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Crise de la CGT ou crise du syndicalisme ?

par critique-sociale.info

Publie le jeudi 29 janvier 2015 par critique-sociale.info - Open-Publishing
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Le secrétaire général de la CGT Thierry Lepaon vient de démissionner moins de deux ans après son élection. Il était devenu ces dernières semaines une caricature de bureaucrate à la suite de faits scandaleux : des frais exorbitants de rénovation d’un logement de fonction et de son bureau (pour lequel le limogeage du trésorier n’aura pas suffi à faire fusible), et une incroyable indemnité de départ de son poste précédent à la CGT Basse-Normandie qui a stupéfié le militant de base, ces faits ayant très probablement été révélés par une « fuite » au sein même de la bureaucratie confédérale. Cet épisode est plus largement révélateur d’une dérive et d’une crise, non seulement dans la CGT mais dans l’ensemble du syndicalisme. Certaines structures « syndicales » apparaissent plutôt comme des petits appareils qui ne savent plus trop quel positionnement adopter afin de continuer à justifier leur existence.

Comme l’a écrit Karl Marx : « Les syndicats agissent utilement comme centres de résistance aux empiètements du capital. Ils échouent en partie quand ils font un usage peu judicieux de leur puissance. Ils échouent entièrement quand ils se livrent à une simple guérilla contre les effets du système actuel, au lieu d’essayer dans le même temps de le changer, au lieu de se faire un levier de toutes leurs forces organisées, pour l’émancipation finale de la classe ouvrière, c’est-à-dire pour abolir enfin le salariat.  »[1]

Le syndicat peut être un outil pour les travailleurs directement sur le lieu de travail, pour empêcher l’arbitraire patronal, pour être au service des luttes collectivement menées. Il n’y a aujourd’hui pas assez de tels syndicats de base, notamment dans les entreprises de taille moyenne. À l’inverse, il y a trop d’appareils confédéraux, trop de structures différentes : CGT, FSU, FO, Solidaires, CNT, la liste est longue – et encore, nous ne mentionnons pas les structures les plus ouvertement compromises…

Cette division profite à quelques permanents, par la multiplication des appareils. Mais la division profite surtout au patronat, qui a face à lui plusieurs petites structures fragmentées au lieu de sections syndicales fortes, et peut faire signer des accords minoritaires. Cela nuit donc aux travailleurs, qui se retrouvent parfois perdus au milieu de logos différents qui recouvrent des divergences souvent peu claires.

Il serait donc utile d’avancer vers plus d’unité, sur des bases claires :
 L’indépendance de classe vis-à-vis de l’État, du patronat et des partis [2] ;
 La défense de tous les travailleurs par la lutte de classe ;
 L’auto-organisation des mobilisations, avec des Assemblées Générales démocratiques et souveraines ;
 Le respect permanent de la démocratie interne, permettant aux divergences syndicales de s’exprimer (y compris à l’extérieur de l’organisation) ;
 Un fonctionnement transparent, avec un véritable contrôle des adhérents sur ce qui est fait de leurs cotisations, et la rotation des tâches.

Ces principes simples sont malheureusement trop rarement appliqués dans les syndicats actuels. Raison de plus pour défendre ces principes ! Le mode de production capitaliste oppose les travailleurs entre eux, les met en concurrence. Un syndicalisme de lutte, démocratique, de classe et internationaliste, doit contribuer à remplacer cette concurrence par la solidarité ; un syndicalisme au service des luttes et non outil d’intégration et d’aliénation consentie.

[1] Karl Marx, Salaire, prix et plus-value (1865), dans Œuvres, Économie tome I, Bibliothèque de la Pléiade, p. 533 (voir également p. 1470–1472 sa résolution sur les syndicats adoptée par le congrès de l’AIT en 1866).

[2] « Les syndicats ne doivent jamais être associés à un groupement politique ni dépendre de celui-ci ; autrement, ils ne rempliraient pas leur tâche et recevraient un coup mortel. » « Entretien de Karl Marx avec J. Hamann », republié dans Critique Sociale n° 1, octobre 2008. Voir aussi : « Victor Griffuelhes et l’action syndicaliste » (Critique Sociale n° 25, mars 2013).

Source : http://www.critique-sociale.info/1006/crise-de-la-cgt-ou-crise-du-syndicalisme/

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