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La Société du Hold-Up

par Himalove

Publie le lundi 29 octobre 2012 par Himalove - Open-Publishing

« Derrière chaque grande fortune, il y a un grand crime. » Honoré de Balzac

Dans un essai original, "La société du hold-up", Paul Vacca, amateur de Polar adapté à l’écran, établit un rapport historique entre l’attaque de diligence et l’impérialisme américain.

L’exercice est périlleux.

Hormis l’appât du gain, il y a peu de chose commune entre Jessie James, Bonny Parker, Clyde Barrow, Dillinger, dont les noms viennent comme des étoiles filantes mourir dans les journaux, et les financiers qui organisent, aujourd’hui, à plein temps, expropriations, guerres et famines.

Dans la vie réelle, tout oppose les deux figures, bankster (1) et « casseur » : l’origine sociale, l’éducation, les protections et la durée de l’entreprise.

Le bankster, protégé par l’OTAN, en Irak ou en Afghanistan, par exemple, joue avec la peau et l’avenir de populations entières ; le voyou, lui, un instant, avec la sienne comme un soldat animé d’un même mot d’ordre : « enrichis-toi ! ». Mais le point d’accord s’arrête là...

Rares sont les financiers, les généraux et les pro-consuls qui finissent au pénitencier, et jamais un ancien saute-comptoir ne devient président directeur général d’une société militaire privée ou d’une compagnie d’assurance à sa libération.

Et pour cause. Le braqueur de banque s’il survit aux aléas de son métier (la mort, la trahison et la prison) est déchu de ses droits civiques.

Il appartient au camp des parias ; et a conscience comme le voleur de Georges Darien de « faire un sale métier »...

Tout au plus, peut-il devenir un transfuge comme un José Giovani ou un Roger Knobelspiess scénariste et acteur de cinéma au service d’un metteur-en-scène...

Les deux mondes, celui du grand Capital et celui des voyous se frôlent, se côtoient dans la nuit canaille et sur les plateaux de cinéma ; mais le jour, le monde de la Finance a grandi sur le cadavre d’Al Capone lequel appartient définitivement au musée Grévin du 7ème art.


« Avec les hold-up financiers, l’on assiste à une inversion totale de polarité. En l’espèce, ce n’est plus un citoyen qui braque une banque, mais la banque qui braque l’ensemble des citoyens.

Et, alors que le hold-up traditionnel était illégal, et pouvait être à certains égards - et c’est ainsi que le présente le cinéma - légitime, le hold-up des financiers en est la parfaite image inversée. Totalement légal - puisque ce sont les acteurs du système financier qui édictent leurs propres règles sous le regard approbateur de l’Etat - mais illégitime, car les seuls à en payer le prix sont les citoyens. Si le braqueur à l’ancienne était hors la loi, les braqueurs de la finance sont confortablement installés au-dessus des lois. Cyniques et iniques, favorisant leur caste, les banques se comportent en Robin des Bois à rebours : elles volent les pauvres pour donner aux riches. » (2)

Le banquier selon P.V. n’est pas seulement « un loup pour l’homme » mais un braqueur pour son client : "an inside job"...

L’auteur s’amuse en révélant un détail que peu de chroniqueurs soulignent ni aucun magistrat de cour d’assises ne remarque : les braquages commis par les

amateurs sont autant d’occasions pour le banquier ou le bijoutier d’escroquer la compagnie d’assurance ; j’ajouterais qu’ils sont également une aubaine pour les policiers...

Le dernier ennemi public n°1 virtuel, Toni Muselin, accuse, par exemple, l’ex-n°2 de la police judiciaire de Lyon, Michel Neyret, d’avoir soustrait du butin 2,5 millions d’euros !

La chose a de fortes chances d’être vrai.

Car le succès des politiques répressives à Lyon et Marseille a abouti à un étonnant résultat : ce sont désormais les agents de la force publique, les indics et les parrains.

Pourquoi condamne-t-on davantage le braqueur que le bankster ou le policier véreux ?

Pourquoi les délits économiques ne sont-ils pas considérés comme des crimes contre l’Humanité ?

Qui a donné cette étrange honorabilité aux salauds ?

Le vol astucieux a besoin des braves gens pour s’établir légalement dans la durée...

Lisez Paul Vacca et vous aurez envie de cogner très fort sur votre banquier.

HIMALOVE

http://www.fayard.fr/livre/fayard-460294-La-Societe-du-hold-up-hachette.html


1. Bankster : néologisme américain formé à partir des mots bank et gangster.

2. "La Société du hold-up", Paul Vacca, pages 63-64.