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au delà du principe faustien de l’économie moderne
Publie le jeudi 24 avril 2008 par Open-Publishing3 commentaires
En lisant des articles sur bellaciao analysant le capitalisme et ses conséquences, l’idée m’est venue de publier ici le résumé d’un texte assez original, publié en 1985, sur le principe faustien de l’économie moderne.
L’auteur est Hans Christoph Binswanger, professeur d’économie nationale de l’université de Saint-Gall en Suisse, qui s’y livre à une critique de l’économie moderne sur la base de la seconde partie du Faust de Goethe. Le texte en allemand est accessible sous http://www.subventionsberater.de/gi...).
Dans son article, Binswanger montre comment Faust, dans la seconde partie de l’oeuvre, est présenté comme l’"homme des temps nouveaux" dont la quête de l’absolu se situe dans le domaine technologique.
L’oeuvre goethien est construite sur deux prémisses : le pari entre Dieu et le Diable dont l’enjeu est l’âme de Faust, suivi du pari entre le Diable et Faust quant à la possibilité de jouir perpetuellement d’une satisfaction maximale que le Diable est censé lui procurer.
Dans un premier temps, Méphistophélès tente de lui procurer cette possibilité moyennant l’amour de Marguerite. Face à l’échec, Méphisto change de plan.
Ce plan, c’est le sujet de la seconde partie, ou le Diable entend procurer à Faust la satisfaction de tous ces désirs moyennant le succès économique.
Suivant le plan de Méphisto, Faust se présente à l’empereur en tant que conseiller financier. Il montre à l’empereur la possibilité de se débarasser de ses dettes en utilisant une presse à billets.
Un jour, alors qu’il se reprend d’une nouvelle déception amoureuse sur une montagne, Faust découvre un littoral. Ce littoral lui inspire une vision qui le fait découvrir l’idée de l’Economie. Il veut transformer ce littoral à sa guise, en domestiquant les forces de la nature.
Cette double découverte est le moment-clef dans l’oeuvre où Faust prend conscience qu’il peut lui-même élaborer un plan et maîtriser la nature. La suite montre comment il le met en oeuvre.
Faust a une nouvelle occasion d’apporter son aide à l’empereur, en anéantissant avec l’aide de Méphisto, une révolte des féodaux. Réconnaissant son mérite, l’empereur offre à Faust le littoral.
Faust peut maintant lancer son projet de colonisateur, mais il rencontre la resistance passive de Philémon et Baucis qui refusent de quitter leur maison sur les dunes. Outrepassant ses ordres, ses ouvriers les tuent et détruisent leur habitation.
Juste avant l’achèvement de l’oeuvre, Faust devient aveugle, mais la seule vision de la réussite de son projet lui arrache l’aveu que tous ses désirs sont accomplis. Méphisto est parvenu à ses fins et a gagné le pari. Faust meurt.
Dans le plan faustien, Binswanger souligne 3 éléments qui seraient également à la base de l’économie moderne :
– la création d’argent écrit (expérimenté d’abord par la Banque d’Angleterre en 1696, nouveauté médiatisée par John Law qui en 1717, propose ce système pour venir en aide à l’état français, très endetté sous le règne du prince d’Orléans)
– l’application du nouveau droit de propriété (dominium et non plus patrimonium, suite au code Napoléon, art. 544)
– l’emploi de l’énergie mécanique (ex. invention du moteur à combustion, James Watt)
Selon Binswanger, Goethe devéloppe, dans l’oeuvre de Faust, une vision prophétique de l’économie moderne et de ses conséquences : l’entrepreneurship axé sur l’augmentation des valeurs marchandes (Faust), le refoulement des méthodes économiques traditionnelles (Philémon et Baucis), le progrès économique accompagné de la lutte des classes, la libération des individus et des ressources naturelles, le risque d’une catastrophe écologique (les éléments méphistotéliques).
Si la technologie domine aujourd’hui la vision prophétique (la télévision) et permet de rationnaliser le travail et virtualiser l’argent, la quête faustienne de la jouissance perpetuelle d’une satisfaction maximale des désirs dévoile un fantasme chers aux adolescents. Le moment ne serait-il pas venu pour une politique des désirs afin de passer outre un modèle économique devenu inapproprié ?
angela anaconda
Messages
1. au delà du principe faustien de l’économie moderne, 24 avril 2008, 16:38, par onizuka
je trouve le parallèle intéressant Angela, mais je n’ai pas très bien compris ce que sont "les éléments méphistotéliques"...je comprend parfaitement ce que tu entends avec l’économie traditionnelle incarnée par Philémon et Baucis, et "l’entrepreneurship axé sur l’augmentation des valeurs marchandes (Faust)", mais je ne vois pas la coréllation entre Méphisto et progrès éco suivi de cata écologiques, lutte des classes, etc...
un éclairage serait le bienvenue !!
1. au delà du principe faustien de l’économie moderne, 25 avril 2008, 09:26, par angela anaconda
d’après ce que j’ai compris, les éléments méphistotéliques, ce sont les éléments et les forces naturels de la terre et de l’homme ; la figure de Méphistophélès en symboliserait la puissance invisible et inconsciente.
angela anaconda
2. au delà du principe faustien de l’économie moderne, 25 avril 2008, 10:05, par onizuka
ok merci...bon ben je suis moins convaincu par les éléments méphisto. que par le reste lol