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Harcèlement policier à Belleville : témoignages

par jeb

Publie le dimanche 7 juin 2015 par jeb - Open-Publishing
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Harcèlement policier à Belleville : témoignages

Comme nous l’expliquions récemment dans un communiqué de presse commun avec les Roses d’Acier, l’association de travailleuses du sexe chinoises qui travaillent à Belleville, une opération d’intense répression a lieu en ce moment dans ce quartier.

Parce que cette situation ne doit pas rester sous silence, nous publierons régulièrement sur cette page les témoignages de travailleuses du sexe illustrant ce harcèlement policier.

Témoignage 4 : Xiaohui

22/05 16-17h

« J’étais près du magasin de Toufu et je marchais quand 2 policiers m’ont demandé mes papiers. L’un d’eux a plissé les yeux sur la photo comme s’il ne me reconnaissait pas, alors j’ai enlevé mes lunettes et l’autre m’a pris en photo. Il a déchiré les papiers, les a gardé et m’a dit de partir en me montrant la direction opposée à la station de métro. Je suis partie en prenant des grands détours pour être sûre qu’il ne me suive pas ; Je n’ai jamais travaillé dans d’autres quartiers, mais si ça continue comme ça on va à peine pouvoir s’acheter à manger. J’ai entendu par des amies que Saint-Denis c’est plus sûr… on verra. »

Témoignage 3 : Yiyi

« Dimanche soir, 22 mai, 22h. J’étais à Belleville, près du Boulevard de la Villette, je marchais et un policier est venu en me demandant mes papiers. Je les lui ai tendu, et il a sorti son portable pour me prendre en photo, mais je ne voulais pas qu’il me prenne en photo, alors il m’a attrapé par la manche de mon vêtement et m’empêcher de partir. Il m’a lâché et a déchiré mes papiers. J’ai repris la marche vers chez moi mais j’ai à peine fait quelques mètres qu’il m’a crié après, il m’a rattrapé en me bloquant le passage et en me demandant à nouveau « papiers ». Mon français n’est pas bon donc ce n’était pas facile de m’exprimer, il m’a dit d’ouvrir mon sac, a pris le portefeuille qu’il y avait à l’intérieur. Il me l’a rendu et pendant que je le remettais dans mon sac il m’a pris en photo. Il y avait des gens qui étaient témoin, et finalement un français l’a interpelé. Du coup le policier m’a laissé partir. Si le monsieur n’était pas intervenu, il aurait continué à me harceler je pense. »

Témoignage 2 : Xiaohua

« Le 23 mai vers 17h, je sortais de la station de métro de Belleville quand j’ai vu des policiers. J’ai marché vers Couronnes, et j’ai vu qu’ils me suivaient. J’ai pris une rue transversale et m’y suis cachée une demi-heure. Je suis redescendue, et je les ai vu derrière la porte vitrée du rez-de-chaussée d’un immeuble. J’ai marché, et ils m’ont arrêtée. Ils étaient 4 hommes. Ils m’ont dit « papiers Madame », je les leur ai donnés. Ils les ont pris en photo, l’un m’a pris par le menton pour me soulever le visage et m’a photographié avec son portable. J’ai voulu repartir vers Belleville, il m’en a empêché, m’a montré la direction de Courronnes en me disant « par-là ». J’ose à peine sortir maintenant. »

« La 2eme fois que j’ai été interpelée par un policier. C’était 3 jours plus tard, le 26, vers 17h-18h aussi. Je l’avais vu près du Paris Store. J’habite juste à côté. J’ai tapé le premier code pour rentrer chez moi et au moment où je tapais le 2ème le policier est rentré dans le sas, puis un autre après lui, et encore 2 autres. Finalement ils sont quatre, et l’un me demande si j’habite au-dessus. Un autre me demande mes papiers. Ils me font signe de les emmener en haut. Je les fais monter. C’est un dortoir de 3 petites chambres où on est 6 à habiter. Un me demande « travailler ? », je réponds « non non, dormir », ils continuent à me poser des questions mais je ne comprends pas. Ils ont regardé les toilettes et la cuisine, deux sont partis et deux sont restés. L’un a pris mes papiers, et il a écrit quelque chose sur son carnet pendant longtemps, mais je ne sais pas ce qu’il a écrit, et il me les a rendu. Je ne suis redescendue qu’à 23h, il n’y avait plus personne dans la rue. Je crois que je vais faire de nombreuses photocopies de mes papiers maintenant ! En tout cas, quoiqu’on fasse on est arrêtées ; On nous empêche complètement de bouger ! »

Témoignage 1 : Lili

« Le 23 mai vers 17 h. Je suis descendue de chez moi et trois policiers étaient en bas dans la cage d’escalier. L’un des policiers est venu vers moi ; J’ai juste compris « papier ». Je lui ai tendu ; il a arraché la pochette brutalement puis a photographié chacun des papiers à l’intérieur et m’a tout rendu. J’ai voulu partir, il m’a retenu ; m’a pris par le menton, l’a soulevé et m’a pris en photo avec son téléphone portable. J’ai alors pu partir. »

Messages

  • Il est exact qu’une pression policière est mise en place depuis plusieurs semaines. Cela perturbe le « travail » des péripatéticiennes et c’est fait pour ça. Certaines m’ont demandé pourquoi il en était ainsi, ce à quoi je n’ai rien su répondre de précis, si ce n’est que le nombre important de Chinoises sur le trottoir devait pour partie en être la cause.

    La conséquence de cette pression est d’abord une ambiance angoissante pour ces femmes déjà soumises à de multiples violences. Des comportements d’évitement sont observés, avec soit une mise à distance soit un enfermement communautaire encore plus grand.

    Tout cela a des conséquences financières. Certaines femmes n’arrivent plus à payer leur chambre, leur loyer, leur nourriture. Je suis intervenu plusieurs fois en ce sens pour nourrir quelques personnes malades n’ayant ni ressources ni clientèle. On observe depuis quelque temps une redistribution des logements, des piaules de passes.

    Or, on sait que plus la promiscuité est grande sur le lieu de passes moins l’hygiène est respectée. On en devine déjà les conséquences sur la santé publique. C’est peut-être ce que cherchent les pouvoirs publics.

    Non assistance à personnes en danger, les responsables de cette situation devraient y songer sans tarder. On aimerait connaître leurs arguments, afin de transmettre les messages aux intéressées qui souhaiteraient comprendre.

  • pour info, le communiqué du STRASS relayant ces témoignages est régulièrement mis à jour à l’arrivée de nouveaux témoignages : http://strass-syndicat.org/harcelement-policier-a-belleville-temoignages/

  • Si les informations de cette publication sont vraies, il y a alors quelque chose d’inquiétant qui se met en place et qui devrait être relevée pour défendre les libertés.

    Je suis étonné, à tord ou à raison, que des policiers dont la mission est de patrouiller dans les rues puissent monter librement chez les gens, fouiller tout à leur guise, sans qu’il ait un ordre de mission leur ordonnant de le faire, ordre qui devrait être signifié à la personne en cause.

    Ce fait mériterait qu’on s’y attarde et surtout cela mériterait une réponse officielle au plus haut niveau pour vérifier s’il en est bien ainsi.

    En grand naïf que je suis, je croyais que ce genre d’opération exigeait un ordre écrit de la hiérarchie, était encadré par une procédure, si ce n’est judiciaire au moins administrative par voie hiérarchique. Quand est-il des droits des personnes en général et dans le cas particulier du contexte cité ?

    Je me pose la question parce que tout cela n’est pas sans rappeler ce qui se passait dans les années au cours desquelles le parti nazi est monté au pouvoir. On y chassait le juif au facies. On pénétrait chez les gens pour un oui, pour un non. On connaît la suite.

    La similitude apparaît suffisante pour que l’on s’interroge. : Les socialistes ne seraient-ils pas, dans la capitale ou ailleurs, en train de glisser vers une forme d’action non justifiée à caractère totalitaire, donc plus facile à mettre en place ? On se pose la question, à tord ou à raison.