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Le dialogue social selon Gérard Mestrallet, président d’Engie

par Pierre-Louis

Publie le mercredi 28 novembre 2018 par Pierre-Louis - Open-Publishing

Dans une correspondance interne* rendue publique, les représentants du personnel d’Engie ont fait part de leur surprise en constatant qu’ils avaient été soigneusement tenus à l’écart des délibérations pour le choix d’un nouveau directeur général pour le groupe Suez.

Le procédé n’étonnera personne, de la part d’une direction qui ne nous a guère habitué à autre chose : selon les informations disponibles, le comité des nominations et des rémunérations, commun à Suez et à Engie, aurait arrêté sa décision concernant le choix du futur directeur général du groupe Suez, société dont Engie détient toujours près de 34%. D’après le courriel ayant fuité, c’est le 29 octobre dernier que les représentants du personnel, réunis en conseil, ont eu la surprise d’apprendre qu’un nom semblait avoir été choisi.

Ce comité des nominations et des rémunérations, au sein duquel ne siège aucun représentant du personnel, en contradiction flagrante avec les engagements pris par la direction, est sous l’autorité de Gérard Mestrallet, président sur le départ mais accroché à ses prérogatives. Il compte également dans ses rangs quelques pointures, telles Anne Lauvergeon, Nicolas Bazire, Jean-Louis Chaussade ou Valérie Bernis. Mais plus qu’une affaire d’ego entre fortes personnalités, ce sont les méthodes propres aux hauts dirigeants de Suez Engie qui sont pointées du doigt : faisant fi de la plus élémentaire transparence, le comité à la solde de Gérard Mestrallet, dont on connait les velléités de contrôle et l’autoritarisme, n’a pas le moins du monde justifié ou expliqué son choix. Le fait du Prince, ni plus ni moins ; tout ce beau monde passant par pertes et profits ses obligations en la matière.

Or, certains se sont justement fait fort de les leur rappeler. Les représentants du personnel Guillaume Thivolle, Agatta Constantini et Enric Amiguet I Rovira ont pris leurs responsabilités et se sont fendus d’un courriel à destination des hautes sphères pour demander quelques explications. Dans des termes choisis et de circonstances pour une correspondance à destination de l’aréopage de grands directeurs de Suez Engie, ceux-ci ne cachent leur colère. Mis devant le fait accompli, ils dénoncent une décision prise en totale opacité et sans concertation, qui engage néanmoins la société Suez et ses salariés pour des années.

Dans le détail, les instances de directions ont surtout été mises en demeure de fournir les justificatifs écrits de l’ensemble du process de décision. Et c’est là que le bât blesse pour Gérard Mestrallet : l’expérience aidant, si les suppositions des représentants de personnel sont exactes, cette décision ne découle d’aucun process de recrutement et d’évaluation réglementaire. Elle ne serait que le résultat de la volonté de Gérard Mestrallet d’imposer un fidèle (voire un dévot) à la tête de Suez. Sûr de son autorité et de son choix, il est très probable que celui-ci se soit passé des contraintes et de l’embarras d’une sélection en bonne et due forme. Mais c’était sans compter sur le fait que les salariés et leurs représentants connaissent le droit et les obligations en la matière.

Quoi qu’il en soit, tout porte à croire que les justificatifs écrits de cette décision seront durs à (re)trouver, pour autant qu’ils ne soient pas en train d’être fabriqués a posteriori. Personne ne compte en rester là et simplement prendre acte d’une décision qui ne tient aucun compte de l’avis des salariés, manifestement accessoire. Ce n’est pas l’idée que nous nous faisons du dialogue social chez Suez Engie, ce n’est d’ailleurs pas un dialogue du tout.

(*) https://fr.calameo.com/read/005775828a34b616b0668