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La provocation du MEDEF

Publie le jeudi 15 juin 2006 par Open-Publishing
2 commentaires

de Lénaïg Bredoux

Protection sociale . Laurence Parisot a proposé, hier, un report des cotisations de Sécurité sociale sur le salarié, moyennant une augmentation de salaire. Une « rupture historique », selon la CGT.

Si la présidente du MEDEF voulait de nouveau faire l’unité syndicale contre elle, elle ne pouvait pas mieux s’y prendre. Hier, lors de son point de presse mensuel, Laurence Parisot a proposé de décharger entièrement les patrons du paiement des cotisations sociales et de les reporter sur les salariés. Il s’agirait de « fusionner les cotisations de Sécurité sociale employeurs et salariés en faisant peser l’ensemble sur le salarié dont le salaire brut serait parallèlement relevé pour compenser le transfert ». L’objectif de la présidente du MEDEF, « mieux sensibiliser le salarié au coût de la protection sociale ».

« Coût du travail trop élevé »

Ces déclarations s’inscrivent dans le débat en cours sur le financement de la protection sociale, relancé en début d’année par Jacques Chirac. Le 5 janvier dernier, il avait en effet appelé de ses voeux une réforme des cotisations patronales, « chantier essentiel pour gagner la bataille de l’emploi » selon le chef de l’État, en raison d’un « coût du travail trop élevé » en France. Il plaidait alors pour une modification de l’assiette des cotisations : aujourd’hui uniquement basée sur les salaires, elle pourrait basculer sur l’ensemble de la valeur ajoutée. D’autres scénarios de réformes ont depuis été formulés, notamment celui de TVA sociale cher à l’ancien ministre des Finances Jean Arthuis.

Mais, l’hypothèse lancée hier par Laurence Parisot ne figurait dans aucun des projets évoqués jusque-là. Y compris dans la liste des propositions étudiées par un groupe interministériel chargé en février dernier par Dominique de Villepin de remettre un rapport au Conseil d’orientation pour l’emploi. « Ou Madame Parisot fait sciemment dans la provocation, a réagi, hier, Jean-Claude Mailly pour Force ouvrière. Ou on est en présence d’un problème de fond. » Ajoutant qu’il s’agirait alors « d’une ouverture à une privatisation de la protection sociale ».

Dans le camp

du gouvernement

Même son de cloche à la CGT, où Jean-Christophe Le Duigou a dénoncé une « rupture » avec la position « historique » du MEDEF, « à savoir la contribution naturelle des entreprises au financement de la protection sociale ». « Le but est clair, a poursuivi le secrétaire confédéral de la CGT, il s’agit de dégager l’entreprise de ses responsabilités en renvoyant le salarié à un arbitrage personnel entre ses revenus directs et ses choix personnels en terme d’assurance. »

Quant au président de la CFE-CGC, la proposition du MEDEF l’a laissé « pantois et dubitatif ». Bernard Craeyenest a ainsi déclaré que « le salarié s’investit dans son entreprise parfois au péril de sa vie ou de sa santé, il est logique que l’entreprise participe aux dépenses de santé et de retraite du salarié ». Enfin, la CFTC, par la voix de son secrétaire général adjoint, Jean-Louis Deroussen, a estimé que la piste lancée par Laurence Parisot « brouillait les cartes sans faire avancer le débat ».

La balle est désormais dans le camp du gouvernement et du président de la République, personnellement investi dans ce dossier. D’autant que selon des prévisions publiées jeudi, le déficit de la Sécurité sociale pourrait dépasser les 10 milliards d’euros cette année.

http://www.humanite.presse.fr/journal/2006-06-14/2006-06-14-831556

Messages

  • Madame MEDEF n’a pas pété les plombs, non, elle lance simplement un ballon d’essai pour voir les réactions des partenaires sociaux. Selon le résultat, si ça bouge pas trop fort et si les salariés ne descendent pas dans la rue, le gouvernement se hâtera de préparer un projet de loi qu’il tentera de faire voter comme d’habitude en plein mois d’aout.

    La fin de la sécurité sociale est dans les cartons de Sarkozy depuis longtemps. La mane des cotisation fait baver d’envie les assurance privées, c’est pour elles l’affaire du siècle.

    Ne laissons pas rêver le MEDEF, la protection sociale n’est pas négociable.

    Soyons prêts a agir à la hauteur de cet enjeu vital, c’est à dire violemment.

  • Faut pas rêver. Si Parisot dit que le coût du travail est trop élevé, c’est pour faire gagner de l’argent au patron. Donc, la soit disant augmentation de salaire compensatoire devrait être équivalente aux charges patronales pour que le salarié se paye directement ses cotisations sociales auprès d’une assurance privée. En fait, cette augmentation sera probablement inférieure pour que le patron dise que le coût du travail est moins élevé, maintenant qu’il est déchargé de cette ponction. Il faut que ça lui profite à lui, et lui seul. Parce qu’enfin, pourquoi les cotisations sociales auprès des assurances privées seraient-elles moins élevées que celles prélevées sur nos bulletins de salaire par le patron ?
    Il y a quelque chose qui m’échappe à ce niveau-là ! Et le MEDEF qui nous prend pour des crétins analphabètes !!!