Accueil > Fin à la gratuité des soins pour les sans-papiers.

Fin à la gratuité des soins pour les sans-papiers.

Publie le lundi 3 mars 2003 par Open-Publishing

Le gouvernement met fin à la gratuité des soins pour les sans-papiers

LE MONDE - EDITION DU 04.03.03

Les sans-papiers devront désormais payer le forfait hospitalier ou le ticket modérateur ; les bénéficiaires de la couverture médicale universelle (CMU) ne toucheront plus l’allocation que le mois suivant son attribution. Les associations dénoncent ce "contresens en terme de santé publique".

La droite veut-elle faire des économies sur la santé des plus démunis ? Renouer avec une culture du soupçon vis-à-vis de certaines franges de la population, qui profiteraient indûment de l’Etat-providence ? De nombreuses associations le pensent depuis la réforme de la couverture maladie universelle (CMU) et de l’aide médicale d’Etat (AME), deux dispositifs qui permettent aux pauvres et aux personnes sans papiers ni ressources de se soigner gratuitement.

[...]

Les modifications apportées à la CMU et à l’AME ont soulevé un tollé d’une rare vigueur, notamment du côté des associations qui épaulent les populations précaires ou issues de l’immigration, et de quelques syndicats de médecins. Le fait de différer l’ouverture des droits à la CMU va provoquer des "délais de carence inutiles et dangereux pour l’accès aux soins des personnes malades", estime Noëlle Lasne, de Médecins sans frontières (MSF).

[...]

Si la réforme de la CMU, approuvée en décembre, est d’ores et déjà applicable, celle de l’AME nécessite, elle, un décret d’application. Dominique Versini, secrétaire d’Etat à la lutte contre la précarité et l’exclusion, a recueilli les avis et doléances des associations, le 3 février, sans faire le moindre commentaire, mais en donnant l’impression à certains participants qu’elle ne se sentait guère en phase avec le vote des parlementaires.

Durant cette rencontre, elle a communiqué quelques chiffres extraits d’un prérapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) consacré à l’AME : d’après plusieurs représentants d’organisations humanitaires, ce document mettrait en évidence la part prépondérante des dépenses d’hospitalisation et le poids très élevé des médicaments antirétroviraux (qui sont administrés aux personnes atteintes par le VIH).

Si elles étaient confirmées, ces données-là ne feraient que confirmer l’inutilité des mesures votées en décembre, remarque Mme Lasne, dans la mesure où les bénéficiaires de l’AME souffrant de pathologies lourdes seront exonérés de toute contribution financière. Quoi qu’il en soit, Mme Versini a adressé une note à Jean-Pierre Raffarin. Il appartient maintenant au premier ministre de trancher.

Bertrand Bissuel

*******

Plus de 4,5 millions de personnes concernées

Aide médicale d’Etat.

Accordé sous conditions de ressources (moins de 562 euros par mois pour une personne seule), ce dispositif comptait environ 176 000 bénéficiaires en septembre 2002 (des étrangers en situation irrégulière pour l’essentiel). Jusqu’à la réforme votée par le Parlement en décembre 2002, l’AME a permis aux sans-papiers d’être soignés gratuitement dans les établissements de santé et de ne pas payer les médicaments prescrits à l’hôpital ; les soins de ville ont également été couverts pour les bénéficiaires vivant en France depuis au moins trois ans (sauf à Paris et en Seine-Saint-Denis, où la prise en charge a été assurée sans conditions de délai). Ce principe de gratuité va disparaître : les bénéficiaires de l’AME devront payer le ticket modérateur (6 euros pour un généraliste) ou le forfait journalier (10,67 euros).

Couverture-maladie universelle.

En juin 2002, 4,4 millions de personnes en bénéficiaient. La CMU complémentaire donne droit à la prise en charge des dépenses que ne rembourse pas la Sécurité sociale (ticket modérateur, forfait journalier...). La CMU est accordée sous conditions de ressources (moins de 562 euros par mois) aux personnes qui résident depuis au moins trois mois en France, de façon régulière.