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Ni OUI-OUI ni NON-NON mais NON-OUI

Publie le jeudi 5 mai 2005 par Open-Publishing

Le 5 mai 2005

Où l’on pourra s’apercevoir qu’il peut y avoir moyen de concilier les tenants du non et du oui.

Quelques remarques sur le débat actuel :

Voici que quelques exemples de ce qui fonde actuellement l’argumentaire du oui.

Chirac devant les jeunes et sur France 2 le 3 mai :

Si la France d’aventure ne la votait pas [la Constitution], la France, au moins pendant un certain temps, cesserait d’exister politiquement au sein de cette Europe (...) Un non entraînerait l’arrêt de la construction européenne
On ne peut pas dire « je suis Européen et je vote Non »
A propos de l’existence d’un plan B : Est-ce que vous croyez vraiment que c’est sérieux de dire ça ? Il n’y a pas l’ombre d’une chance, ce n’est pas envisageable, la renégociation cela n’existe pas (...) Il n’y a pas de Plan B naturellement

Notre président qui nous explique que naturellement il est inenvisageable de renégocier un traité qui n’a jamais été négocié encore avec les citoyens nous démontre que sa vision de la démocratie se limite à celle d’un peuple qui entérine les choix qu’on fait pour lui.

Dépêche AFP Le mythe du "plan B" en cas de "non" français à la Constitution du 03/05/2005

"Il n’y a pas de Constitution qui soit moins libérale !", s’exclame un des plus hauts responsables socialistes de l’UE.
"Si la Constitution n’est pas approuvée, l’Europe va s’arrêter", Emilio Gabaglio, ancien secrétaire général de la CES
"Tout le système s’effondrerait"
"Il n’y a pas de ’plan B’, ni de réunions secrètes"
"toute la construction européenne, même celle du marché unique, serait menacée d’effondrement"

N’est t’il venu à l’idée de personne qu’appeler à un vote oui/non puis dire ensuite que voter non est une connerie, amènerait des catastrophes, serait ingérable au niveau Européen est tout simplement un déni de démocratie puisque dans une vraie démocratie, la politique est sensée se plier à l’expression de la volonté populaire et non pas le contraire.

J’espère bien en tant que vrai défenseur de l’Europe qu’elle est encore capable de faire la preuve qu’elle est suffisamment démocratique pour gérer les conséquences d’un non. Si tel n’était pas le cas il s’agirait en tout état de cause de la preuve par l’absurde qu’il n’y avait rien à attendre de cette Europe là et représenterait alors une raison impérative de voter Non.

UNE EUROPE A QUI ON NE PEUT PAS DIRE NON DE TEMPS EN TEMPS SERAIT UNE PRISON !
UNE EUROPE A QUI ON NE PEUT DIRE QUE OUI TOUT LE TEMPS SERAIT UNE PRISON A VIE

Que reste-t-il de la conscience politique :

Le mensonge social de la constitution (12 pages) de Frédéric Lordon chercheur en économie appliquée au CNRS

Le peuple est un enfant, c’est bien connu. On ne le conduit qu’à la crainte ou à l’espoir. C’est pourquoi il faut tantôt lui promettre, tantôt lui faire peur. Les maîtres sont là pour connaître et faire reconnaître le vrai bien. À la baguette ils indiquent la voie et orientent les immatures. La baguette européenne est formelle : par ici-oui, mais pas par là-non (...) Si la promesse ne marche pas - celle des « droits sociaux », celle du rempart contre la mondialisation - il reste au moins l’objurgation, la culpabilité et in fine la peur. Ici s’arrête, pour les précepteurs de la masse, le domaine du débat analytique, puisqu’il n’est plus question d’argumenter mais de chapitrer.

Le moindre indien des hauts-plateaux bolivien en manque de tout a actuellement une conscience politique 10 fois plus développée que le consommateur Européen goinfré de tout.
Il faut se réveiller !

Avoir une conscience politique c’est savoir discerner les enjeux en présence, intégrer le fait que les intérêt de la classe politique ne sont pas les mêmes que ceux des citoyens, que l’intérêt d’un homme politique est son avenir en politique (court terme) alors que l’intérêt d’un citoyen est son avenir à lui et à ses enfants (long terme), que l’intérêt d’un homme politique est d’être le plus libre possible pour influer sur le cours des choses alors que l’intérêt d’un citoyen est d’être le plus fort possible pour contrôler ce que fait le politique.

Avoir une conscience politique c’est savoir que la désinformation, les manipulations et les mensonges font partie intégrante du débat et que de tous temps la peur à été l’arme préférée des puissants.

Avoir une conscience politique c’est savoir qu’il y a des lobbies, des intérêts économiques et financier, qu’il y a des ententes pour fausser le jeux démocratique et que le droit et la justice sont issues du contrôle et de la confrontation et certes pas de la confiance aveugle en les élites et du libre jeux du marché.

Avoir une conscience politique c’est discerner l’argument du slogan, c’est se rendre compte par exemple que « dire non à la constitution c’est dire non à l’Europe » est un slogan inventé par des communicants mais vide de sens et qu’on peut être 10 fois plus Européen en disant Non que la moyenne de ceux qui vont dire Oui, que « l’Europe c’est la paix » est un slogan inventé par les mêmes communicants et que ceux qui à travers leur Non prônent une Europe plus sociale sont 10 fois plus pour la paix que ceux qui veulent propulser les peuples les uns contre les autres dans un monde régit par une concurrence libre et non faussée.

Avoir une conscience politique c’est se rappeler la propension naturelle des tenants de la ligne officielle à rejeter les opposants vers un « négativisme stérile » (Non=non à l’Europe, Non=nostalgiques du passé) une « insconscience » (Non=connerie, Non=>honte de l’Europe, les autres pays nous regardent avec effroi et compassion) , voire « une pathologie sociale » en les taxant d’ennemis de la société paranoïaques et obsédés de la théorie du complot ce qui en d’autres temps ou en d’autres lieux a même pu mener et mène encore à la prison ou à l’asile.

Avoir une conscience politique c’est se souvenir des promesses non tenues (« Votez oui à Maastricht, et on se remettra au travail tout de suite sur l’Europe sociale » Jacques Delors en 1992) et se rappeler que les promesses en politique (chez François Hollande cela donne aujourd’hui « je prends l’engagement, si nous revenons au pouvoir en 2007, de promouvoir un traité social qui s’ajoutera aux dispositions actuelles » ) sont l’unique carburant de toute campagne électorale et que là plus qu’ailleurs encore elles n’engagent que ceux qui les reçoivent.

La conscience politique c’est aussi ce qui protège des extrêmes en faisant vivre le débat et en empêchant que les gens désabusés du mépris en lequel on les tient ne retournent la démocratie contre elle-même.

Avoir une conscience politique c’est surtout admettre qu’une vrai démocratie fonctionne avec de vrais contre-pouvoirs et qu’il est de la responsabilité des citoyens que de s’assurer qu’ils ne soient pas remis en cause, surtout lorsqu’ils sont appelés à se prononcer sur leurs institutions dans le cadre d’une constitution. Cela implique notamment de ne pas faire aveuglément confiance aux dires et actes des élites.

Que reste t’il de cette conscience et de tout les acquis des luttes politiques passée s’il suffit aux médias et aux politiques d’agiter la peur et le chaos pour voir des foules déboussolées basculer du Non au Oui en quelque instants.
C’est à faire peur !

Que devrait nous dire notre conscience politique

Elle devrait nous dire que l’unanimisme des élites quant à ce texte et la débauche de moyens mis œuvre pour le promouvoir et que l’on croyait réservés à d’autres temps ou d’autres lieux ( ils ne sont pas sans rappeler par exemple ceux mis en œuvre aux Etats-Unis pendant la guerre du Golfe ), sont une raison supplémentaire pour outrepasser le flot des slogans et aiguiser son esprit critique.
Ce texte a été élaboré par une convention composée d’un représentant de chaque gouvernement des 15 États membres de l’UE et des 13 pays qui souhaitaient alors adhérer à l’UE, de deux représentants des Parlements nationaux de chacun de ces pays, de 16 membres du Parlement européen, de deux membres de la Commission Européenne et dirigée par un Praesidium composé du président Valéry Giscard d’Estaing et des vice-présidents Giuliano Amato et Jean-Luc Dehaene à une époque (début 2002) où la casi totalité des gouvernements étaient des gouvernements conservateurs et où l’ultra libéralisme était triomphant. Bref :
Il n’y a aucune raison d’accorder une confiance aveugle à un tel texte, bien au contraire...
Une chose au moins est inadmissible

ll ne faut pas, dès lors qu’on s’y intéresse un tant soit peu, avoir une culture politique particulièrement développée pour se rendre compte qu’au delà de la couleur libérale très contestable de ce texte, il y a un point qui est inacceptable pour toute personne d’aplomb qui voudrait être à même d’exercer dans le futur les pouvoirs que la démocratie est sensée lui conférer :

Les politiques de l’union n’ont rien à faire dans une constitution

Avant de détailler il convient d’éliminer l’argument qui voudrait qu’en fait il ne s’agisse pas d’une constitution mais d’un traité et que ce qu’on nous appelle à voter n’est pas plus terrible que ce qui a pu être accepté dans le cadre d’autres traités (Maastricht en l’occurrence puisque Nice n’a pas été soumis à référendum)
Il s’agit d’une constitution parce que elle se définit comme tel (« traité établissant une constitution pour l’Europe ») parce qu’elle en a le role en organisant les institutions de l’Europe et parce qu’elle en a les attributs en primant sur le droit et les constitutions nationales (Art. I-6 : « La Constitution et le droit adopté par les institutions de l’Union, dans l’exercice des compétences qui sont attribuées à celle-ci, priment le droit des États membres. »).

Olivier Gohin, professeur à l’Université de Paris II : « Le nouveauTraité est une véritable Constitution dès lors qu’elle correspond à la définition matérielle de toute constitution : organisation des pouvoirs publics et garantie des libertés fondamentales,avec identification d’un pouvoir constituant (...) la nouvelle Union européenne réunit, dès à présent, les éléments nécessaires de la définition de l’État »

De plus elle est faite pour durer : Art. IV-446 : « Le présent traité est conclu pour une durée illimitée. » ce que confirme Giscard qui a lui même précisé que ce texte était conçu pour durer au minimum un demi-siècle (ça rassure !).
l’histoire du second amendement de la constitution Américaine

Il faut se rappeler l’histoire du second amendement de la constitution Américaine qui stipule que « le peuple à la liberté de détenir et de porter des armes ». Bien qu’occasionnant des milliers de morts par an et faisant des Etats-Unis le pays le plus violent de la planète avec la Colombie, il a été opposé avec succès à toutes les tentatives des différents gouvernements qui ont voulu s’attaquer au problème, par le simple fait qu’il était dans la constitution et que les intérêts bien compris des marchands d’armes (le lobby des armes est le 1er aux Etats-Unis) ont empêché toute évolution de celle-ci.

Les principes et les règles énoncés dans une constitution sont tout sauf anodins. Il faut être extrêmement vigilant sur ce quoi on s’engage

La partie III (les politiques) doit être sortie du texte

La partie III qui contient 322 des 448 articles du projet n’a pas été présentée lors du sommet de Salonique de juin 2003. Elle a été rajouté au dernier moment et n’a été discutée par la convention qu’en juin et juillet 2003 sans qu’il leur soit possible de la modifier.

Rappelons-nous ce qu’en pense Delors :
Interview de Jacques Delors sur LCI le 30 juillet 2004 :

Jacques Delors : J’ai beaucoup de critiques contre ce texte. (...) on a ajouté dans ce texte, dit "Constitution", une troisième partie intitulée "les Politiques". C’est comme si, dans la Constitution française, chaque fois qu’on changeait de gouvernement, on changeait de constitution pour dire qu’on allait faire telle ou telle politique sociale. Une politique que vous appliquerez au jour le jour, ce n’est pas du ressort de la Constitution ! (...) Il faut revoir les textes. (...)

Pourquoi ne nous dit-on rien quant au contenu de la partie III

Les hommes politiques et tous ceux qui nous informent sur cette constitution faite à leur mesure sont actuellement les tenants de ces politiques et les inscrire définitivement dans une constitution ne les choque pas outre mesure puisque d’une part ces politiques sont les leurs et les font vivre et que d’autre part ils sont persuadés qu’il ne peut y en avoir d’autre. Pourquoi donc affoler inutilement les gens sur ce qui n’est qu’un « point de détail de l’histoire ». Conclusion : black-out sur la partie III.

Et lorsqu’on les interroge voici ce qu’ils répondent :

Alain Lamassoure député Européen UMP déclarait en substance sur France Inter le 1er mai :
La constitution est un texte extrêmement facile à lire, seulement c’est comme pour conduire une voiture : il y a le mode d’emploi qui est accessible à tout le monde et qui correspond aux parties I et II et la revue technique qui n’intéresse que les mécaniciens. Je conseille à tous les Français de lire les parties I et II. La IIIème partie est le domaine des spécialistes.

On cache au citoyen le contenu de la partie III alors que c’est ce qui le concernera dans sa vie de tous les jours
Que dit cette partie III

Elle définit « les politiques de l’Union ».

Il serait bien entendu trop long de les prendre dans le détail mais tout le monde a bien compris qu’elles implémentaient la vision que se sont donnée les chefs-d’état réunis à Lisbonne en mars 2000 : « faire de l’Europe l’économie la plus compétitive du monde ».
Ce que le texte a traduit par « L’Union oeuvre pour une économie sociale de marché hautement compétitive », après que les socialiste ont fait rajouté « social » pour pouvoir vendre le texte à leurs électeurs sans que soit touché un iota des politiques concernées et sans que personne ne se soucie de savoir si la prise en compte de la dimension sociale n’obligeait pas à une redéfinition de ces politiques et d’en rabattre éventuellement sur le « hautement compétitif » ou le principe de « concurrence libre et non faussée ».

Voici les domaines auxquels s’appliquent ces politiques de manière exclusive ou partagée :
l’union douanière, l’établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur, la politique monétaire pour les États membres dont la monnaie est l’euro, la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique commune de la pêche, la politique commerciale commune, le marché intérieur ; la politique sociale, la cohésion économique, sociale et territoriale, l’agriculture et la pêche, l’environnement, la protection des consommateurs, les transports, les réseaux transeuropéens, l’énergie, l’espace de liberté, de sécurité et de justice, les enjeux communs de sécurité en matière de santé publique.

Autant dire presque tout...

Un exemple de politique : l’harmonisation

Contrairement à ce que beaucoup croient, il est des domaines où l’Europe se fait un devoir de défendre les prérogatives des états en interdisant toute harmonisation entre eux. Pour plus d’infos sur ces histoires d’harmonisation voir ici.
L’objectif déjà énoncé par ailleurs est bien sur de permettre au sein de l’Europe le développement d’une concurrence libre et non faussée.
La phrase magique est « à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres de l’Union. » Elle se trouve à la fin de toute une série d’articles par exemple :
Le TCE exclut une harmonisation européenne dans le domaine de l’emploi
et n’autorise que des encouragements à la coopération entre Etats en ce domaine :
Article III-207 : La loi ou loi-cadre européenne peut établir des actions d’encouragement destinées à favoriser la coopération entre les Etats membres et à soutenir leur coopération dans le domaine de l’emploi par des initiatives visant à développer les échanges d’informations et de meilleures pratiques (...) La loi ou loi-cadre européenne ne comporte pas d’harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres.

Le TCE interdit à l’Union de statuer en matière de fiscalité directe ; en matière d’impôts indirects
elle ne peut statuer que pour éviter les distorsions de concurrence et seulement à l’unanimité.

Article III-171 : Une loi ou loi-cadre européenne du Conseil établit les mesures concernant l’harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires, aux droits d’accises et autres impôts indirects, pour autant que cette harmonisation soit nécessaire pour assurer l’établissement ou le fonctionnement du marché intérieur et éviter les distorsions de concurrence. Le Conseil statue à l’unanimité, après consultation du Parlement européen et du Comité économique et social.

Le TCE exclut toute harmonisation en matière pénale :
Article III-272 de la section 4 ‘Coopération judiciaire en matière pénale’ : ‘La loi ou loi-cadre européenne peut établir des mesures pour encourager et appuyer l’action des Etats membres dans le domaine de la prévention du crime, à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres’.

Le TCE exclut toute harmonisation en matière sociale :

Les articles sont cités ici in-extenso tellement la portée en est importante :

Article III-209 L’Union et les États membres, conscients des droits sociaux fondamentaux, tels que ceux énoncés dans la Charte sociale européenne signée à Turin le 18 octobre 1961 et dans la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989, ont pour objectifs la promotion de l’emploi, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate, le dialogue social, le développement des ressources humaines permettant un niveau d’emploi élevé et durable, et la lutte contre les exclusions.
À cette fin, l’Union et les États membres agissent en tenant compte de la diversité des pratiques nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union.
Ils estiment qu’une telle évolution résultera tant du fonctionnement du marché intérieur, qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux, que des procédures prévues par la Constitution et du rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres.
Traduction : pas d’harmonisation sociale (on en reste aux pratiques nationales) d’autant que celà pourrait nuire à la compétitivité, sauf si elle se fait toute seule (via le fonctionnement du marché)
L’article III-210 1. En vue de réaliser les objectifs visés à l’article III-209, l’Union soutient et complète l’action des États membres dans les domaines suivants :
a) l’amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs ;
b) les conditions de travail ;
c) la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;
d) la protection des travailleurs en cas de résiliation du contrat de travail ;
e) l’information et la consultation des travailleurs ;
f) la représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs et des employeurs, y compris la cogestion, sous réserve du paragraphe 6 ;
g) les conditions d’emploi des ressortissants des pays tiers se trouvant en séjour régulier sur le territoire de l’Union ;
h) l’intégration des personnes exclues du marché du travail, sans préjudice de l’article III-283 ;
i) l’égalité entre femmes et hommes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail ;
j) la lutte contre l’exclusion sociale ;
k) la modernisation des systèmes de protection sociale, sans préjudice du point c).

2. Aux fins du paragraphe 1 :
a) la loi ou loi-cadre européenne peut établir des mesures destinées à encourager la coopération entre États membres par des initiatives visant à améliorer les connaissances, à développer les échanges d’informations et de meilleures pratiques, à promouvoir des approches novatrices et à évaluer les expériences, à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres ;
Traduction : L’Europe peut soutenir des mesures à caractère social mais elle s’interdit d’établir des mesures qui permettaient d’harmoniser au niveau législatif ou réglementaire ce qui relève du social

Remarque : Dans d’autres domaines, l’harmonisation est obligatoire. Les voici : l’union douanière, l’établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur, la politique monétaire pour les Etats membres dont la monnaie est l’euro, la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique de la pêche, la politique commerciale commune. (Article I-13)

En interdisant toute harmonisation dans des domaines clef (emploi, finance, pénal, impôts, social) et en obligeant à l’harmonisation dans les domaines qui touchent au marché, l’Europe caresse le vieux rêve libéral de la suppression des carcans étatique et juridiques qui faussent le grand jeux de la libre concurrence.

Quelles politiques seront impossibles dans l’avenir

On voit bien que notre société de consommation bien que contestée à la marge reçoit l’assentiment d’une majorité de citoyens Européen voire même de la casi unanimité de ceux qui nous ont rejoint dernièrement et qui rêvent depuis tant d’années de mordre à leur tour dans le gâteau.
Le message subliminal sous-jacent à la manière dont cette constitution a été conçue et avec laquelle elle nous est vendue c’est :
nous mettons tout en place pour l’amélioration de votre capacité à consommer. Faites nous confiance et laissez-nous nous occuper du reste.
D’où cette inimaginable sortie de Simone Veil, membre du conseil constitutionnel (en suspens puisque contre toute déontologie elle s’est mise en congé pour faire campagne au lieu de démissionner purement et simplement) :

Simone veil : Le recours au référendum, je n’y suis pas favorable d’une manière générale, c’est très difficile dès que le sujet est compliqué. Dès que c’est un peu compliqué, on ne répond pas à la question posée. Je le regrette car même si le oui l’emporte, le risque était énorme.
Mais si dans l’avenir les citoyens veulent réinvestir le champ politique, réfléchir aux termes du contrat, se dire qu’il y a peut être plus à perdre qu’à gagner dans ce deal « consomme et tais-toi » et exprimer l’envie d’aller vers un autre choix de société : IL SERA TROP TARD. Des intérêts contraires sauront faire valoir le droit que NOUS AURONS NOUS-MËME MIS EN PLACE.

Voici par exemple des politiques qui sont incompatibles avec la constitution :

· Une politique qui rend prioritaires les problèmes écologiques
· Une politique coordonnée de diminution du temps de travail
· Une politique d’augmentation des biens publics.
· Une politique de développement des services publics.
· La mise en place de droits égaux pour tous les travailleurs Européens.
· Un salaire minimum européen.
· La mise en place d’un droit à un travail et à un logement.
· Une politique de désarmement (et oui !)
· Une refonte de la politique agricole dans le sens d’une agriculture raisonnée,

... et des milliers d’autres dont nous n’avons même pas encore idée

Peut importe que la partie III soit trop libérale au sens des Français, pas assez au sens des anglais etc... : Elle n’a rien a faire dans une constitution.

Si la partie III reste dans la constitution, toute politique autre que celle proposée et longuement détaillée dans cette partie III sera impossible, les élections futures (présidentielles, législatives, Européenne) ne pourront plus se faire sur de vrais choix politiques.
Tout autre choix de société sera exclu dans l’avenir.
Il faudrait être complètement inconscient pour accepter ça !

Et si les partisans du Oui et du Non étaient en fait d’accord

La partie I hérite des tares des traités actuels notamment le rôle disproportionné de la commission qui ne dispose d’aucune légitimité démocratique. Elle fournie par ailleurs une partie des avancées mises en avant par les partisans du Oui, comme le fait que l’Europe ait une personnalité juridique et soit représentée par un président nommé pour 2 ans et demi ou l’amélioration des processus de décision. Les partisans du Non relèvent à juste titre qu’il vaut mieux un mauvais système et l’espoir de l’améliorer qu’un système un peu amélioré sans espoir de l’améliorer, la constitution verrouillant toutemodification ultérieure. Mais le seul point sérieux d’achoppement est la présence de la partie III dans le texte.

90% des critiques du non s’adressent aux politiques présentes dans la partie III.
Les partisans du Oui défendent-ils cette partie III

Parmi les 10 articles dans la Constitution européenne pour dire Oui mis en avant par Raffarin , dans les spots télévisés diffusés lors de la campagne qui avait « pour vocation de répondre aux exigences démocratiques d’information des citoyens » (SIC !), dans l’argumentaire du oui socialiste, dans les interventions de Chirac, toujours et partout, on nous rabat les oreilles des améliorations institutionnelles de la partie I (les institutions) et des droits mis en avant dans la partie II (La charte des droits fondamentaux) mais nulle part n’est cité un article de la partie III (essayez de chercher c’est édifiant !).

Evidemment pour un certain nombre on peut suspecter qu’ils ont quelques intérêts à la présence de cette partie III dans la constitution et que c’est précisemment au nom de ces intérêts qu’ils se gardent bien d’en faire la publicité. Toujours est-il que :

Aucun partisan du Oui ne défend la partie III.

Les partisans du Non sont-ils contre la partie I

Le déficit démocratique lié à la toute puissance de la commission (nommée) et à l’impuissance du parlement (élue) est un débat qui n’est pas nouveau, qui est issu des milieux europhiles convaincus et que la constitution ne fait que reproduire et qui peut se résumer comme suit (trouvé ici) :

Chacun reconnaît le déficit démocratique actuel de la construction européenne. Le Parlement représente bien les citoyens, mais sur une base très inégalitaire selon leur nationalité. Il n’a aucun pouvoir sur les recettes de l’Union, et ne vote que les grandes lignes des dépenses du budget européen. Il n’a aucune initiative législative, c’est-à-dire ne peut proposer de loi, mais vote les lois européennes (directives) dans certains domaines seulement. Il ratifie la nomination de l’ensemble de la Commission européenne et peut la renverser, sans que la Commission soit responsable politiquement devant le Parlement ou le peuple européen.

Le Conseil des chefs de gouvernement et le Conseil des ministres issus de ces gouvernements définissent les orientations politiques et approuvent, ou non, les projets de loi (directives) proposés par la Commission ; ils définissent le budget (recettes et dépenses).

La Commission européenne est nommée par les gouvernements (un commissaire par Etat) et ratifiée par le Parlement. Elle seule propose les lois européennes. Elle met en oeuvre l’ensemble des décisions prises, exécute le budget de l’Union, jouant donc le rôle d’un exécutif technocratique.

La Cour de justice européenne fait respecter les traités européens ainsi que les lois européennes.

Enfin la Banque centrale européenne définit la politique monétaire de l’Union et notamment le taux d’intérêt des emprunts. Les membres de son directoire sont nommés par les gouvernements, ne sont pas révocables et n’ont de compte à rendre à personne.

L’Union européenne actuelle est donc essentiellement une coopération entre gouvernements. Les pouvoirs sont organisés de telle sorte que personne n’apparaît clairement comme responsable de la politique menée, contrairement au niveau national, où le ministre, le premier ministre, le président de la république ou la majorité parlementaire apparaissent comme pleinement responsables des décisions qu’ils prennent, ce qui est un élément essentiel du contrôle démocratique et donc du caractère démocratique de notre système politique.

Ce constat est partagée par tous de même que les améliorations du texte concernant la personnalité juridique de l’union, son incarnation en un président élu 2 ans et démi et l’amélioration des prise de décision sont reconnus par tous. Les partisans du oui von mettre en avant les améliorations, les partisans du nom le déficit démocratique mais :

La critique de la partie I est partagée par beaucoup et n’est en aucun cas la raison du non

Les partisans du Non sont-ils contre la partie II

Bien sur que non. Qui pourrait être contre des principes tels que
Article II 97 : Un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable

Ce que mettent en évidence les partisans du non c’est que les principes politiques et économiques embarqués dans la partie III s’opposent voire sont parfois contradictoires avec les principes et les droits énoncés dans les partie I et II et que les rédacteurs de la constitution, conscients de ces ambigüités ont sciemment organisés la non opposition juridique des droits énoncés aux autres articles de la constitution :
Article II-112.2 : Les droits reconnus par la présente Charte qui font l’objet de dispositions dans d’autres parties de la Constitution s’exercent dans des conditions et limites y définies..

Ce qui leur permet de présenter cette partie II comme un leurre juridique
Une analyse plus détaillée ici.

Les partisans du Non ne contestent pas la partie II mais sa portée juridique
D’où on conclut que pour mettre d’accord les partisans du oui et du non
Il suffit donc de supprimer la partie III pour redonner quelque consistance aux droits énoncés dans la partie II et abondamment vantés par les partisans du oui tout en coupant l’herbe sous le pied des partisans du non : que demande le peuple ?

Il y a un seul petit problème, c’est que pour l’instant le texte qu’on nous propose comporte 3 parties.

Les conséquences du Non

Le Monde et Libération étant tout à leur travail d’orientation de l’information pour promouvoir le Oui, il ne reste que le Figaro pour sauver la morale journalistique et ne pas masquer volontairement des informations pouvant aller dans le sens du Non. Les 2 articles qui suivent n’ont pas été repris ailleurs et ont été depuis supprimés du site du Figaro. Toute la classe politique cherche depuis à déminer le sujet en se répandant dans les médias sur l’inexistence d’un plan B :
On nous prend clairement pour des imbéciles !.
Comme s’il semblait inconcevable qu’un NON démocratiquement exprimé puisse déboucher sur un débat politique alors qu’il suffit de lire ceux qui ont encore le courage ou la maladresse de s’exprimer pour se rendre compte qu’heureusement il n’en est rien (pour l’instant) :
Franco FRATTINI commissaire Européen en charge de la Justice, de la Sécurité et des Libertés dans le Figaro du 27 Avril

(...)L’Europe ne pourra pas aller plus avant sans la France (...) A mon avis, on va devoir rouvrir le débat public européen. Si la France, pays fondateur, vote non, cela démontrera qu’il y a un déficit de légitimité populaire en Europe. Il faudra alors engager le débat bien plus largement, notamment avec les Parlements nationaux. (...)Si un pays comme la France dit non, on ne va pas le faire voter une seconde fois. C’est impossible. Donc il faudra se poser et se demander : quelle Europe voulons-nous ? Juste un marché unique ? Un espace commun de sécurité et de défense ? Ou autre chose encore... Pour y parvenir, veut-on d’un instrument de niveau constitutionnel ou pas ? Une fois ouvert, ce débat pourrait amener certains pays à créer des coopérations renforcées, hors traité, sur la défense ou la sécurité par exemple.

Bruxelles : de notre correspondante Alexandrine Bouilhet (dans le Figaro du 28 avril 2005)

Certes, le « plan B » au non français n’existe pas sur le papier, pas encore. Mais dans les esprits, il est déjà abouti. Il vient s’ajouter au plan secret concocté par Paris et Berlin en cas de non britannique. Plus récente, la version destinée au possible non français est le fruit d’un travail d’experts mené entre Bruxelles et les capitales depuis dix jours. Il s’appuie sur les compétences des juristes, des diplomates et des chercheurs des « think tanks » bruxellois. Première étape : après le 29 mai, les ratifications continuent (...) Deuxième étape : le Conseil européen fait le bilan politique (...) Troisième étape : le traité est dépecé. Il entre en vigueur par morceaux. Suivant le nombre de non enregistrés en fin de course, la Constitution est soit enterrée, soit renégociée en partie. Dans les deux cas, une nouvelle négociation politique s’engage. Mais sur des bases entièrement nouvelles. Si le rejet n’est pas trop massif, il est possible d’établir un « traité bis », allégé de la partie III, par exemple, concentré uniquement sur les institutions. Si plusieurs grands pays votent non, la France, la Pologne et la Grande-Bretagne, par exemple, le traité est mort politiquement mais il peut être ressuscité en partie. Il suffira de sélectionner ses innovations les plus consensuelles et de les introduire par accord intergouvernemental ou interinstitutionnel (Conseil, Commission, Parlement), ou encore par un petit traité d’une page ratifié par les parlement.

Le député européen socialiste Henri Weber trouvé sur l‘agenda de campagne de la Sofres :

Il existe bien un ’plan B’, contrairement à ce qu’on nous répète benoîtement". "Il y a même un plan C et D", l’une des solutions envisagées est "un traité ’allégé’, c’est-à-dire amputé de la troisième partie et recentré sur les deux premières concernant les institutions, les valeurs et les droits. D’autres pensent que, sans avoir à revoter, l’on pourrait améliorer la situation actuelle en intégrant plusieurs réformes institutionnelles qui font consensus"
Le non progresse au Danemark, en Grèce, en Pologne. Les citoyens Français en votant en 1er on une responsabilité.
Le Non de la France ne mènera pas au chaos mais à une renégociation ou seront abordés le problème de la perte de légitimité des institutions européennes et de la présence de la partie III (les politiques) qui est contestée y compris par de nombreux partisans du Oui (ex Delors).

C’est exactement ce que souhaitent les partisans d’un Non lucide !

Une victoire du non serait une victoire de la Politique, la vrai qui est faite de la confrontation des pouvoirs et des contre-pouvoirs et la France, loin d’être la honte et la risée de l’Europe, pourrait s’enorgueillir d’avoir remis la politique au centre du débat Européen.

Une victoire du Oui serait une victoire de cette nouvelle manière de gouverner qui voit la démocratie n’avoir d’autre rôle ni d’autre choix que de cautionner le travail d’experts tout intimement convaincus qu’ils puissent être d’oeuvrer pour le bien du peuple.

Conclusion : Ni OUI-OUI, ni NON-NON mais NON-OUI

Il ne faut voter ni OUI-OUI ni NON-NON mais NON-OUI, NON au texte actuel et la présence de la partie III, OUI à un texte sans la partie III et qui intègrerait les réformes institutionnelles qui font consensus

Remarque : la combinaison OUI/NON est une combinaison impossible.

Pour me contacter : emmanuel.collod@ENLEVERlaposte.net