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ABERRI EGUNA (journée de la nation basque) - 2008

Publie le vendredi 18 avril 2008 par Open-Publishing
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Independentzia eta Sozialismorantz
EUSKAL HERRIA PAS À PAS
ASKAPENA Information Nº216

ABERRI EGUNA

(journée de la nation basque) - 2008

La journée des patriotes basques, l’Aberri Eguna, est fêtée tous les ans le dimanche de Pâques afin de réaffirmer notre condition de peuple et de nation, même si cette expression politique n’est pas encore reconnue par le concert des nations. Cette année, l’Aberri Eguna a eu lieu le 23 mars dans différentes villes d ?Euskal Herria et avec des connotations différentes.

En guise de conclusion

La toute première édition de l’Aberri Eguna date de 1932, à l’initiative du Parti Nationaliste Basque. Les facteurs à l’origine de cette initiative étaient divers : c’était le 50e anniversaire de l’officialisation des thèses nationalistes basques, l’expérience de l ?Irlande alors que le sud de l’île avait acquis son indépendance peu de temps auparavant (les irlandais célèbrent également leur fête nationale le dimanche de résurrection) exerçait une influence sur les milieux basques nationalistes. Pendant ce temps, le contexte de l’État espagnol était inaltérable : face aux revendications nationales basques, le gouvernement de Madrid répondait par des prohibitions systématiques. C ?est pourquoi le PNB a voulu défier le gouvernement central (inutile de préciser qu’il s’agissait vraiment d’une autre époque !).

La réponse à la convocation a surpris les organisateurs du fait de la grande affluence et de l’enthousiasme dont faisaient preuve les participants. Cela a encouragé à renouveler l’expérience l’année suivante, l’Aberri Eguna de 1933 étant marqué du sceau de l’internationalisme. À cette occasions, Telesforo Monzón termina son allocution par une phrase historique : « La liberté ne se demande pas en prières, il faut l ?obtenir par la force ». L’Aberri Eguna avait acquis une telle importance que le gouvernement de Madrid, pourtant républicain et de gauche, interdit l’édition 1935. C’était le premier épisode de la répression centraliste incessante contre l’Aberri Eguna.

Le coup d’État militaire fasciste de 1936 interrompit la fête jusqu’en 1963, année où la journée fut organisée en Iparralde (nord du pays), sur convocation du groupement nationaliste Enbata et avec le soutien de l’ETA. À partir de cette date, le rendez-vous annuel de l’Aberri Eguna présente des constantes :

l En premier lieu, la persécution policière : la célébration de l’Aberri Eguna pendant toutes ces années a provoqué la fermeture des frontières pour empêcher la rencontre entre les Basques de part et d ?autre, l’occupation de communes accueillant la fête, des arrestations en masse, de nombreux blessés par balle, des militants morts en actions de combat (en 1969, deux jeunes sont tués par l’explosion de l’engin qu’ils manipulaient ; il se trouve qu’ils appartenaient tous deux à EGI, organisation juvénile du PNB). Lors de l’Aberri Eguna de 1976, c’est un militant de l’ETA qui perdait la vie dans un affrontement armé avec la garde civile espagnole).

l En second lieu, le manque d ?unité entre les différents organisateurs est également une constante. Et cela a encore été le cas cette année, malheureusement.

Au nombre des curiosités de l’histoire de l’Aberri Eguna, citons la diversité des forces politiques ayant participé à la célébration. Dans les années préalables à la réforme du franquisme, l’effervescence politique était à son comble, et l’autodétermination était une revendication omniprésente au sein des formations politiques de gauche, même chez celle d’obédience espagnole. C’est ainsi qu’en 1976, des formations comme la Ligue Communiste Révolutionnaire, le MCE ou l’Organisation Révolutionnaire des Travailleurs, qui faisait prévaloir les revendications sociales par rapport aux aspects nationaux, étaient présentes. En 1979, c ?était Txiki Benegas, membre connu du PSOE, qui portait la banderole réclamant l’autodétermination (notons à cet égard combien les personnes et les organisations peuvent changer avec le temps !).

L’Aberri Eguna 2008

Cette année, comme il ne pouvait en aller autrement, la fête a été marquée par les deux stratégies en lutte au sein du nationalisme basque : l’autonomie et la souveraineté. Bien que de nombreux sigles, organisations et personnes soient présents entre ces deux pôles, la référence de chaque tendance est claire : le PNB dirige les tenants de l’autonomie, tandis que la gauche basque se réaffirme en tant que point de repère de l’indépendantisme pro-souveraineté.

La distance séparant ces deux tendances a été accentuée par les résultats des dernières élections générales. Après une défaite scandaleuse, le PNB a été envahi par la panique. En effet, il a perdu beaucoup et pourrait perdre beaucoup plus si le PSOE le dépasse de nouveau en nombre de voix en Euskal Herria. Les mauvais résultats et les noires perspectives ont aiguisé les contradictions dont le parti hégémonique est la proie. Deux tendances cohabitent en effet en son sein : ceux qui pensent qu’il faut renforcer le courant pro-souveraineté pour ne pas tourner définitivement le dos à la société basque (minoritaires), et ceux qui estiment que la légitimité et la force du parti ne provient pas de la société basque mais du gouvernement espagnol capable de leur assurer une prébende plus substantielle et des ressources accrues de gestion.

Lors de l’Aberri Eguna 2008 du PNB, à Bilbao, cette dernière tendance a montré son hégémonie. Le discours du président actuel a clairement démontré que le PNB est blessé, qu’il est sur la défensive, qu’il considère comme ennemis tous les secteurs basques qui, d’une façon ou d’une autre, défendent la souveraineté. S’entourant d’une muraille le séparant de tous ces secteurs, il a montré que l’arrogance face à son peuple devient servilité face aux pouvoirs de l’État. Réaffirmant son désir de pactiser, il a déclaré solennellement : « Ni la gauche, ni aucun autre acteur politique et social ne va nous obliger à ne pas être là où nous devons être si nous obtenons un bon accord pour l’Euskadi, même si on nous accuse de vendre le pays... Et nous annonçons à la gauche, à ELA, à EA et aux autres, que nous rejetterons tout accord avec eux ».

À l’autre pôle, le Forum de Débat National, organisme regroupant divers secteurs pro-souveraineté, a convoqué une marche plurielle qui a traversé la frontière entre Irun (sous administration espagnole) et Hendaye (sous administration française). Sous une pluie battante, la manifestation a rassemblé des milliers de personnes de différentes organisations ayant en commun une sensibilité pro-souveraineté ; l’itinéraire transfrontière constituait un argument hautement pédagogique. Le message transmis lors du meeting suivant la marche était chargé d’espoirs et d ?avenir : « Nous sommes une nation et nous possédons tous les ingrédients nécessaires pour exercer notre nationalité. Les personnes réunies ici représentent l’expression actuelle d’un peuple ayant une longue histoire derrière lui, les nouvelle voix d’une vieille revendication en défense de notre liberté. Et au-delà de tous les obstacles, nous avons décidé de poursuivre le travail de construction nationale... »

Euskal Herria, 9 avril 2008

http://www.askapena.org

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