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Mémoire courte : Quel est le Delors qui dit la vérité ?

Publie le mardi 3 mai 2005 par Open-Publishing

Jacques Delors, lors d’un colloque de l’Institut François Mitterrand (27 avril 2004), expliquait qu’il avait beaucoup de critique sur la Constitution. Aujourd’hui il explique que les tenants du NON mentent. Quel est le Delors qui dit la vérité ?

Jacques Delors : J’ai beaucoup de critiques contre ce texte.
La première, c’est la "clause de révision". Comment peut-on accepter ça alors que si, un jour, dans quinze ans, la Turquie adhère, quatre-vingt millions d’habitants, le système de décision n’irait pas du tout, déséquilibrerait le système.

Deuxièmement, on a ajouté dans ce texte, dit "Constitution", une troisième partie intitulée "les Politiques". C’est comme si, dans la Constitution française, chaque fois qu’on changeait de gouvernement, on changeait de constitution pour dire qu’on allait faire telle ou telle politique sociale. Une politique que vous appliquerez au jour le jour, ce n’est pas du ressort de la Constitution !
Troisièmement : l’Union économique et monétaire doit être rééquilibrée dans le Traité. C’est un point extrêmement important.

Et quatrièmement, sur la politique sociale : même avec les réserves que j’ai dites, on peut avoir un texte amélioré. Comme par hasard, les deux groupes de travail, là, qui n’ont pas fonctionné à la Convention, c’est celui sur l’Union économique et monétaire et celui sur le social. Mais sur ces quatre points-là, il faut revenir en arrière. Il faut revoir les textes.

Journaliste : Comment expliquez-vous qu’on en soit là, aujourd’hui ?

Jacques Delors : Nous en sommes là parce qu’il n’y a pas de vision de l’Europe chez la plupart des chefs de gouvernement. Deuxièmement en ce qui concerne la France et son Président, il y a beaucoup d’incompétence. Et ça, ça joue un rôle. On ne gouverne pas l’Europe comme ça. Il faut parfois peu pour corriger le tir. Tenez, si la France disait : "l’Union économique et monétaire telle qu’elle est ne nous va pas, nous ne siégerons pas s’il n’est pas possible d’obtenir le renforcement du pallier économique de l’Union économique et monétaire", nous l’obtiendrions. Il faut quand même voir que la légèreté est toujours regrettable. Rappelez-vous en 1997 : le président de la République a accepté le pacte de stabilité dont on lui avait expliqué qu’il était trop limité, et il a fait ajouter "et de croissance". Alors si vous voulez conduire les Français avec des mots et des songes, continuez comme cela. Si vous voulez les conduire avec des réalités, il faut absolument changer de comportement et ne pas se moquer des gens !
Parce qu’agir comme cela, c’est se moquer des citoyens et c’est donc donner un mauvais coup à la démocratie.

Journaliste : (....) pour le référendum, vous votez non ?

Jacques Delors : Comment ? Ah, je voterai oui ! Je voterai oui. Je ne veux pas que l’Europe s’arrête