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Le printemps kurde est inévitable malgré tout !

par Maxime Azadi

Publie le samedi 11 août 2012 par Maxime Azadi - Open-Publishing
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Le mont Goman est situé à 1 km de Semdinli, dans la région de Hakkari. Il est sous contrôle de la guérilla kurde depuis 23 juillet, malgré les bombardements intensifs par l’aviation, l’artillerie et des hélicoptères. « Si un bombardements d’une telle intensité avait visé un pays du Moyen-Orient, il serait déjà tombé » témoigne un journaliste kurde.

L’opinion publique turque et internationale n’est pas informée de ce qui se passe réellement au Kurdistan, en raison de la censure et d’une campagne de désinformation mondiale, ce qui rend difficile à trouver un terrain d’entente pour une solution durable et conduit les spécialistes et géopoliticiens à faire des analyses moins rationnelles sur la région à partir de fausses informations et des accusations véhiculées par des régimes répressifs.

En réalité, une guerre intense se déroule dans la région de Hakkari, voisine de l’Irak et l’Iran, plus précisément voisine du Kurdistan du Sud et Kurdistan Oriental, si les frontières sont ignorées.

Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a annoncé avoir changé de tactique, suite à la répression sauvage incessante contre toutes les revendications du peuple kurde et face au refus du gouvernement turc de négocier avec le mouvement pour une solution pacifique et politique. Le mouvement a lancé le 23 juillet ses opérations « révolutionnaires » pour une autonomie démocratique au Kurdistan du Nord, soit sud-est de la Turquie.

L’armée abandonne ses barrages routiers et postes de garde

L’armée turque a du abandonner le 9 aout tous ses barrages routiers sur la route de Semdinli-Yuksekova, dans la région de Hakkari. Deux jours plus tard, le 11 août, l’armée s’est retirée également de toutes les postes de garde et des positions entre Hakkari et Cukurca, ce qui confirme la prise de contrôle de la région par le PKK.

L’armée n’arrive toujours à pénétrer par voie terrestre dans les zones sous contrôle du PKK à Semdinli depuis 23 juillet. L’envoie de renforts ne s’effectue qu’avec des hélicoptères. Le mouvement kurde affirme en outre avoir pris le contrôle de plusieurs zones à Cukurca, toujours dans la région de Hakkari, depuis 4 aout. Les attaques de la guérilla kurde s’intensifient également dans la région de Sirnak.

L’offensive de Semdinli n’est qu’un début !

« Opération révolutionnaire de la guérilla à Semdinli n’est qu’un début », affirmé à l’agence de presse kurde Firat un dirigeant du PKK, Duran Kalkan, soulignant qu’il s’agit d’un avertissement. « Les guérilleros kurdes ont pris le contrôle de nombreuses zones et ont encerclé plusieurs postes militaires » a-t-il ajouté, affirmant que le but de ces opérations est d’imposer l’autonomie démocratique comme une solution.

« Nous avons voulu que le problème soit résolu par la voie du dialogue, sans affrontement. Mais dix-mille personnes ont été enfermées sous l’accusation de ‘terrorisme’. Nos avertissements ne sont pas pris en considération » par les autorités qui faisaient croire que la force du PKK est épuisée, a-t-il dit.

Le gouvernement Erdogan perd toute crédibilité

L’organisation fait face à la deuxième armée de l’Otan depuis 30 ans. Le gouvernement actuel comme ses prédécesseurs prône toujours l’écrasement le mouvement armé et réprime toute revendication du peuple kurde sous prétexte de lutter contre le « terrorisme ». Face au peuple kurde insoumis, Ankara préfère accuser le régime Assad d’armer les kurdes, alors que l’armement de l’Armée libre syrienne et des paramilitaires par le gouvernement turc n’est plus un secret. Le 8 aout, un député du parti de l’opposition CHP (kemaliste) a même affirmé que des armes sont transportées dans des ambulances pour des insurges syriens depuis Hatay.

Le gouvernement turc a perdu toute sa crédibilité et légitimité aux yeux des kurdes, même si les pays occidentaux comptent toujours sur ce régime dépassé comme celui d’Assad en Syrie. Basé sur une race unique, langue unique et drapeau unique, l’État turc nage toujours dans ses rêves néo-ottomans.

Semdinli sous une pluie de bombes

Au-delà des accusations du régime turc qui prouve que rien n’est changé au niveau des mentalités depuis la création de la République, la situation montre une autre réalité sur le front, même si cachée par les autorités et les médias nationaux et internationaux. Sous une pluie de bombes, la guérilla kurde n’abandonne pas ses positions à Semdinli et à Cukurca. Selon des sources locales et kurdes, des dizaines de soldats ont été tués dans des combats et des embuscades. Mais le vrai bilan de cet affrontement est toujours un tabou en Turquie.

Alors que les yeux du monde entier sont rivés sur la Syrie, l’armée turque bombarde intensivement les zones sous contrôle du PKK à l’intérieur de la frontière et le nord d’Irak. A 1km de la ville de Semdinli, le mont Goman est sous les bombardements de l’aviation et de l’artillerie, mais aussi par des hélicoptères.

« Je parie que si un bombardements d’une telle intensité avait visé un pays du Moyen-Orient, il serait déjà tombé. Le nombre de bombes larguées sur Goman n’est pas moins que celles larguées sur la Libye, mais ce mont est toujours sous contrôle de la guérilla » dit un journaliste un journaliste.

La préfecture de Hakkari a annoncé le 6 aout avoir interdit l’accès des civiles dans sept zones pendant deux mois, ce qui renforce les inquiétudes des villageois au sujet d’une éventuelle utilisation des armes chimique par l’armée contre la guérilla. Ce n’est pas une nouvelle pratique pour l’armée turque. Près de 500 combattants du PKK ont été tués par des armées chimiques dans plus de quarante opérations menées entre 1994 et 2012, selon les organisations de défense des droits de l’humain. En outre, environs 3248 corps humains se trouvent actuellement dans 253 fosses communes dans la région kurde, selon l’IHD, une association des droits de l’homme.

Une confédération syrienne ?

La Turquie ne peut plus s’échapper des changements et les kurdes sont déterminés à prendre leur véritable place au Moyen-Orient, après une longue préparation sur l’autonomie dans le cadre d’un projet de confédéralisme démocratique et écologique moyen-orientale, élaboré par le mouvement kurde.

Le Moyen-Orient est en phase de recomposition, les frontières artificielles créées depuis la Première Guerre Mondiale sur la négation du peuple kurde et des minorités historiques de la région ne tiennent plus.

Le Kurdistan irakien est déjà une région autonome, tandis que les kurdes syriens ont pris le contrôle de leur région à partir du 19 juillet pour construire l’avenir, soit une autonomie démocratique. Des conseils du peuple avaient déjà été créés dans toutes les villes kurdes, mais aussi à Alep où vivent quelque 600 mille kurdes, après la révolte lancée mi-mars 2011. Le processus de l’autonomie est accéléré : les nomes des villes arabisées depuis 40 ans ont été changés, des écoles kurdes ont été multipliées, les enseignants travaillent déjà sur un système éducatif kurde, les Unités de défense populaires (YPG), des forces armées composées de femmes et hommes, ont été créés et les partis kurdes ont unis leurs forces sous la bannière du Conseil suprême kurde. Le principal parti kurde syrien PYD propose une confédération démocratique syrienne reconnaissant les droits du peuple kurde en tant que nation dans la future constitution et l’autonomie de la région kurde.

Autonomie kurde en Turquie

Parallèlement, les kurdes de Turquie accélèrent aussi le processus de l’autonomie démocratique, déclarée 14 juillet 2011 par le Congrès pour une Société Démocratique (DTK), une plateforme d’associations et mouvements kurdes dont le principal parti BDP. Malgré une répression féroce quotidienne qui a transformé le pays en une prison a ciel ouvert, le parti légal kurde et le PKK, mouvement armée et populaire, s’imposent plus que jamais.

La revendication minimale du peuple kurde est aujourd’hui une autonomie démocratique dans les trois autres parties du Kurdistan, soit en Iran, en Turquie et en Syrie. Le dernier offensif du PKK s’inscrit également dans ce cadre, tandis que le parti légal BPD espère multiplier par deux le résultat obtenu en 2009, lors des élections municipales prévues en 2010, malgré l’emprisonnement de 35 maires kurdes sur 98 et de milliers de membre actifs dont six députés.
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