signer avec son Premier ministre le décret de création d’un parc national qui actuellement envisage de livrer tout le territoire de Wayana et des Teko aux industriels miniers et à la cohorte des bandits chercheurs d’or qui , en Guyane, gravitent toujours autour de cette activité de plus très polluante, si polluante que le dernier rapport de www.solidarite-guyane.org parle de GENOCIDE
    Les discours intellos-parisiens participent à ce génocide en occultant les noms des vrais peuples colonisés, aujourd’hui, par la France, en Ménalésie, en Polynésie, et en Amazonie. Ce sont les DOM-TOM qui abritent les Indigènes de la République. Thierry Michalon, lui, dirait que cela concerne surtout la République intra-territoriale, les DOM, par opposition à la République extra territoriale (TOM), où la Constitution prévoit un éventuel avenir moins férocement assimilateur. on lira Norbert Rouland = Etre Indien en Guyane francaise, de quel droit ? in Revue francaise de Droit Constitutionnel, et sa somme (PUF 1996) sur les droits des peuples autochtones, pour mieux comprendre ce que signifie être "indigène de la République" dans la France coloniale d’AUJOURD’HUI.
    Thierry Sallantin, ethnologue.

    • Il s’agit là d’une incompréhension et d’un faux procès. Parler de République « postcoloniale » signifie exactement l’inverse … à savoir que l’Etat français aujourd’hui n’est pas tombé du ciel des principes républicains mais est enraciné dans une histoire qui est celle du colonialisme, de la constitution d’un Etat de droit colonial et de tout ce que cela induit dans l’ordre de la représentation sociale. C’est une continuité au contraire qui est soulignée ainsi, continuité qui s’exprime non seulement par la réalité toujours présente de pratiques coloniales (en Guyane et ailleurs) mais aussi par les conséquences sociales, économiques et politiques d’une représentation de l’indigène construite aux temps forts de l’histoire coloniale française (statut de l’indigénat) notamment en Algérie. Ces idées (qui, en d’autres temps, ont permis et légitimé le régime d’exception, la répression généralisée, les massacres, la torture, les exécutions sommaires …) sont toujours aisément repérables en ce sens qu’elles continuent aujourd’hui à structurer l’inconscient collectif … C’est l’idée en particulier selon laquelle la vérité ou l’authenticité de la nation dépend principalement de l’origine de ses membres. Idée que le colonialisme et l’Etat de droit colonial a portée le plus loin possible. Subtilement fabriquée en corollaire de l’institution de l’indigénat, cette idée continue ses ravages aujourd’hui dans les termes d’une subjectivité de masse convaincue de l’incontournable nécessité d’une hiérarchisation et d’une séparation stricte des sous-ensembles constituant la nation. Parler aujourd’hui d’indigènes de la République … c’est dire que cette représentation sociale née aux temps forts du colonialisme perdure par-delà cette époque (et non pas dire que le colonialisme n’existe plus). Mais s’il importe de souligner la continuité de ce lien, c’est qu’il explique largement notre difficulté à prendre en compte les conséquences sociales mais aussi administratives, judiciaires et policières actuelles de cette rupture (subjectivement et pratiquement intégrée) de l’unité de la nation : discrimination devant le travail ou le logement, contrôles d’identité arbitraires, centres de rétention soumis à l’impératif policier, double peine, entrave à la circulation des personnes, etc … En clair, la représentation (ou l’image) de l’indigène perdure comme légitimation non seulement dans le comportement de nombreux citoyens convaincus d’appartenir originellement à la nation, mais encore dans la législation et les décisions administratives concernant les ressortissants du Tiers-monde (notamment de l’Afrique subsaharienne et du Maghreb) présents sur le territoire français ou retenus aux frontières. JPL-Collectif unitaire de Manosque

  • Bien vu, Monsieur Delarue !

    Voici la réponse que j’ai rédigée pour ResPUBLICA.

    http://www.nouvel-islam.org/article.php3?id_article=87

    M. Delarue a bien évidemment un droit de réponse imprescriptible.

    Avec tous mes respects

    Mohamed Pascal Hilout

    Initiateur du nouvel islam en France

    Site : http://nouvel-islam.org

  • Si vous vous identifiez à la laïcité et, sous entendu le MRAP avec, dans les faits quand on voit les actions judiciaires ou dans les médias de votre président. on peut légitimement se poser la question de quelle laïcité s’agit-il ?

    Une laïcité avec des oeillière ? qui ne regarde que vers le judaïsme et le christianisme ?
    une laïcité alternative ? un coup on est laïque, un coup quand il s’agit de l’islam on ne l’est pas.
    Une laïcité ouverte aux plaintes des fondamentalistes musulmans ?

    Car si on regardes les actions de votre association et particulièrement de votre président qui se dit pourtant "de gauche et laïque", on a eu droit à tout l’étalage que l’on attend plutot de la droite conservatrice cléricale :
     interdiction ou condamnation du blasphème et du religieusement incorrect, qu ce soit avec houelbecq, chagnon, charlie-hebdo (quelle honte pour une organisation soit disant de gauche et laïque), ou peut être d’autres.
     pénétration et défense des rites religieux imposés à des non pratiquants (voile), ou organisation de ceux ci par l’état, comme la défense burlesque pour la viande halal à l’école dans un débat télévisé par mouloud aounit réagissant comme si il était personnelement impliqué dans cette affaire, en oubliant que l’état et les religions sont séparés, que la république ne reconnait pas de religion et ne doit pas les financer, et donc n’a pas à organiser un rite religieux particulier créant un communautarisme alimentaire qui plus est sert de financement au culte musulman.

    Pour en revenir à houelbecq, je ne connais pas trop le personnage, mais si il a vraiment énoncé des idées qui peuvent être considéré comme racistes, il fallait l’attaquer sur ces idées là qui s’adressent aux personnes directement et non à un corpus idéologique religieux, pas sur une phrase symboliquement trés forte certes, mais qui relève du discours de la critique des idées adverses.
    Quand à poursuivre charlie-hebdo et france soir au sujet des caricatures, pourquoi ne pas poursuivre tous les journaux qui relatent, par exemple, les événements de tags nazis sur les synagogues et les cimetières juifs avec photo à l’appuie, puisque ces images sont une offense raciste aux juifs ?

    Quand à l’affaire chagon, qu’est ce que le MRAP est venu faire ans cette galère ? vu que l’affaire hormis l’agitation médiatique a été déboutée dés le début par la justice avec raison, vu qu’il n’y avait rien de raciste dans les propos. Depuis quand dire qu’un chef de guerre qui a fait tuer des opposants et participé a des pillages, est un acte raciste passible de poursuites par une association anti-raciste de gauche ? D’ailleurs mouloud aounit, n’ayant pas peur de se contredire, a affirmé dans un débat suite à l’affaire redecker qu’on pouvait l’affirmer concernant mahomet sans être raciste.

  • Le MRAP se situe entre les extremes. Le MRAP ne prend pas partie. Il se contente de se repositionner en fonction de ce qu’il perçoit comme étant des extremes. Au final le MRAP produit de la purée comestible pour tout le monde.

    Ce n’est pas la voie choisie par les indigènes qui ont décidés de mettre les pieds dans le plat quitte à créer des clivages sur des aspects fondamentaux de la société française contemporaine.

    Merci aux indigènes de foutre le bordel dans la purée bienpensante.

  • Tout a fait d’accord.

    Le MRAP a été attaqué aussi bien par d’indécrottables et béats admirateurs de la droite, que par des (un peu trop) militants d’extrême-gauche.

    Nous nous situons dans la même mouvance que le MRAP depuis très longtemps, et nous avons souffert quand nous entendions les paroles désobligeantes contre le MRAP.

    Aujourd’hui il s’avère qu’une tendance fédératrice souterraine générale existe peut-être. Les gens commencent à en paler à Montreuil et dans différentes autres villes. Peut-être pourriez-vous nous soutenir dans cet effort fédérateur ?

    Merci de me faire part de vos sentiments à von_mp@yahoo.com

    Marc POIRIER. Fédérateur NSD

    PS : sur le net : http://nsd.007.free.fr