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Marceline Lartigue est partie brusquement, fauchée par une attaque cérébrale en pleine distribution de tracts

par Jean-Marc Adolphe

Publie le samedi 5 mai 2018 par Jean-Marc Adolphe - Open-Publishing

Aujourd’hui, 1er mai 2018, Marceline Lartigue ne participe pas aux manifestations du 1er mai 2018. Cela ne lui ressemble pas. Mais elle, tellement vivante, ça ne lui ressemble pas non plus de mourir.

Et pourtant, Marceline est partie en voyage, rejoindre Antonio Gramsci et quelques autres camarades de lutte (l’un de ses tout derniers billets sur Facebook rendait hommage à Gramsci, mort le 27 avril 1937).

Marceline est partie brusquement, fauchée par une attaque cérébrale en pleine distribution de tracts, entourée de son compagnon, et d’ami.e.s militant.e.s.

Fille de Pierre Lartigue (1936-2008), écrivain et critique de danse dont j’avais pris la succession en 1985 à L’Humanité ; et de Bernadette Bonis, critique de danse qui m’a si généreusement accueilli et en partie formé lorsque je suis arrivé à Paris (et évidemment, pensée affectueuse à Bernadette Bonis en ce moment si douloureux à vivre), Marceline Lartigue avait gardé d’eux un sens de l’engagement sans faille.

Contrainte à une semi-inactivité chorégraphique ces dernières années, après avoir mené de 2003 à 2009 un cycle de recherches et d’étude autour du rituel au Bénin, au Ghana et au Sénégal (pour lequel elle avait été Lauréate de la bourse Villa Médicis AFAA Hors les Murs en 2006.

« Danser », disait-elle, « est pour moi cet acte où la conscience ordinaire effleure le subliminal. Alors s’ouvre un nouvel espace-temps où se dévoile le monde intérieur que des formes extrêmes de pratique dansée abordent par la transe. J’aimerais parler d’inspiration lucide. »

Cette « inspiration lucide », Marceline Lartigue l’a mise au service d’un paysage chorégraphique qu’elle a magnifiquement traversé dans les années1980, en tant qu’interprète auprès de Karole Armitage et de Karine Saporta (et ultérieurement, au début des années 2000, auprès de Susan Buirge), et dans les années 1990 en tant que chorégraphe, avec la compagnie Szerelem, en s’inspirant de la dimension monstrueuse de personnages réels et mythiques comme dans Erzsebet (1988), Lola Montes (1991-1992), Gilles de Rais (1995), L’orage d’une robe qui s’abat (1998), L’antichambre des Contes (1999), L’improbable et Centaures (1996-1997).

Reste encore de Marceline Lartigue la sensualité inquiète, la fougue vibrante, les lignes voluptueuses et franches d’une Passion, celle-là même chorégraphiée par Hiedeyujki Yano et Karine Saporta, dont les représentations eurent lieu en 1986, à l’Hôtel Meurisse (Paris).

Puisse Marceline Lartigue, là où elle est partie en voyage, transporter avec elle la grâce enragée, la sensualité et les rires limpides qui ont été les siens.

(Photos Philippe Taka et Nicolas Villodre)

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Une cérémonie aura lieu lundi 7 mai à 13h30 au crématorium du Père Lachaise à Paris dans la salle de la Coupole.