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Madrid s’acharne (info Pays Basque)
par lo beret liure
Publie le samedi 17 septembre 2011 par lo beret liure - Open-Publishing
Dix ans de prison. C’est la peine infligée par l’Audience nationale au dirigeant de la gauche abertzale Arnaldo Otegi et à Rafa Diez, ancien responsable du syndicat LAB pour “intégration” à ETA en qualité de dirigeant. Sonia Jacinto, Miren Zabaleta et Arkaitz Rodriguez ont été condamnés à huit ans pour le même délit. Txelui Moreno, Mañel Serra et Amaia ont été acquittés. Le tribunal espagnol affirme dans son délibéré qu’“ETA leur avait ordonné en 2008 de créer un organisme afin de mettre en place une stratégie d’accumulation de forces souverainistes dans le but de mener à bien un processus indépendantiste”. Les juges ont donc suivi les réquisitions du procureur dans cette affaire appelée “Bateragune.” A. Otegi, R. Diez, M. Zabaleta, S. Jacinto et A. Rodriguez furent arrêtés le 13 octobre 2009 et sont en prison depuis, sauf R. Diez, en liberté provisoire depuis avril 2010. Curieusement, la sentence qui a été officiellement communiquée aux accusés hier matin avait été annoncée dès avant-hier soir sur les ondes de la Cadena Ser. Une décision qui a provoqué de nombreuses réactions d’indignation, personne n’ignorant que ces dirigeants et militants de la gauche abertzale aujourd’hui condamnés ont été les artisans de l’ouverture d’un nouveau temps politique en Pays Basque Sud.
Réactions en cascade
Le secrétaire général d’EA et membre de Bildu, Pello Urizar, a déclaré que “cette sentence est une aberration qui cherche à déstabiliser le nouveau scénario politique basque. Cela confirme l’impulsion politique existant derrière ces décisions judiciaires”. Pour le PNV, “cela suppose un pas en arrière vers la normalisation en se basant sur la thèse que ‘tout est ETA dans le monde de la gauche abertzale’. Et dans ce procès, il y a une claire atteinte au droit de réunion”. Le lehendakari Patxi Lopez dit “respecter la sentence, tout en comprenant la surprise et même la frustration que cela peut générer au sein de certains secteurs de la société basque, dans la période que nous vivons”. Le PSE (Parti socialiste d’Euskadi) indique “avoir envisagé comme une grande partie de la société que la sentence puisse être différente, mais nous la respectons”.
Le député général du Gipuzkoa Martin Garitano (Bildu) a exprimé “son indignation et sa déception. C’est un coup porté à la paix et à la normalisation politique.” Aralar estime que “l’on se trouve face à une décision qui n’est pas viable d’un point de vie démocratique, on condamne des personnes qui défendent des voies exclusivement politiques. Cette sentence démontre la faiblesse de l’Etat”. Pour sa part, le gouvernement espagnol s’est refusé à commenter cette décision, se bornant à déclarer qu’“il respectait la décision du tribunal”.
Max Brisson (UMP), conseiller général, indique “avoir l’habitude de respecter les décisions judiciaires des pays démocratiques et ne pas faire d’ingérence, mais je ressens de l’incompréhension. J’ai du mal à comprendre le décalage entre les décisions judiciaires et les processus politiques qui se mettent en œuvre. Tout ce qui peut contrarier le processus de paix m’inquiète. Cette décision ne peut que raviver les tensions”. Frantxoa Maitia (PS), vice-président du Conseil régional et conseiller général ; nous a déclaré “déplorer cette sentence. Arnaldo Otegi, c’est le pari de la paix dans un conflit historique. Compte tenu de son aura dans le milieu nationaliste basque, il est un homme essentiel pour l’avènement d’une solution durable”.
Jean-Jacques Lasserre (MoDem), président du conseil des élus et conseiller général, affirme “ne pas vouloir qu’une telle condamnation altère le processus de paix. Il faut saisir toutes les mains tendues lorsqu’elles se présentent”. Autonomia Eraiki “dénonce fermement ces condamnations. Alors qu’Euskal Herria commence à ouvrir de nouvelles voies et que la majorité des citoyens de ce pays désire une solution politique à la sortie du conflit, les deux Etats ne répondent que par la répression [...]”.
Le message d’espoir d’Arnaldo Otegi
“Que personne n’abandonne le chemin pris, car nous allons gagner !” Cette phrase lancée par Arnaldo Otegi le dernier jour de son procès, et réitérée sur son compte Twitter après la proclamation de la sentence, a été reprise par la gauche abertzale hier, lors d’une conférence de presse. “Inacceptable, scandaleuse, cette condamnation a pour objectif de générer de la frustration en Euskal Herria, mais ils n’y arriveront pas. Ce sont la volonté et les efforts de nos camarades qui ont été condamnés aujourd’hui, ainsi que ceux des militants indépendantistes qui ont rendu possible la nouvelle situation politique en Euskal Herria. Et cette sentence est la réponse de Madrid. Madrid qui veut envoyer avec cette sentence un message à notre peuple : ‘Je ne vais pas changer d’attitude, je vais continuer avec la répression et la violation des droits’. Madrid doit savoir que sa stratégie est perdante dans notre pays”, a déclaré la gauche abertzale ajoutant qu’en Euskal Herria “s’ouvrait, et nous ouvrons l’ère de la démocratie et l’acceptation des droits nationaux, collectifs et individuels”. Des mobilisations convoquées par les syndicats basques devraient avoir lieu lundi à midi en Pays Basque Sud.
Béatrice MOLLE