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« Sarkozy, la grande manipulation »

Publie le vendredi 13 juin 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

« L’imposture majeure : c’est le Sarkozy social. Le plus gros mensonge, c’est le traité de Lisbonne. La plus grande complicité médiatique, ce sont les chiffres de la récidive ». Olivier Bonnet, journaliste et blogueur sur Plume de presse, décrypte les trucages du président de la République, avant et après son élection. Il vient de publier « Sarkozy, la grande manipulation » aux éditions les Points sur les i.

Vous venez de faire paraitre Sarkozy, la grande manipulation, une recension très impressionnante des mensonges et des impostures du président de la République. C’est quoi pour vous le plus gros mensonge de Nicolas Sarkozy ?

Olivier Bonnet. Pour moi, le plus gros mensonge est au sujet du traité de Lisbonne puisque le Président l’a constamment présenté comme un mini-traité et un traité simplifié. Or ce traité n’a rien de mini puisqu’il fait à lui seul 267 pages et environ trois mille avec les annexes. A titre de comparaison, la Constitution française fait trente pages. Il n’a donc rien de mini. Et au lieu d’avoir été simplifié, il a été au contraire complexifié à l’extrême puisqu’il est parfaitement illisible pour le citoyen lambda, puis il opère sans cesse des rappels à d’autres textes. Autre mensonge : pour justifier la ratification parlementaire, le président a prétendu qu’il n’avait gardé dans le soit disant mini traité que les dispositions qui faisaient consensus. C’était un consensus imaginaire, puisqu’il est impossible de savoir les motifs pour lesquels les gens avaient rejeté le traité constitutionnel européen en 2005 par référendum. Le traité de Lisbonne reprend 95% des dispositions du TCE qui a été rejeté. Les plus grands responsables européens l’ont tous reconnu. Donc, c’est un tour de passe-passe qu’il a réussi là pour passer en force et imposer finalement le traité de Lisbonne au peuple qui manifestement le rejetait.

Sa plus grosse imposture ?

Sa plus grosse imposture, c’est pendant la campagne électorale, quand il a fait référence à Jean Jaurès. Je parle du discours qui s’est déroulé le 13 avril 2007, lors du meeting de Toulouse. Il avait cité Jean Jaurès une dizaine de fois au moins et il avait prétendu revendiquer l’héritage du droit du travail, de la sécurité sociale, de l’assurance chômage et des congés payés. En passant en revue ces différents points, on se rend compte que toute sa politique consiste au contraire à mettre à bas et asséner des grands coups de pioche à tous ces éléments-là. L’héritage du droit du travail : on sait qu’il n’a de cesse d’accorder au Medef toutes les souplesses qu’il désire pour que les salariés aient moins de protection. Les congés payés : sa doctrine, c’est travailler plus pour gagner plus. Il veut à toute force que les gens augmentent leur durée de temps de travail. La sécurité sociale, il introduit les franchises médicales qui sont le doigt de l’engrenage de la fin de l’assurance maladie solidaire. L’assurance chômage : alors qu’aujourd’hui il n’y a que 47,5% des chômeurs qui sont indemnisés, c’est encore trop. On va radier les chômeurs qui refusent des offres valables d’emplois. On va supprimer la dispense de recherche d’activité pour les seniors. L’imposture majeure : c’est le Sarkozy social. Qu’il ait osé se présenter comme quelqu’un de social, alors que sa politique a consisté à faire œuvre antisociale, c’est quand même la plus formidable des impostures.

Vous attaquez beaucoup la presse et les médias pour leur complicité, leur impuissance ou leur silence. C’est quoi à votre avis la plus grande complicité de la presse ?

En réalité, Nicolas Sarkozy s’est construit, à la suite de son passage au ministère de l’Intérieur, un personnage de « cow-boy » qui se fait fort de restaurer l’ordre et la sécurité. On sait que ses deux grand thèmes, ses deux points forts, sont la sécurité et l’immigration. Or il a un bilan absolument calamiteux en tant que ministre de l’Intérieur. Je fais allusion à l’augmentation de la criminalité qui a été constatée notamment par son préfet de la Seine Saint Denis. Il l’a toujours nié mais les chiffres ne sont pas bons du tout. Et puis bien sûr il y a eu les émeutes de 2005, avec l’état d’urgence, le couvre feu et 45.000 voitures brulées. C’est donc une imposture de se présenter comme l’homme qui se fait fort de rétablir l’ordre. Mais il y a un aspect précis, qu’il a invoqué lors de plusieurs émissions télévisées pour justifier de sa politique judiciaire répressive. Il a dit plusieurs fois « je souhaite qu’on crée des peines planchers pour les multirécidivistes parce que 50% des délits, c’est 5% des délinquants ». Quand on prend cette affirmation telle quelle, on se dit qu’effectivement il faut lutter contre les multirécidivistes, on va faire baisser la criminalité de moitié, si ce sont toujours les mêmes qui commettent ces délits... Or ce chiffre est grossièrement faux. Il faut faire appel aux statistiques de résolution des affaires. Et dans 68% des cas on ne sait pas qui a commis le crime. Presque sept fois sur dix, on ignore l’identité de l’auteur du crime. Dire que la moitié des crimes sont commis par les mêmes, c’est impossible à dire, puisqu’on ne le sait pas. Ce qui est grave c’est que ça, il l’a dit devant Arlette Chabot, dans l’émission A vous de Juger, à deux reprises. Il a également affirmé ça au journal de 20 heures devant le duo François Bachi, Patrick Poivre d’Arvor...

Qu’est-ce qui se passe du coté des journalistes, ils ne font pas leur boulot ou ils sont connivents ?

Je ne sais pourquoi ils s’abstiennent de le contredire. Soit ils ne font pas leur travail, parce qu’ils auraient pu se renseigner. Cette question des vrais chiffres de la récidive a été expliquée par le magistrat Serge Portelli. Les journalistes doivent le savoir. Soit ils sont tétanisés et ils n’osent pas contredire le président de la République qui passe pour être rancunier, et avoir beaucoup de poids dans les médias. Soit c’est de la connivence, ce qui est également condamnable. Il a pu se permettre régulièrement de répandre des contrevérités. Le travail des journalistes c’est d’arbitrer pour faire un rappel des faits. D’après moi, il est élu sur un malentendu. Si l’on avait démonté toutes les erreurs, les incohérences, et les mensonges de son discours, on n’en serait pas là.

Vous reprochez à juste titre à la presse de ne pas avoir exercé de droit de suite sur les conditions d’achat par Sarkozy de son appartement de l’île de la Jatte et en particulier sur le soupçon de favoritisme ?

Je me suis fait la réflexion que dans n’importe quelle démocratie normale – on peut penser aux Etats-Unis ou aux pays scandinaves – un candidat à la présidentielle qui serait l’objet d’aussi lourds soupçons puisqu’on parle quand même de corruption passive n’aurait pas pu maintenir sa candidature. En réalité il n’a jamais nié avoir acheté son appartement au promoteur avec lequel il était en affaire en tant que maire de Neuilly. D’une façon assez peu convaincante puisqu’il n’a jamais fourni les preuves de ce qu’il avançait, il a essayé de nier tout un tas d’autre chose, qu’il n’y avait pas eu de rabais, qu’on ne lui avait pas fait payer une partie des travaux. Mais il n’a jamais nié que M. Sarkozy, en tant que particulier, avait acheté un appartement au promoteur à qui M. Sarkozy, en tant que maire de Neuilly, a vendu un terrain sur l’ile de la Jatte. Rien que ça c’est interdit par la loi.

C’est vrai que le droit de suite ne s’exerce pas seulement pendant la campagne électorale mais aussi après, or ces questions sur le patrimoine n’ont plus été posées.
Quand Laurent Le Mesle (ndlr, procureur général) a définitivement clos cette enquête, en disant qu’il n’y a pas de faits répréhensibles, on n’a pas beaucoup questionné cette décision. On n’en a pas beaucoup entendu parler. Ca a été étouffé, en tous cas enterré. Puisque l’enquête est close. C’est parfaitement incroyable.

Le web reste un lieu d’expression, de liberté, qui agace beaucoup la présidence. On a vu récemment un texte de Frank Louvrier conseiller en communication de Nicolas Sarkozy. Vous êtes inquiet pour la liberté d’expression sur le web ?

Il faut rester vigilant. Il y a une tentation d’essayer de museler l’expression citoyenne, puisque sur internet aujourd’hui n’importe qui peut ouvrir un blog, compulser différentes sources, citer des faits donner son opinion, sans qu’il n’ait besoin pour ça d’un organe ou de posséder une carte de presse. Une forme de censure serait d’imposer le statut de journaliste pour avoir le droit de donner de l’information en ligne. Ca ne concernerait pas en l’occurrence puisque je suis journaliste. Mais c’est extrêmement inquiétant puisque le web, c’est la prise de parole citoyenne de tout un chacun et c’est extrêmement précieux ça. Mais ça ne se fera pas sans mal. Il y aura une très, très lourde résistance. Je pense qu’il ne faut sous-estimer les capacités de résistance d’internet et toutes les possibilités que ça offre pour contourner les tentatives de censures. »

Réalisé par KARL LASKE
 http://contrejournal.blogs.liberati...

Messages

  • Ce soir Fillon a fait savoir que Sarkozy voulait s’emparer du "dossier de la presse" à cause de la grève menée par la CGT qui bloque la parution des journaux. C’est dire qu’au travers du droit de grève, c’est la liberté d’expression qui est dans le colimateur de l’Elysée. Sans doute que ses copains intimes de 30 ans sont allés pleurnicher dans ses bras. En tout cas, il y a de quoi s’interroger sérieusement sur sa possible intervention, et à quel titre d’ailleurs ?

  • a propos d’internet,je reside en Australie et depuis quelques jours je n’ai pas acces a certains sites dont le reseau voltaire et indymedia paris par exemple.
    Quelqu’un peut il me faire savoir ce qu’il se passe ?S’agit d’un blocage a la source ou d’un filtrage en cours afin que ces sites ne soient pas accessibles ?
    L’Australie c’est aussi le pays de Ruppert Murdoch.......
    Merci si vous avez des infos