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Ainsi, il paraît que la campagne est entrée dans le vif du sujet. (video)
Publie le dimanche 8 avril 2007 par Open-Publishingde Pierre Laurent
La preuve ? Les deux candidats prétendants à l’Élysée, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, n’hésiteraient plus à s’affronter et à se lancer des noms d’oiseaux. "Fraudeurs", dit le méchant, "menteur", rétorque la gentille. Pendant ce temps, le débat télévisé, le vrai, avec les douze candidats, attend toujours et ne verra peut-être jamais le jour.
Et la France, consternée, continue d’assister à une parodie de démocratie quand elle aspire à une confrontation de fond qui permette de dégager des solutions aux grands problèmes de notre pays.
C’est donc aux électeurs de s’emparer des termes du débat et d’examiner un à un les programmes en présence en les confrontant à leurs attentes. Car, en fin de compte, quel meilleur juge de paix pour se faire une opinion que de se mettre au clair sur la nature des propositions soumises au vote. En effet, ce n’est pas parce que certains candidats craignent de les soumettre au débat public qu’ils n’ont pas de programmes.
Bien au contraire, leur lecture permet souvent de comprendre pourquoi ils préfèrent l’esbroufe médiatique à l’explication de texte devant les citoyens. À y regarder de plus près, le petit écran de la télévision apparaîtrait pour ce qu’il est dans cette campagne : tout le contraire d’une lucarne transparente à travers laquelle on peut voir les candidats, mais plutôt une vitre sans tain derrière laquelle ils se cachent.
Il n’y a qu’à lire le programme de Nicolas Sarkozy pour voir qu’il n’a pas changé et que son programme est bel et bien un « copié-collé » des propositions du MEDEF, du « contrat unique », avec droits sociaux revus à la baisse, à la mise en cause du droit de grève, en passant par la franchise imposée sur les remboursements de santé.
Il n’y a qu’à lire le programme de Le Pen ou son entretien d’hier au journal le Monde pour savoir qu’outre sa haine raciste et anti-immigrés, il propose pour tous les Français le recul de l’âge de la retraite pour tous, la refonte libérale du Code du travail, l’assouplissement des règles de licenciement, l’allongement de la durée du travail pour, je cite, ne pas aligner les Français « sur les instituteurs qui vivent en savates avec un blue-jean dégueulasse en travaillant le moins possible ».
Il n’y a qu’à lire le programme de François Bayrou pour mesurer le gouffre qui sépare la « réconciliation », qu’il prétend incarner, de la violence antisociale de ses propositions, toutes construites autour d’un dogme anti-État et anti-dépenses publiques. Ce n’est pas un hasard, mais justement tout un programme, si le candidat UDF, interrogé hier sur la proposition de « service public de la petite enfance », a répondu qu’il était « contre la création d’un service public de plus », et qu’il s’agissait là « d’une idée d’un autre temps, irréaliste et fallacieuse ».
Faire la clarté sur les programmes de droite et d’extrême droite est une condition nécessaire mais pas suffisante pour la victoire de la gauche. Car la mise au clair des propositions à gauche est elle aussi indispensable à la réussite. Il n’y a qu’à lire le programme de Ségolène Royal pour se convaincre que, face à cette droite arrogante et dangereuse, il n’est pas à la hauteur et qu’il risque de reproduire les mêmes échecs. Ainsi, la récente proposition de « contrat première chance » rappelle de mauvais souvenirs et il n’est pas étonnant que le responsable de l’UNEF s’alarme que l’on puisse « nourrir l’idée qu’il peut y avoir un CPE de gauche ».
Il n’y a qu’à lire le programme de Marie-George Buffet, pour constater qu’une autre voie est possible à gauche, et que lui donner du poids dans les urnes, c’est peut-être le seul moyen de la remettre sur les rails sans renvoyer cet objectif aux calendes grecques.
Est-il encore temps de sortir de la « Politique Academy », dénoncée aujourd’hui dans nos colonnes par les membres du groupe marseillais IAM, et de voter librement en comparant les programmes pour ce qu’ils sont réellement ? Soyons en convaincus : des millions d’électeurs aspirent assurément à cela.
http://www.humanite.presse.fr/journal/2007-04-06/2007-04-06-849160