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CORONAVIRUS : COMPLEMENT D’ENQUËTE. DANS L’OMBRE DES DIRIGEANTS

par Jean-Marc ADOLPHE

Publie le samedi 28 mars 2020 par Jean-Marc ADOLPHE - Open-Publishing

Les révélations faites plus tôt par le site internet bellaciao.org sur le rapport de Santé Publique France, dont les recommandations sont mystérieusement restées sans suite, devraient venir alimenter la colère contre l’impréparation et l’incurie du gouvernement face à la crise. D’ores et déjà, six plaintes contre des ministres, parmi lesquels Édouard Philippe, ont déjà été déposées à la Cour de justice de la République, et d’autres arrivent dans les tribunaux.

En dehors des ministres eux-mêmes, certains hauts responsables ont jusqu’à présent réussi à échapper aux radars médiatiques.

Dans les cabinets du président de la République comme du Premier ministre, on trouve, sur les questions de santé, des profils très nettement marqués à droite.
Début mars, Anne-Marie Armanteras-de Saxcé a rejoint l’Elysée en tant que Conseillère santé, handicap, personnes âgées. Diplômée de l’Ecole Nationale de la Santé Publique (promo 1982), elle a d’abord assumé des fonctions de direction dans le secteur hospitalier, successivement au CHU Henri Mondor à Créteil, au Groupement Hospitalier Bichat-Claude Bernard ou encore à la Fondation Ophtalmologique Adolphe de Rothschild. Elle a ensuite poursuivi une carrière administrative, en tant que directrice du pôle « Etablissements de Santé » à l’ARS Ile-de-France auprès de Claude Evin, puis directrice générale de l’Offre de Soins au Ministère de la Santé. Avant sa nomination à l’Elysée, elle présidait la Commission de l’évaluation et de l’amélioration de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (CSMS) de la Haute Autorité de santé (HAS).

Elle a donc pris ses fonctions au cabinet du président de la République, début mars, en remplacement de Marie Fontanel (énarque, membre de l’IGAS, spécialiste des questions sociales, ancienne n°2 de l’ARS Grand Est), partie le… 22 janvier. Quelle raison impérieuse a poussé Marie Fontanel à quitter le navire, alors que la pandémie coronavirale commençait à s’étendre ? Elle est allée rejoindre la campagne électorale de son mari, Alain Fontanel, candidat LREM à Strasbourg (au 1er tour de l’élection municipale, il a recueilli 19,86% des voix, derrière l’écologiste Jeanne Barseghian).

Entre le 22 janvier et début mars, il n’y a donc eu aucun.e conseiller.e santé à l’Elysée. Intéressant…

A Matignon, un personnage-clé est Thomas Fatome, directeur adjoint de cabinet d’Edouard Philippe. Comme le rapportait Libération, Thomas Fatome a navigué pendant vingt ans entre son corps d’origine et les cabinets ministériels. « Toujours à droite, au début. D’abord chez Philippe Douste-Blazy et Xavier Bertrand, puis directeur de cabinet de Laurent Wauquiez (période droite sociale) et adjoint de celui de Christine Lagarde à Bercy, avant de finir les deux dernières années du quinquennat Sarkozy comme conseiller santé, dépendance et politiques sociales à l’Elysée. Nommé directeur de la Sécurité sociale avant l’alternance, il restera en poste sous la mandature Hollande. »

En outre, depuis l’élection d’Emmanuel Macron, Franck Von Lennep est Conseiller santé, protection sociale, politiques sociales (chef de pôle) auprès du Premier ministre. Né en 1972, diplômé de l’Ecole nationale de la statistique et de l’administration économique (ENSAE, 1995), Franck Von Lennep intègre en 1998 la division de la nomenclature de la Caisse nationale d’assurance maladie de Paris dont il devient ensuite responsable du département veille et stratégie (2006-2008). En juin 2008, il rejoint le cabinet de Laurent Wauquiez, secrétaire d’Etat chargé de l’emploi puis est nommé conseiller social du ministre du Budget, François Baroin (2010-2011) puis de sa successeure Valérie Pécresse (2011-2012).

Tout comme les ministres d’ores et déjà visés par des plaintes devant la Cour de justice, ces hauts-fonctionnaires auront certainement des comptes à rendre sur l’anticipation et la gestion de la crise sanitaire du coronavirus ; une fois levé le confinement, lorsque l’Assemblée nationale sera en mesure de constituer une commission d’enquête.

Photos : Anne-Marie Armanteras-de Saxcé, conseillère santé au cabinet du président de la République ; Thomas Fatome, directeur adjoint de cabinet du Premier ministre.