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L’Intérieur veut limiter la régularisation des étrangers malades

Publie le mercredi 8 novembre 2006 par Open-Publishing

dans LES ECHOS d’aujourd’hui

L’Intérieur veut limiter la régularisation des étrangers malades
Auteur : CARINE FOUTEAU

Après avoir supprimé la régularisation des sans-papiers vivant en France depuis
dix ans, le ministère de l’Intérieur veut limiter l’entrée sur le territoire
des étrangers malades.

Un projet de circulaire auquel « Les Echos » ont eu accès dévoile ses intentions
 : il s’agit, en priorité, de durcir les conditions pour être régularisé afin,
selon ses auteurs, de lutter contre un « appel d’air ».

Selon un rapport que l’Igas vient de publier, 6.307 cartes de séjour d’un an ont
été délivrées en 2005 à des étrangers malades (sans compter les
renouvellements). Ce chiffre est stable sur un an mais en forte augmentation
depuis 1998, date de la création du dispositif par la loi Chevènement. Celle-ci
a prévu en effet la délivrance d’une carte « vie privée et familiale » avec
droit au travail pour l’étranger « résidant habituellement en France dont
l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait
entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne
puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays dont il
est originaire ». Autrement dit : une personne vivant en France depuis au moins
un an et qui n’a pas accès au traitement dans son pays d’origine, notamment en
raison de moyens financiers insuffisants, est en droit de se faire soigner sans
être obligé de rester dans la clandestinité.

Le projet de circulaire juge ce critère trop large et considère qu’à partir du
moment où le traitement « existe dans la capitale ou dans au moins une ville du
pays [d’origine] », le malade ne devrait plus être régularisé : peu importe,
donc, que le médicament coûte trop cher, qu’il soit disponible en trop petite
quantité ou dans un endroit éloigné.

Pour décider du sort des patients, les médecins inspecteurs et les préfets
devraient s’appuyer sur les conclusions d’un listing indiquant, pays par pays,
si le traitement « existe » pour les principales pathologies répertoriées par
l’OMS, à l’exception du VIH et de la tuberculose. Cette liste vient d’être
réalisée à partir d’un questionnaire envoyé en mai 2006 à 26 ambassades de
France. Selon le projet de circulaire, l’offre de soins serait « exhaustive »
au Maroc, en Tunisie, en Roumanie, en Colombie, en Russie et aux Philippines :
les ressortissants de ces pays seraient ainsi exclus de la régularisation, sauf
à titre exceptionnel.

Ecorner le secret médical
Enfin, en donnant plus de latitude aux préfets, le texte prend le risque
d’écorner le secret médical, puisque l’avis délivré par le médecin inspecteur
(positif dans 65,2 % des cas en 2004) devrait « donner au préfet des
indications suffisantes sur la gravité de la pathologie (...) ».

Cela fait quatre ans que la Place Beauvau essaie de refermer cette porte
d’entrée, moins pour faire des économies (les sans-papiers ont accès aux soins)
que par crainte d’entrées abusives sur le territoire. En vain jusqu’à présent.
Il n’est pas sûr que cette nouvelle initiative obtienne l’aval des autres
ministères concernés (Santé et Emploi). Mais il est certain qu’elle suscitera
la désapprobation des médecins et des associations de défense des droits des
étrangers.