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Haïti : après l’élan solidaire, une autre solidarité est nécessaire !

Publie le lundi 22 février 2010 par Open-Publishing

Presbytériens, mormons, scientologues, de Travolta à l’obscur prédicateur, ils ont tous fondu sur Haïti. Comme des vautours. C’est sur la détresse d’un peuple meurtri qu’ils sont venus dans ce pays où « 60% sont catholiques, 40% protestants et 100% croient au Vodou » prêcher l’amour du Vrai dieu, du Seul, de l’Unique, du leur. Comme aux temps où, au nom de l’évangélisation et des épices, ce sont des millions d’êtres humains que l’on a massacré.

Aujourd’hui, ils profitent de la détresse des haïtiens pour propager leur camelote faite de croyances, compassion sélective et, surtout, Crainte de dieu. C’est dans la misère des deux millions de sans abris qu’ils trouvent la légitimation à leur prosélytisme ; c’est leur détresse qu’ils exploitent pour toucher partie de la manne des immenses sommes récoltées depuis le tremblement de terre.

L’obscénité de cette course aux conversions qui pousse les limites jusqu’au rapt d’enfants n’est que la traduction privée de la politique gouvernementale étasunienne à Haïti.

Devenu protectorat étasunien sous la houlette de la pro-consule Hillary Diane Rodham Clinton, occupé par vingt mille GI’s, le pays est offert. Du marché de la reconstruction, à l’imposition de standards US, de l’installation probable d’hôtels de luxe pour riches touristes à la relance d’une industrie manufacturière fondée sur des salaires de misère, tout est à prendre pour le grand voisin nord-américain.

Pour cela, comme pour l’évangélisation, il faut un peuple à genou, meurtri. Meurtri par les 200’000 morts ; meurtri aussi par les amputations dont l’ampleur a été dénoncée par de nombreuses ONG et dont on peut légitimement se demander si elle n’est pas intentionnelle.
C’est de ce peuple meurtri, prostré, à genoux qu’ils profitent aujourd’hui pour revenir en Haïti et s’y installer « for the long term », selon les propres mots de l’ambassadeur US auprès de l’ONU, Alejandro Wolff.

A peine installées, les autorités militaires US ont « convaincu » le gouvernement haïtien d’instaurer le couvre-feu et la loi martiale, bien qu’elles reconnaissent « un niveau de violence inférieur à ce qu’il était avant le séisme ». Sauf que, vue la désorganisation de la police et de l’armée haïtiennes, « c’est à nous que ces pouvoirs sont délégués », Mme Clinton dixit.

C’est dans l’indifférence internationale que se fait la recolonisation de ce pays qui fut le premier en Amérique latine, en 1804, avant le Brésil, avant l’Argentine, à conquérir son indépendance. C’est un bond en arrière de deux siècles mâtiné de paternalisme raciste qu’on est en train d’imposer au peuple d’Haïti ! Et par delà, aux consciences à travers la planète.

Voilà pourquoi il faut un nouvel objectif à la solidarité, immense, qui s’est manifestée après le séisme : la mobilisation internationale pour l’annulation de la dette d’Haïti et pour le retrait immédiat des troupes d’occupation.

Paolo Gilardi