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L’obligation vaccinale est-elle encore justifiée ?

Publie le lundi 5 novembre 2007 par Open-Publishing
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La vaccination pouvant induire des effets indésirables (et ces effets étant trop peu notifiés cliniquement et épidémiologiquement parlant), l’occurrence des maladies couvertes par les vaccins anciens étant rare et la vaccination n’étant pas le facteur unique de la baisse ou de la disparition de maladies infectieuses, la criminalisation de l’insoumission vaccinale, telle qu’elle est imposée en France, nous semble abusive – et
contreproductive.

Elle serait peut-être acceptable si une totale transparence était apportée sur les ratios bénéfices/risques, si une communication authentique était menée sur les effets indésirables, si les autorités recherchaient systématiquement à recenser ces effets contraires et si elles acceptaient d’indemniser les victimes sur présomption raisonnable de lien (et non en présence de preuve) entre maladie et vaccin, du moins lorsque la
vaccination est obligatoire (DTP et HB pour les professionnels de santé).
Il faudrait en effet inverser la charge de la preuve de l’innocuité de chaque acte vaccinal, charge qui devrait incomber totalement à celui qui l’impose. Le doute doit bénéficier à celui qui subit, non à celui qui impose comme c’est le cas aujourd’hui.

L’autorité, parce qu’elle ordonne le vaccin, ne doit pas se contenter de déclarer une
absence de preuve entre la maladie d’une victime et un vaccin pour se dédouaner de sa
responsabilité. Elle ne doit pas demander au malade de prouver le lien entre sa maladie
et le vaccin pour prendre son cas en considération.
Ainsi, toute déclaration étayée de maladie associée à un vaccin devrait être présumée
recevable. A charge pour le médecin et le laboratoire, s’ils le peuvent, de trouver l’autre
cause de la maladie, seul moyen rationnel d’innocenter le vaccin.
Le bénéfice pour la collectivité (des vaccins obligatoires) n’est pas si certain. Un
nouveau bilan comparé des risques et des bénéfices nous paraît donc indispensable à
établir, avec des scientifiques indépendants et intégrant (pour les infirmer ou les
confirmer) les arguments de tous y compris des contestataires.

Il s’agit essentiellement un affichage politique puisque, dans les faits, les sanctions prononcées par des tribunaux sont quasi inexistantes. L’on a seulement assisté à quelques descentes de gendarmerie. Mais le principe existe comme une menace permanente au-dessus de tous ceux qui ont un regard critique vis-à-vis de l’obligation vaccinale.
Un débat démocratique approfondi (commission d’enquête parlementaire, conférences
citoyennes, etc.) sur le bien-fondé et les modalités de la politique vaccinale telle qu’elle
est actuellement menée devrait être organisé. Les arguments d’autorité (« Les
scientifiques savent ce qu’ils font ») et de foi (« S’il y avait vraiment des risques, les
autorités ne laisseraient pas faire ») sont désormais largement inopérants.

Pour enrayer l’actuel recul de la confiance en la politique française de prévention
sanitaire, celle-ci ne devrait être imposée que si et quand elle est vraiment nécessaire, et
en toute connaissance de cause, ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui, les données
diffusées dans le grand public laissant peu de place aux doutes ou aux critiques.
Si l’on veut que cette contrainte soit socialement acceptée, les autorités devraient
prendre plus sérieusement en compte les propos des victimes (réelles ou supposées) de
la vaccination ainsi que les arguments des sceptiques et des opposants.

Elles devraient
leur répondre point par point sans les diaboliser et accepter les échanges contradictoires
et publics.

La liberté de vaccination devrait être laissée aux parents, dans des conditions de lucidité
et de responsabilité à définir. De plus en plus de voix, y compris dans le monde médical
et administratif (voir nos interviews), soit questionnent, soit souhaitent la levée de
l’obligation vaccinale.

De même, la perspective d’un dialogue loyal, rigoureux, transparent, contradictoire et
arbitré de façon impartiale, basé sur une grande enquête scientifique indépendante,
détendrait certainement les acteurs de cette controverse et nous permettrait, à nous
citoyens, d’y voir plus clair. Cela donnerait par la suite plus de légitimité et de force aux
décisions des autorités. Et rassurerait nombre de parents soucieux de la santé de leurs
enfants et qui ne veulent pas les engager malgré eux dans des voies qui pourraient leur
être dommageables, parfois à vie.

Enfin, les autorités devraient faire preuve de plus de transparence dans le jeu des
différents acteurs (séparation entre les rôles informatifs et les rôles commerciaux au
sujet des vaccins ; composition et éthique des instances sanitaires concernées,
communication plus transparente sur les effets indésirables, etc.) et mieux expliquer
leurs raisons.

Propos recueillis par Jean-Luc Martin-Lagardette, journaliste à l’agence de presse "Technoscope" :

-----Interview réalisée à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches-----

« A titre personnel, je suis favorable à la levée de l’obligation vaccinale »

 L’enquête menée autour du thème de la vaccination obligatoire fait apparaître
une importante sous-notification des effets indésirables des vaccins. Cela ne peut-il
pas nuire à l’établissement de la balance bénéfices/risques, par exemple dans le cas
du vaccin contre l’hépatite B ?

 Non, dans le sens où les données manquantes ne sont pas significatives : elles
concernent essentiellement des réactions adverses bénignes. Un médecin ne peut
signaler le moindre désagrément que le patient lui signale après une vaccination. En cas
de recensement de désordres plus graves, il y a nécessairement une alerte de la part des
professionnels de santé. Des enquêtes nationales peuvent alors être entreprises par les
services compétents (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé,
AFSSAPS). Si un réel problème survient, les statistiques en provenance de nos systèmes
de collecte et d’alerte le font vite apparaître.
Dans le cas du vaccin contre l’hépatite B, les études n’ont pas montré, statistiquement
parlant, qu’une tendance se dessinait signalant un excès d’effets indésirables.

 Pourtant une étude menée au Royaume-Uni apporte des éléments en faveur de
l’existence d’une association entre ce vaccin et la survenue de sclérose en plaques
chez l’adulte. Et l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de
santé) a conclu qu’un risque faible ne pouvait pas être exclu chez l’adulte.

 Vous évoquez l’étude Hernan de 2004. C’est une étude sérieuse mais qui souffre de
quelques biais méthodologiques qui ne permettent pas d’en extrapoler les résultats.

Toutes les autres études concluent à la non-évidence d’un lien entre la vaccination
contre l’hépatite B et la survenue de sclérose en plaques.

Une personne qui souffre de sclérose en plaques et qui reçoit une succession de vaccins
ne fait pas une poussée à chaque injection. De fait, tout vaccin peut avoir dans de rares
cas une influence sur la poussée d’une maladie auto-immune. C’est précisément l’intérêt
des études bénéfices/risques, menées avec des outils informatiques très poussés, de
calculer les risques éventuels en rapport avec les bénéfices de la vaccination. C’est ainsi,
pour prendre l’exemple d’un médicament courant, que l’on n’a pas interdit. On ne va
quand même pas interdire la pénicilline qui sauve des millions de vies humaines alors
qu’elle a pu dans l’histoire entraîner des effets secondaires graves, dont des cas mortels
exceptionnels, parce qu’elle a aussi tué des gens…

 Des malades luttent pour tenter de faire reconnaître une nouvelle maladie, la
myofasciite à macrophages, qui serait due essentiellement à l’aluminium contenu
dans des vaccins. Qu’en pensez-vous ?

 Les études n’ont pas montré de lien statistique entre l’aluminium et cette maladie. Moi
aussi, comme tout le monde, j’ai de l’aluminium dans le bras, avec des macrophages
autour de la lésion, et je ne suis pas malade. Cela dit, cela me fait de la peine pour ces
malades présentant un syndrome fibromyalgique. Ils souffrent réellement. Mais je pense
que d’eux-mêmes, ils n’auraient pas fait le lien entre leur maladie et la vaccination. Ce
sont des médecins qui le leur ont suggéré.

Vu la sensibilité écologique qui s’étend de nos jours, je pense qu’on ira de plus en plus
vers des vaccins sans adjuvant ou avec des adjuvants biodégradables. C’est une
approche que je soutiens.

 Le gouvernement a décidé en début d’année de durcir les pénalités en cas de refus
de vaccinations. Estimez-vous cette sévérité justifiée ?

 L’obligation vaccinale est née à une époque où l’on comptait beaucoup de morts suite
à des infections comme la diphtérie, le tétanos, etc. La polio aurait pu être éradiquée si
le Nigeria ne s’était pas opposé au programme de vaccination par soupçon envers de
supposées arrière-pensées occidentales.
C’est vrai que l’hygiène a beaucoup contribué à la réduction d’occurrence de ces
infections. La tuberculose avait nettement régressé grâce à l’amélioration de l’habitat.

Les vaccins ont été des éléments de progrès parmi d’autres. Mais ils restent
indispensables. Il y aurait danger, par exemple, à arrêter totalement le BCG. C’est
faisable mais, dans ce cas, il faudrait être draconien dans le contrôle des populations à
risque, dans le dépistage et la gestion des malades au cas par cas, en prenant aussi en
considération leur entourage. Cela exigerait une mobilisation lourde et coûteuse.

 L’obligation est-elle aujourd’hui toujours aussi nécessaire ?

 Nous ne sommes pas des acharnés de l’obligation vaccinale ! A titre personnel, je suis
favorable à sa levée. On pourrait, par exemple, la remplacer par une obligation de
consultation vaccinale. Chacun serait ainsi invité à prendre rendez-vous avec son
médecin et à donner la preuve qu’il a discuté avec lui. Il pourrait alors déclarer, s’il le
veut, son refus de la vaccination à l’homme de l’art qui notifierait cette position
maintenue en toute connaissance de cause.

Nous pourrions évoluer vers plus de démocratie sanitaire dans laquelle des individus
responsables, les parents, s’engagent en signant un document qui serait également signé
par le médecin. Cela fait déjà quelques années que l’on discute de cette proposition.

 Quel avenir pour cette proposition ?

 Je pense que nous y viendrons un jour ou l’autre. Il faut préalablement lever quelques
obstacles. Les populations pauvres et défavorisées, qui voient rarement ou jamais de
médecin, risqueraient d’en être victimes si cette levée de l’obligation n’était pas
accompagnée de mesures ad hoc.

Et puis, socio-culturellement, c’est compliqué à mettre en place. Il ne faudrait pas
brusquer les choses, ni que cette décision apparaisse à tort comme un recul, comme la
reconnaissance d’erreurs de stratégie.

Il faudrait enfin accompagner cette évolution par une meilleure communication sur les
vaccins, qui est très insuffisante en France. Même si l’on assiste à des progrès, comme
avec la semaine européenne de la vaccination. Ce n’est pas facile de communiquer aussi
sur les risques. Mais il faut le faire. Je suis totalement pour favorable à ce que la
communication des autorités intègre mieux l’information sur les effets indésirables.

Christian Perronne, président du Comité technique des vaccinations (CTV)
Christian Perronne est président du Comité technique des vaccinations jusqu’en
septembre 2007 et président de la Commission spécialisée Sécurité sanitaire du Haut
Conseil de la Santé Publique

-----Interview téléphonique-----

« L’acte vaccinal devient détestable quand il n’est pas souhaité »

 La nouvelle loi criminalisant le refus vaccinal vous paraît-elle opportune ?

 L’Etat s’y prend mal en adoptant cette politique. Il a pourtant toutes les données, tous
les dossiers, il pourrait mieux communiquer. L’Institut national de prévention et
d’éducation pour la santé (Inpes) se contente essentiellement - en vaccinologie - de faire
la promotion du vaccin contre la grippe. L’industriel, lui, ne souhaite pas communiquer :
ce n’est pas dans sa culture et ce ne serait a priori pas crédible. D’un autre côté, il se
réfugie derrière le secret industriel, ce qui ne facilite pas la transparence sur ses produits.

Notre souhait le plus cher, à nous médecins, hospitaliers ou libéraux, est que nos
patients adhèrent à ce que nous leur proposons, non qu’ils y soient contraints. Cette
obligation vaccinale emm… tout le monde. Ce n’est pas valorisant pour nous. L’acte,
qui en plus ne nous rapporte pas un sous, devient détestable lorsqu’il n’est pas souhaité -
quand il n’est pas contesté - par nos patients. Ils perdent confiance en nous car nous
apparaissons complices d’un système dont ils ne perçoivent pas la justification. Les gens
sont de mieux en mieux informés aujourd’hui, ils doivent et peuvent de plus en plus
s’approprier leur santé. J’ai confiance en l’espèce humaine. Sinon, c’est à désespérer !

C’est pourquoi je ne défends pas ce type de loi. L’affaire mérite un travail plus en
finesse et en profondeur.

 Que proposeriez-vous ?

 Il faut lever l’obligation vaccinale quand il n’y a pas péril immédiat. Le tétanos, c’est
une aberration de l’imposer au titre de la protection de la collectivité puisque ce n’est
pas une maladie transmissible par contacts inter-humains. Ce devrait être l’affaire de
chacun. Les autorités ont l’impression de protéger la collectivité grâce à l’obligation de
vacciner, ça ne tient pas debout ! Elles pensent que les gens sont tellement bêtes que, si
la vaccination n’était plus obligatoire, ils oublieraient de se protéger. Or mon expérience
est différente. Je m’occupe de vaccination pour les voyageurs tropicaux.

Eh bien, la
couverture vaccinale croît régulièrement, alors même que ces vaccins ne sont ni
obligatoires ni remboursés. Contrairement à ce que craignent les autorités, les gens
veulent des vaccins. J’ai même parfois du mal à faire face à la demande.

 Selon vous, cette levée devrait-elle totale ou partielle ?

 Je pense qu’il faudrait maintenir la polio encore quelques années. Nous n’en souffrons
plus dans nos régions. Elle aurait pu être éliminée du Globe si des islamistes nigérians
n’avaient pas refusé la vaccination pour des raisons idéologiques. Mais le vaccin est
depuis longtemps en France ritualisé et considéré - à juste titre - comme tout à fait
anodin.

On peut par contre arrêter le vaccin anti-diphtérie, sous réserve qu’on accompagne cette
décision d’une bonne sensibilisation des responsables de la surveillance.

C’est plus une
maladie de la pauvreté qui pourrait disparaître avec de bonnes conditions d’hygiène et
de vie : le bacille circule aussi en France dans le quart monde et chez des migrants.

Quant à l’hépatite B, son vaccin est désormais blanchi dans la plus grande partie du
public français (il n’a jamais fait l’objet d’une quelconque suspicion dans le reste du
monde) ; l’obligation vaccinale chez les personnels de santé, mieux informés, est
parfaitement acceptée.

Alain Fisch, chef de service urgence médecine tropicale (Villeneuve-
Saint-Georges)
Alain Fisch est également directeur de l’unité de santé communautaire maladies
tropicales à l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne), Faculté de
médecine de Créteil.

Interviews tirées de l’ Enquête journalistique participative de Jean-Luc Martin-Lagardette réalisée avec les internautes d’Agoravox
Cette enquête indépendante est consultable dans son intégralité en pièce jointe.

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