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G8 de Gênes : ni vérité, ni justice

Publie le vendredi 18 juillet 2008 par Open-Publishing
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de OLIVIER CHAVAZ

Le verdict est tombé lundi dernier. A Gênes, treize membres des forces de l’ordre et deux médecins ont été condamnés en première instance à un total de vingt-quatre ans de prison pour les violences barbares commises dans la caserne de Bolzaneto, où étaient détenus les manifestants arrêtés lors du G8, en juillet 2001. Il s’agit du deuxième des trois grands procès liés à ces événements qui s’achève, après celui d’un groupe d’activistes en décembre 2007. Quant à l’ultime procédure, elle concerne d’autres policiers impliqués, eux, dans le raid contre le centre médias des opposants au G8 –la fameuse école Diaz– au cours duquel des dizaines de personnes ont été gravement blessées.

Loin d’apaiser les souffrances des parties civiles, cette sentence est une nouvelle mascarade pour la fragile démocratie italienne. Pour de multiples raisons. Elle épargne d’abord deux tiers des agents initialement inculpés. En comparaison avec les sanctions infligées aux altermondialistes –jusqu’à onze ans de prison pour le jet d’un cocktail Molotov–, elle apparaît également dérisoire, la condamnation maximale s’élevant à cinq ans. Il faut ensuite savoir qu’aucun des coupables n’a passé et ne passera un seul jour derrière les barreaux. Et qu’ils ne craignent rien pour leur boulot : même les peines dites annexes comme l’interdiction temporaire d’exercer une fonction d’autorité seront prescrites au plus tard en janvier 2009, soit avant une condamnation définitive.

Dans leur réquisitoire, les procureurs avaient pourtant insisté sur la gravité particulière des faits : pluie de coups, insultes, attente interminable les mains sur la tête et sur une jambe, menaces de viol, obligation de crier des slogans fascistes, etc. Selon eux, les passages à tabac et les humiliations réservées aux détenus sont assimilables à des traitements inhumains et dégradants tels que définis dans les années 1970 par la Cour européenne des droits de l’homme, qui avait alors statué sur les méthodes employées par l’armée britannique en Irlande. En clair, les forces de l’ordre engagées à Bolzaneto se sont muées en tortionnaires pendant trois jours.

Il est regrettable que les juges n’aient suivi que très partiellement les conclusions du Ministère public. Dans cette affaire, reconnaître le caractère collectif des crimes commis était essentiel. Il ne fait plus de doute que la violence était organisée et tolérée. Mais les lacunes des institutions italiennes ont de toute évidence permis la création d’une zone de non-droit dans un Etat prétendument démocratique. Un exemple ? Le code pénal italien ne contient aucun article sur la torture alors que Rome a ratifié la convention de l’ONU il y a vingt ans...

Les responsabilités politiques des sanglants événements de Gênes ne seront jamais établies. En témoigne le refus du centre-gauche de créer une commission d’enquête parlementaire lorsqu’il en a eu la possibilité. Ce G8 restera comme l’un des trop nombreux trous noirs de la république transalpine. En ne se souciant ni de vérité ni de justice, la classe politique accepte implicitement que l’histoire se répète. Et pas seulement au détriment de quelques centaines de militants altermondialistes.

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