Accueil > Zined El Rhazoui "scandalisée" de sa mise à pied par la (...)

Zined El Rhazoui "scandalisée" de sa mise à pied par la direction de Charlie Hebdo.

par Xéxès

Publie le vendredi 15 mai 2015 par Xéxès - Open-Publishing
6 commentaires

« Charlie Hebdo » : Zineb El Rhazoui « scandalisée » de sa mise à pied

LE MONDE | 14.05.2015 à 20h45 • Mis à jour le 14.05.2015 à 22h33 | Par Alexandre Piquard

Zineb El Rhazoui, journaliste membre de la rédaction de Charlie Hebdo, a reçu, mercredi 13 mai, un courrier de la direction la convoquant à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave, a appris Le Monde. Elle est d’ici là mise à pied. Contactée, la direction refuse de commenter « une procédure en cours et interne », mais insiste sur le fait qu’il ne s’agit que d’une convocation à un entretien, pas d’un licenciement effectif. La décision intervient dans un contexte de tensions entre la direction et la rédaction.

Zineb El Rhazoui dit ne pas comprendre le motif du courrier ni la faute grave évoquée et s’étonne de la méthode « bureaucratique » employée, « sans discussion préalable ». « Je suis choquée et scandalisée qu’une direction qui a bénéficié d’autant de soutien après les attentats de janvier fasse preuve d’aussi peu de soutien envers un de ses salariés, qui est sous pression comme tous dans l’équipe et fait l’objet de menaces. »

Menaces de mort

Sociologue des religions, franco-marocaine et militante contre l’islamisme et l’intégrisme, Zineb El Rhazoui, a notamment fait l’objet de menaces de mort de la part d’islamistes, mi février. Visant également son mari, ces menaces ont été dénoncées par des sociétés de journalistes. Par ailleurs scénariste de La Vie de Mahomet, dessiné par Charb, Mme El Rhazoui vit depuis sous protection renforcée, à Paris.

« Mon mari a perdu son emploi car des djihadistes ont dévoilé son lieu de travail, il a dû quitter le Maroc, je suis menacée, je vis dans des chambres d’amis ou à l’hôtel et la direction envisage de me licencier... Bravo Charlie », ironise Zineb El Rhazoui.

Conditions chaotiques

Sans préjuger du motif du courrier reçu, Mme El Rhazoui explique qu’elle n’a pas pu travailler normalement depuis les attentats qui ont décimé la rédaction en janvier. « Je ne suis pas la seule. On ne peut pas reprocher aux gens d’aller mal et de ne pas se comporter en bons ouvriers, on vit dans des conditions chaotiques. C’est impossible de faire des reportages sous protection policière... », explique-t-elle.

Avant janvier, Zineb El Rhazoui réalisait pour Charlie Hebdo des reportages en France et à l’étranger, notamment en Afrique, souvent sur les religions. Elle a été recrutée en 2011 pendant les « printemps arabes ». Auparavant, elle a été militante au Maroc, opposée au régime ou au ramadan, via notamment le mouvement alternatif pour les libertés individuelles, qu’elle a confondé. Elle a aussi été très active au sein de l’association Ni putes ni soumises.

Depuis janvier, Mme El Rhazoui est souvent apparue dans les médias, notamment au « Grand Journal », afin de défendre la laïcité contre l’islamisme ou le droit au blasphème, des thèmes liés à Charlie Hebdo et aux attentats, comme lors de conférences, à Chicago, Montréal ou Paris.

« Mesure punitive »

Au fond, Mme El Rhazoui s’estime aujourd’hui victime d’une « mesure punitive » pour avoir contesté la direction actuelle de Charlie Hebdo. Elle a fait partie des signataires d’une tribune parue fin mars dans Le Monde demandant une « refondation » du journal et une gouvernance – ainsi qu’une structure de capital – beaucoup plus collégiale qu’aujourd’hui. Le capital est actuellement détenu à 60 % par le directeur de la publication Riss et le directeur financier Eric Portheault. Ils travaillent de façon assez étroite avec le rédacteur en chef Gérard Biard et l’avocat Richard Malka.

La tribune des journalistes – qui ont créé une association – n’avait pas plu à la direction, qui s’est estimée injustement visée. Un e-mail a été envoyé aux signataires, leur demandant de ne pas émettre de critiques à l’extérieur. Par ailleurs, les salariés ont été consultés sur leur vision du futur du journal, dans l’optique d’une future nouvelle formule.

« Après une phase où on pensait qu’une vraie discussion avait repris, les choses ne passent aujourd’hui pas bien », estime un journaliste signataire de la tribune.

« Pas d’explication »

Patrick Pelloux, chroniqueur à Charlie, est furieux du courrier envoyé à Zineb El Rhazoui : « On est tous encore en train de gérer l’après-attentat. Convoquer des membres de l’équipe qui sont encore dans des souffrances incroyables, c’est méchant et déloyal. »

« Recevoir des prix pour la liberté d’expression et convoquer des journalistes menacés, c’est paradoxal, ajoute-t-il. Et on n’a pas d’explication alors que journal se veut alternatif et socialement irréprochable... »

Un autre journaliste s’indigne du sort réservé à Zineb El Rhazoui, qui est une « grande gueule » mais qui « s’est exposée et mise en danger depuis des années » pour écrire un livre comme celui sur Mahomet avec Charb ou pour ramener des reportages.

« Je suis très surpris d’une décision aussi bête et méchante, mais pas au sens de Hara-Kiri... critique-t-il. La méthode est incroyable pour Charlie. C’est violent. » La réaction de la direction sous-entend qu’il pourrait ne pas s’agir de licencier Zineb El Rhazoui, simplement de la rappeler à l’ordre et à ses devoirs envers le journal. Cette dernière ne décolère pas et estime que « si c’était le cas, on aurait dû discuter... ».

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2015/05/14/charlie-hebdo-zineb-el-rhazoui-scandalisee-de-sa-mise-a-pied_4633851_3236.html#7KzTDtx3TYbhK33o.99

Messages