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Une nécessaire clarification - IO

Publie le mercredi 10 août 2005 par Open-Publishing

Une nécessaire clarification

Après l’annonce, fin juillet, de la mise en vente de ses autoroutes, l’Etat annonce cette fois une réduction immédiate de desserte pour trois lignes de trains Corail de l’ouest de la France (1), ainsi qu’un projet de désengagement pour vingt-cinq autres lignes... Des milliers de voyageurs seraient ainsi laissés à quai, pour la seule raison que ces lignes de trains de voyageurs seraient « déficitaires ».

Protestations immédiates contre ce nouveau désengagement de l’Etat. Riposte de Philippe Duron, président PS du conseil régional de Basse-Normandie. Prenant le contre-pied de la formule utilisée par le directeur adjoint de la SNCF : « Service public ne rime pas avec déficit », il lui rétorque par la formule républicaine : « Service public rime avec République. »

Le président PS des Pays de la Loire, Jacques Auxiette, regrette, quant à lui, l’utilisation du « vocabulaire de Mme Thatcher en pleine dérégulation ferroviaire dans les années 1980 ».

C’est exact. Mais, au même moment, Jean-Jacques Queyranne, lui aussi président PS de région (Rhône-Alpes), annonce qu’il est prêt à accepter « une véritable décentralisation des trains régionaux, transférant responsabilités et moyens dans le même cadre institutionnel que les TER », en s’inspirant de ce qu’a « fait le gouvernement dans les années 1999-2002 »...

Comment comprendre ? Ou bien le « désengagement de l’Etat » menace les services publics, la République et la démocratie, et on le combat ; ou bien on se situe dans le cadre de la régionalisation, qui démantèle le service public, en se limitant à en négocier les conditions, ce que propose avec le gouvernement le président PS de la région Rhône-Alpes, Jean-Jacques Queyranne. N’est-il pas nécessaire qu’il y ait clarification ? On touche là au fond des problèmes, à la politique de Bruxelles. Si, comme le dit Philippe Duron, « service public rime avec République » - ce qui est le cas -, alors comment ne pas le mettre en relation avec la politique dictée par Bruxelles et qui vient d’être désavouée par le peuple français ?

Que la SNCF se dégage jour après jour de tout devoir en matière de service public, n’est-ce pas l’application stricte des directives de Bruxelles, qui, en opérant la séparation de la SNCF en deux entreprises, Réseau ferré de France, d’une part, et SNCF, d’autre part, a permis d’utiliser RFF pour ponctionner la SNCF, sous le gouvernement Jospin notamment ? N’est-ce pas le pacte de stabilité et le traité de Maastricht qui, interdisant à l’Etat toute aide à l’entreprise publique qu’est la SNCF, contraignent celle-ci à se « dégager » du service public de transport, donc à fermer les lignes ?

Faut-il le taire, deux mois après que le peuple de ce pays a clairement et nettement exprimé, le 29 mai, son rejet de cette politique, tout entière soumise aux impératifs de la spéculation financière, qui détruit l’école, les hôpitaux, les transports ? Existe-t-il un autre moyen de poser la question de l’unité qui devrait se réaliser sur cette base entre tous les partis qui se réclament tout simplement de la démocratie et qui, par là même, doivent condamner Bruxelles et ses directives ?

Pour reprendre les termes d’un maire d’une commune de la Loire, qui prépare la convention nationale pour la défense des services publics et des 36 000 communes : « Si une Constitution était élaborée dans le cadre d’une Assemblée constituante, ce serait une situation tout à fait nouvelle et conforme d’ailleurs à ce que signifie le vote du 29 mai : le peuple est majeur et veut être maître de son destin. Pourquoi ne pas élaborer dans le même mouvement des cahiers de revendications ? Comment concrètement tout cela se mettrait en place ? Encore une fois, les organisations, les partis, en toute indépendance réciproque, auraient à se disposer par rapport à ce processus. C’est leur affaire. Mais nous, les maires, nous aurions aussi toute notre place dans une telle éventualité, riches potentialités si diverses que je ne peux guère les prévoir toutes. C’est le peuple qui décidera. »

C’est le cadre de la « Convention nationale pour la défense des services publics et des 36 000 communes, pour la reconquête de la démocratie politique et la rupture avec l’Union européenne » (2), qui se tiendra le 16 octobre prochain, à laquelle tous ceux qui sont attachés à la démocratie sont invités à participer.

Marc Gauquelin

(1) Réduction immédiate de desserte pour les lignes Quimper-Nantes-Bordeaux-Toulouse, Nantes-Lyon et Caen-Le Mans-Tours.
(2) Une première brochure de préparation de la convention du 16 octobre paraîtra fin août.