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Grève : Les facs grondent

Publie le mardi 19 octobre 2010 par Open-Publishing

de Nicolas Moscovici

Bien plus discrets que les lycéens ces derniers jours, les étudiants semblent pourtant bien décidés à prendre leur place dans le mouvement de contestation contre la réforme des retraites. Mardi, jour d’action nationale, une vingtaine d’universités ont voté la grève (voire le blocage) et d’autres pourraient rapidement suivre.

Tout au long de la journée, la liste n’a cessé de s’allonger. Partiellement ou totalement, plusieurs universités du pays sont aujourd’hui bloquées, alors que la grève contre la réforme des retraites a été votée dans une vingtaine d’établissements, sur les 83 que compte le pays. Bordeaux-3, Paris-8, Pau et Rennes-2, entièrement bloquées, ont lancé le mouvement, tandis que Lyon-2 - ville dans laquelle les affrontements entre les jeunes et la police ont été particulièrement violents ce mardi - a été fermée administrativement. Après avoir laissé aux lycéens le haut du pavé depuis plusieurs jours, les étudiants semblent entrer à leur tour dans la danse, bien décidés à apporter leur écot à la lutte contre le projet défendu au Parlement par Eric Woerth.

"Ça y’est, le mouvement dans les facs est réellement parti", se réjouit Thierry Leroy-Mignot, chef de file de l’Unef (Union nationale des étudiants de France) à l’université de Caen, où la grève a été votée dès lundi et partiellement bloquée ce mardi. Expliquant la mobilisation des étudiants plus tardive que celle de lycéens par… "une rentrée plus tardive à la fac", le jeune responsable syndical, interrogé par leJDD.fr, se veut confiant quant à la naissance d’un mouvement durable : "Il y a une ligne unitaire entre étudiants et salariés", décrypte Thierry Leroy-Mignot : "A la limite, je dirais qu’il est plus facile de mobiliser les étudiants maintenant parce que le message est clair. Lors de la grève contre la réforme des universités (en 2009), les revendications étaient plus globales", ajoute-t-il, témoignant "d’un ras-le-bol général et d’un contexte social très tendu à l’université".
Un mouvement parti pour durer ?

Une analyse qui se situe à l’exact opposé de celle avancée par l’UNI (Union nationale inter-universitaire), qui soutient la réforme gouvernementale. Egalement contacté par leJDD.fr, Olivier Vial, le leader du syndicat universitaire "de droite" retient, lui, "des revendications très générales qui n’ont rien à voir avec la vie étudiante et qui sont alimentées par l’extrême gauche". Preuve, selon lui, d’une mobilisation artificielle, "les étudiants n’ont pas emboîté le pas aux lycéens la semaine dernière. Ils le font aujourd’hui parce qu’ils sont entrainés par les lycéens qui sont eux-mêmes instrumentalisés par une extrême gauche ultra-violente". Résultat : "On va assister à un mouvement en deux phases : une première qui va aller dans le sens de la mobilisation, attirant à elle des étudiants curieux de voir ce qui se passe, puis une rapide phase de décrue due à la radicalité et à la violence de ce mouvement."

Cette violence - qui a effectivement été constatée lors de plusieurs rassemblements de jeunes depuis jeudi dernier - l’Unef l’attribue d’abord au gouvernement. "Le gouvernement, qui a perdu la bataille de la conviction concernant sa reforme, semble désormais avoir fait le choix du désordre pour marquer des points dans l’opinion", affirme le syndicat étudiant sans un communiqué. "L’Unef appelle les jeunes à être plus malins que le pouvoir et à poursuivre leur mobilisation de manière unie et pacifique. La réponse des jeunes à l’autoritarisme gouvernemental, c’est une nouvelle démonstration de force. Notre force, c’est notre nombre et notre détermination", poursuit le texte.

Sur le fond, et même si à l’UNI, on relaie la parole gouvernementale en parlant d’une réforme faite "pour les jeunes", les arguments des étudiants opposés au projet de loi rejoignent ceux des lycéens. A commencer par la crainte d’une amplification du chômage des jeunes dû au report de l’âge de la retraite pour leurs aînés : "En plus d’user les travailleurs jusqu’à la corde, c’est un million d’emplois qui ne seront pas libérés à cause de cette réforme", s’indigne Thierry Leroy-Mignot, bien décidé à ce que la mobilisation vienne à bout du projet de loi, même après son vote au Parlement. "Bien sûr que c’est possible, on l’a bien vu avec le CPE, assène-t-il. Il n’y a donc pas de raison qu’on ne fasse pas encore reculer le gouvernement sur la réforme des retraites."

http://www.lejdd.fr/Societe/Social/Actualite/Greve-Les-facs-grondent-228068/