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Trente ans après, les "folles de Mai" mènent l’enquête

Publie le jeudi 6 avril 2006 par Open-Publishing
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Venues en France pour les cérémonies marquant le trentième anniversaire du coup d’Etat de 1976 en Argentine, les Grands-Mères de la place de Mai ont eu la surprise d’être saisies d’un nouveau cas de disparition d’enfant sous la dictature militaire. A Paris, une personne est venue leur soumettre des informations inédites. La présidente de l’association, Estela Carlotto, 75 ans, et la vice-présidente, Rosa Roisinblit, 86 ans, mènent l’enquête pour retrouver des enfants nés en captivité, lorsque leurs mères ont été torturées, puis assassinées.

Les deux femmes ont formé, dès 1977, une organisation distincte de celle des Mères de la place de Mai, qui ont défié la junte de Buenos Aires avec leur ronde devant le palais présidentiel. "Les folles de la place de Mai", disait-on à l’époque.
Sur les 240 cas enregistrés par les Grands-Mères, 82 enfants ont été identifiés et retrouvés. Depuis 1992, le secrétariat d’Etat argentin aux droits de l’homme a reçu 120 autres plaintes de proches, qui se sont adressés directement aux autorités.

"Nous estimons qu’il y a eu environ 500 bébés volés par les tortionnaires à leurs familles", précise Mme Carlotto. Grâce à leur action, les généraux Videla, Bignone, Suarez Mason et l’amiral Massera - les principaux responsables de la junte - ont été détenus, bien avant l’abrogation, en 2005, des lois d’amnistie. Le caractère systématique du vol des bébés de disparus est un fait reconnu par la justice.

"Désormais, ce sont souvent les petits-fils des plaignants qui nous cherchent spontanément, pour clarifier les doutes quant à leur identité", explique Mme Roisinblit. En Argentine, une exposition itinérante consacrée aux disparus place un miroir entre les portraits des deux parents, pour faciliter la comparaison avec les traits des visiteurs.

Une banque de données génétiques fonctionne à l’hôpital municipal de Buenos Aires depuis 1984. Les Grands-Mères de la place de Mai ont aussi formé un groupe de soutien psychologique. Autant d’initiatives justifiant une subvention de l’Union européenne qui n’a pas été renouvelée.

L’ONG dispose d’une cinquantaine de permanents dans sept villes d’Argentine. La responsable de Cordoba a été agressée physiquement à la mi-mars. "Sous la dictature, l’intimidation se limitait aux menaces téléphoniques, rappelle Mme Carlotto. J’attribue l’agression à une mafia résiduelle d’ex-militaires et possédants." - Paulo A. Paranagua

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