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L’Etat devient un actionnaire minoritaire de France Télécom

Publie le mercredi 1er septembre 2004 par Open-Publishing
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de Nathalie Brafman

Le ministère de l’économie et des finances a annoncé, mercredi, la cession d’au
moins 9,6 % du capital de l’opérateur téléphonique, amenant sa participation
entre 41 % et 43,5 %. L’opération devrait rapporter entre 4,6 milliards et 5,8
milliards d’euros à l’Etat.

Contraintes budgétaires et calendrier politique obligent, Nicolas Sarkozy a annoncé mercredi
1er septembre que le gouvernement allait céder au moins 9,6 % du capital de France
Télécom tout en restant "un actionnaire important à moyen terme". Le gouvernement
n’exclut pas de vendre jusqu’à 12,1 % du capital.

Au cours actuel, 19,4 euros, cette opération pourrait renflouer les caisses de l’Etat de 4,6 à 5,8 milliards d’euros et ainsi réduire l’endettement de la France. A Bercy, on fait aussi valoir que l’opération était attendue par le marché et que cette attente pesait sur le cours de l’action. "L’Etat est actionnaire de l’opérateur historique et en même temps arbitre. Je souhaite que nous sortions de cette ambiguïté en descendant sous la barre des 50 % du capital dans France Télécom", avait également déclaré Patrick Devedjian, ministre délégué à l’industrie dans une interview au Monde le 14 juin.

Cette opération met fin à la situation particulière de l’opérateur historique par rapport à ses concurrents européens tous majoritairement détenus par des capitaux privés. "Grâce à l’action de redressement conduite sous l’impulsion de sa direction et de l’ensemble de ses salariés depuis l’automne 2002, France Télécom a rétabli sa situation financière et a réalisé des opérations stratégiques telles que la réintégration d’Orange et de Wanadoo. Grâce à ses efforts, à sa créativité et à son initiative, l’entreprise est en mesure de prendre pleinement sa part dans un marché des télécommunications en pleine mutation", indique Bercy dans un communiqué.

LES FRUITS DE L’INVESTISSEMENT

Dans ce contexte de redressement de l’opérateur de télécommunications - au premier semestre il a réalisé un chiffre d’affaires de 23,2 milliards d’euros, en hausse de 4,2 % et son résultat d’exploitation a augmenté de 12,8 %, à 5,2 milliards, l’Etat compte bien récupérer les fruits de son investissement et "réduire l’endettement de la nation en diminuant sa participation dans le capital de France Télécom. L’Etat a accompagné, en tant qu’actionnaire ce parcours remarquable. Il a souscrit à hauteur de sa part, à l’augmentation de capital réalisée par France Télécom en mars 2003 -à 14,5 euros-." Par ailleurs, Bercy considère que France Télécom aura désormais surtout "besoin d’accroître ses marges de manœuvre pour pouvoir s’adapter aux évolutions futures des marchés des télécommunications". Un capital plus "flexible sur une base d’investisseurs élargie" devrait le lui permettre.

Au terme de ce placement, selon le nombre d’actions cédées, l’Etat détiendra entre 41 % et 43,5 % du capital de France Télécom. Parallèlement, à cette opération de privatisation, France Télécom devait réunir son conseil d’administration mercredi pour lui proposer une émission d’obligations convertibles pour un montant de 1 milliard d’euros, susceptible d’être portée à 1,5 milliard pour lui permettre d’optimiser ses sources de financement.

Depuis la loi du 31 décembre 2003 relative au service public des télécommunications et à France Télécom, la réduction de la participation sous la barre des 50 % était possible. Une loi que les syndicats avaient durement combattue. En échange, ils avaient réussi à maintenir le statut de fonctionnaires pour plus de 100 000 salariés.

Pour le syndicat SUD-PTT, l’annonce de cette cession n’est donc pas vraiment une surprise. "Depuis le vote de cette loi, nous nous y attendions", indique Verveine Angeli de SUD-PTT. Sur la forme, le syndicat CGT a critiqué l’opération. "On contraint les membres du conseil d’administration à la confidentialité et cette annonce est faite à la presse avant qu’il ne soit réuni", dénonce Philippe Carer, secrétaire régional de la CGT PTT Ile-de-France.

Même critique du côté de la CFDT. "Il y a dans l’organisation des relations entre la direction et les partenaires sociaux une instance groupe qui permet de communiquer en amont les informations sur des sujets importants. A ce jour, nos représentants n’ont pas été convoqués. Nous sommes d’autant plus surpris que nous achevons une longue négociation sur les instances représentatives de droit commun, où l’entreprise a toujours affiché une volonté de transparence, au final c’est comme d’habitude, nous apprenons l’information par la presse", lance Pascal Delaporte, responsable de la CFDT.

RÉACTION DES SYNDICATS

Voilà pour la forme. Sur le fond, dans leur ensemble, les syndicats ont réagi très négativement à l’annonce de la privatisation de leur groupe et ont dénoncé qu’encore une fois, l’Etat vende les bijoux de famille. "Une fois de plus, le gouvernement se sert de France Télécom comme d’une vache à lait. Il va utiliser les fonds pour rentrer dans les critères de Maastricht. Ce qui nous choque également, c’est qu’au moment où le gouvernement annonce ce désengagement, il offre de nouveaux allégements fiscaux, de nouveaux cadeaux au patronat", dénonce M. Carer.

Les syndicats n’ont pas manqué de traiter de nouveau l’Etat de menteur. "Encore une fois depuis dix ans, l’Etat n’a pas tenu ses promesses vis-à-vis des salariés de France Télécom", indique Mme Angeli. "Lorsque Francis Mer était ministre de l’économie, il avait dit que la nouvelle loi qui modifiait le statut de France Télécom et autorisait donc sa privatisation ne serait mise en œuvre qu’à la demande de France Télécom et seulement dans le cadre d’un projet industriel. On voit bien que ce n’est pas le cas puisque cette opération se fait dans le seul intérêt des caisses de l’Etat", critique Marc Maouche, président du syndicat CFTC de l’opérateur.

Sur la situation financière du groupe, les sentiments sont aussi partagés. SUD-PTT fait valoir qu’effectivement elle est différente de celle d’il y a deux ans mais que "d’un point de vue industriel, la position de France Télécom est plutôt inquiétante. Nous perdons des parts de marché dans le fixe et nous ne sommes pas très en avance sur le marché de la voix sur Internet alors que d’autres opérateurs alternatifs s’y sont lancés depuis longtemps".

D’ores et déjà, les syndicats réfléchissent à organiser la riposte. "Nous sommes en contact avec les autres organisations syndicales pour évaluer la situation des actions à mener", indique M. Carer. "Il y aura sans doute des actions importantes dans le courant du trimestre", prévient Mme Angeli. A la CFDT, "la riposte pourra aller de la manifestation au siège à un appel à la grève". A l’occasion de l’assemblée générale extraordinaire qui devait se tenir mercredi pour autoriser la distribution de stock-options, ils devaient prendre la parole.

http://www.lemonde.fr/web/recherche_articleweb/1,13-0,36-377410,0.html

Messages

  • Le gouvernement confirme sa politique de privatisation des Services Publics

    C’est par la presse que les salariés, et les organisations syndicales et même les administrateurs ont appris la vente par le gouvernement de 9,5 % du capital de France Télécom rendant ainsi minoritaire l’Etat dans le capital de l’entreprise (41 % au terme de l’opération).

    Cette décision scandaleuse est en phase avec les choix politiques libéraux du gouvernement : privatisation des entreprises publiques et cadeaux au patronat.
    Cette opération exclusivement financière aux dires même du gouvernement va renflouer les caisses de l’Etat à hauteur de 4,5 Milliards d’€uros.

    Cet argent ne servira ni au développement du droit à la communication sur l’ensemble du territoire ni à l’emploi ni au progrès social, mais à financer sur fond de chantage aux délocalisations une nouvelle baisse des charges sociales notamment pour les grands groupes, tel Vivendi, (4 Milliards d’€uros d’exonération d’impôts annoncés hier), alors que les profits explosent.

    La situation de l’emploi dans le pays démontre que de tels choix qui n’ont rien de novateurs n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité, mais ont au contraire contribué à l’approfondissement de la fracture sociale.
    La direction de France Télécom n’est pas en reste, en délocalisant des centres d’appels à l’étranger, en suppriment 14.500 emplois dans le groupe en 2004 dont 8.800 en France, en envisageant d’accorder à une poignée de cadres dirigeants des stocks option à hauteur de 2 Milliards d’€uros, en supprimant des activités et services dans tous le pays.

    La CGT dénonce et combat cette logique.
    Aux Télécom comme dans toutes les professions elle déploie toute son énergie pour démontrer que d’autres choix sont possibles et indispensables.

    La mobilisation des personnels avec leurs organisations syndicales et de l’opinion publique, pour la réappropriation publique totale de France Télécom et plus largement pour une appropriation publique des activités du secteur des Télécom est plus que jamais d’actualité.

    La Fédération CGT des salariés du secteur des Activités Postales et Télécommunications appelle sans attendre le personnel à se réunir et à agir pour ses revendications, pour la défense de l’emploi pour l’amélioration des garanties collectives et pour le service public.
    Elle organise une semaine d’initiatives du 13 au 17 septembre en ce sens.