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Lever le tabou des maladies professionnelles

Publie le mercredi 25 février 2009 par Open-Publishing
3 commentaires

Santé . « Risquer sa santé et sa vie au travail : une fatalité ? ». Syndicalistes, militants politiques et chercheurs ont « planché » sur ce thème lors d’un colloque à Vitrolles.

Marseille,
Correspondant régional.

D’une immense souffrance, faire oeuvre utile. Ou, comme le dit Michel Bianco lui-même : « Comment transformer un événement douloureux et personnel en action pour la collectivité ? » Le 2 août 2006, Jérôme Bianco, son fils aîné, a été victime d’un accident mortel du travail. Depuis, Michel n’a de cesse de faire reconnaître les responsabilités de ce drame (voir l’Humanité du 10 juin 2006) et mène un combat plus général pour lever « un tabou : le travail tue ». Vendredi et samedi, il a organisé à Vitrolles, avec la fédération du PCF des Bouches-du-Rhône, un colloque : « Risquer sa santé et sa vie au travail : une fatalité ? »

« Maladies éliminables »

Vendredi soir, le film de Jean-Michel Carré, J’ai (très) mal au travail, programmé par le cinéma vitrollais Les Variétés, a posé le décor : pour le dire vite, le retour massif du taylorisme dans le monde du travail (industrie comme services). En préambule, Michel Bianco a rappelé que, « selon les chiffres de l’OMS, il y a autant de morts au travail à travers le monde que de victimes de la pandémie du sida ».

Samedi matin, René Giorgetti, conseiller régional communiste, a présenté le SIC (système d’information concret) mis au point par le professeur italien Ivar Oddone. « La base de cet outil, c’est la récupération de la mémoire ouvrière », a souligné l’élu qui parle de « maladies éliminables » plutôt que de « maladies professionnelles ». En lien avec les médecins généralistes volontaires et les salariés eux-mêmes, le SIC permet de repérer les lieux du golfe de Fos et de l’ouest de l’étang de Berre qui ont généré de la maladie. Les premières conclusions de leur collecte d’informations dessinent des chiffres divergents de ceux de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM).

La proportion de cancers, surdités et affections respiratoires y est beaucoup plus importante que dans les statistiques officielles. « La Sécu ne reconnaît que 2 000 cancers professionnels par an alors que leur nombre est estimé à 23 000. Est-on capable de dresser la liste des lieux où ces 20 000 personnes ont contracté un cancer ? » a lancé Marc Andéol, cartographe du SIC. L’objectif final de cette démarche est de rendre publique, via Google Earth et Internet, la carte des lieux, des postes de travail qui tuent. Bref, une mappemonde brute sur le Web.

Coeur de métier

Gérard Filoche, inspecteur du travail et militant politique (PS), a abordé cette question de la santé au travail sous l’angle du Code du travail, « dont toute l’histoire est liée à la réduction du temps de travail », et de la recodification, engagée depuis six ans par la droite et le MEDEF, du droit du travail. Un exemple : la durée du travail n’est plus abordée sous l’angle de la santé mais du salaire. La perspective est foncièrement différente. Il faut donc travailler plus pour gagner plus. Au diable, la santé. Pourtant, comme l’a rappelé Gérard Filoche, « ce ne sont plus les coups de grisou qui tuent mais les AVC (accidents vasculaires et cardiaques - NDLR) ».

Dernier intervenant de ce passionnant colloque, Jean-François Naton, conseiller confédéral de la CGT sur les questions de travail, de santé et de protection sociale. Hypothèse : « Au moment des 35 heures, nous avons pu apparaître comme délaissant la question du bien-être au travail pour favoriser le bien-être en dehors du travail. » En réaction, il y a, selon lui, « ré-appropriation depuis plusieurs années par le mouvement syndical de son coeur de métier, c’est-à-dire le travail ».

Donc, aussi, de la question de la santé au travail. « Ce qui fait souffrance, c’est l’empêchement de la parole. L’enjeu c’est de reprendre le temps du vivre-ensemble sur le lieu de travail, a estimé le syndicaliste. Redonner du sens au travail, c’est dire non à des organisations de travail. Mais comment dire non tout seul ? On en revient donc au syndicalisme. »

Christophe Deroubaix
 http://www.humanite.fr/2009-02-24_P...

Messages

  • Et la reforme Bachelot qui flingue la secu , l’hôpital public , l’APHP , la médecine du travail , scolaire , silence, pas un mot dans ce papier ?

    Si certains veulent se refaire un virginité militante , qu’ils arrêtent les deal avec assurances santé mutualistes , les "partenaires" de la prevoyance méderic , la mondiale, and CO etc... , qu’ils rejoignent la bataille pour une secu à 100% , tout le reste, c’est du pipeau !

    Même la cnam dénonce ces évidences notamment pour les intérimaires , précaires etc.. les permanents enfonceurs de portes ouvertes, on connait !

  • Entièrement d’accord avec la réaction précédente : on semble, par la création de ce "SIC", ignorer et balayer tous les acquis existants de la protection sociale, auxquels ne peuvent et ne doivent se substituer des organismes mutualistes ou des structures parallèles, quelles qu’elles soient. Et il est quand même extraordinaire que le SIC, tel que présenté dans l’article, ignore superbement les médecins du travail, qui sont pourtant les premiers acteurs destinés à collecter les informations sur les risques professionnels et en dénoncer les atteintes à la santé. Que le PCF et la CGT se fassent complices de ce silence sur la médecine du travail me semble particulièrement grave, à l’heure où le patronat fait tout pour faire disparaître cette médecine préventive, indispensable pour les salariés. Quant à Gérard Filoche, malgré toutes ses qualités, il n’est pas le dernier à calomnier les médecins du travail, qui seraient, selon lui, pour beaucoup d’entre eux "vendus au patronat" !.. belle façon de défendre cet acquis !

    • mais les médecins du travail, qu’est-ce qu’ils ont obtenu jusqu’à maintenant, vu qu’il y a encore 23000 morts de cancer PROFESSIONEL (à en croire l’article), des morts qui n’ont AUCUNE RAISON D’ETRE, qui pourraient etre evités si seulement on savait où sont les risques ? La PREVENTION est dans l’entreprise, dans l’organisation du travail, avant que dans la médicine !
      La médicine du travail est oui un outil pour controler, pour sauvegarder la santé des travailleurs : mais est-ce que les médecins du travail communiquent avec nous, avec les ouvriers ? Et est-ce qu’ils communiquent entre eux ? Est-ce qu’il y a un réseau d’information pour qu’ils soient tous au courant de quoi meurent ou tombent malade les gens dans une entreprise ? Mon expérience c’est qu’ils se limitent à faire les analyses de routine, pour controler le sang, la vue... mais parfois nous on en sait plus que eux sur les situations dangereuses du boulot... et puis, si je tombe finalement malade, est-ce que c’est ma faute ou la faute à l’entreprise ? Et n’est-il pas trop tard quand il me trouvent une maladie professionnelle ?
      Tu parles de médicine de prévention : comme si c’était le médecin du travail qui doit faire gaffe à ce que l’ouvrier ne se chope pas quelquechose, comme s’il était inévitable que - par le travail - on risquait de se choper un cancer ! Ca ne doit pas etre normal ! Médicine de prévention ? PREVENTION tout court !
      Ce n’est pas d’une médecine de prévention qu’on a besoin, c’est avant tout d’une prévention plus haut - savoir quels sont les risques qu’on court quand on travaille. Pour que mon médecin sache à quels symptomes il doit faire attention quand il me visite, puisque je travaille où je travaille ou à la tache à laquelle je travaille... Et ca, c’est mon médecin généraliste qui doit etre au courant, car c’est lui qui me visite quand je suis malade... Peut-etre que la prochaine fois, en sachant que depuis des années beaucoup de ceux qui travaillent à mon entreprise se sont chopés un cancer au poumon, il va en tenir compte... et peut-etre que si ces informations étaient officielles, l’entreprise serait enfin obligée d’en tenir compte aussi ! au lieu de ne pas reconnaitre le manque de sécurité sur le lieu de travail et de laisser que l’état paye pour nos soins - mais surtout, laisser que nous on paye par notre santé leur incapacité (ou manque de volonté) de changer...