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Antilibéraux : à la recherche du consensus perdu ?

Publie le vendredi 3 novembre 2006 par Open-Publishing

Après les mobilisations contre la constitution européenne, les antilibéraux ne jurent que par l’unité. Et annoncent une recomposition politique inédite à gauche depuis le Front Populaire. Ils y croient, mais faut-il y croire avec eux ?

Le Parti socialiste est inquiet. Les collectifs antilibéraux qui regroupent des militants de la gauche de la gauche affichent clairement leur ambition dans un document programme issu de la réunion nationale des collectifs qui s’est tenu à Nanterre à la mi-octobre. Intitulé « Ce que nous voulons » ce manifeste unitaire appelle à « rendre majoritaire une alternative antilibérale fondée sur le soutien et la mobilisation populaire ». En clair : battre le PS au premier tour puis transformer l’essai aux législatives. Haro sur le vote utile ! Les antilibéraux ne sont pas le Parti radical gauche qui s’est désisté contre quelques circonscriptions réservées. Le spectre de cette armée de l’ombre, qui avait ferraillé sur les marchés, dans les MJC, dans les quartiers contre le projet de constitution européenne ressurgit. Forts de leurs 700 collectifs, ils annoncent 25 000 militants. Des communistes, des trotskistes, des écologistes, des républicains et même des socialistes tendance Mélenchon qui préparent un carré d’as unitaire pour « changer la donne ». Leur slogan : « non à l’alternance, oui à l’alternative » pourrait faire mouche. Au moment où les médias mettent en scène le choc des ambitions socialistes.

Mais quelle société veulent-ils ? Etablir un nouveau communisme où renforcer les compensations sociales dans le cadre d’un système capitaliste ? « Nous ne sommes pas dans une bataille dogmatique, nous souhaitons restaurer les protections sociales, lutter contre l’ultralibéralisme et instaurer une 6ème République » répond Francine Bavay, conseillère Vert en Ile de France. Une centaine de propositions, qui puisent leur inspiration dans les ouvrages de la Fondation Copernic et les amendements des collectifs locaux promettent le Smic à 1500 euros brut immédiatement, un strict encadrement de la sous-traitance, l’établissement du CDI comme unique contrat de travail et la mise en place de référendums d’initiatives populaires. Parmi cette centaine de mesures, une dizaine de points ont fait l’objet d’âpres discussions. L’abandon du nucléaire a heurté bon nombre de militants communistes. Des républicains du Mouvement pour une alternative républicaine et sociale (Mars) se sont opposés à l’inscription du droit de vote des résidents étrangers, préférant lier la citoyenneté à la nationalité. En attendant le double consensus, celui des partis et des collectifs, les mesures litigieuses sont placées entre parenthèses où appelées à être tranchées par référendum.

Comment désigner un candidat ? « Nous avons fait le plus dur il nous reste à faire le plus difficile... » plaisante Anne Tiraillon, responsable départementale des collectifs isérois. La proposition de José Bové, qui consistait à faire voter les militants des collectifs antilibéraux contre une cotisation de quelques euros a été rejetée. « Un vote risquerait d’affaiblir la dynamique unitaire explique Claude Debons, porte-parole national des collectifs unitaires. Nous privilégions le double consensus qui a bien fonctionné pour l’établissement du programme ». Un double consensus qui mettrait d’accord les partis qui composent la mouvance et les collectifs locaux qui regroupent des militants de la LCR, du PCF, du Parti des Travailleurs, des syndicalistes et des altermondialistes. Actuellement, les collectifs locaux commencent à discuter du candidat puis devront trancher, en préférant la discussion au vote parmi cinq candidats. Dont trois communistes ou apparentés : Marie-Georges Buffet, Patrick Braouezec et Clémentine Autain. Yves Salesse le président de la Fondation Copernic et José Bové le porte-parole de la Confédération paysanne sont aussi en lice. Le 10 décembre en Ile-de-France, les organisations et les collectifs devont se mettre d’accord sur un nom.

Avec le PCF ou autour du PCF ? Mais déjà, derrière le slogan du « double consensus » se profilent des divergences inévitables. Les trotskistes, minoritaires au sein de la direction de la LCR qui se place comme « observatrice » rejoints par les environnementalistes voient d’un mauvais œil la candidature de Marie-Georges Buffet « du fait de son statut de première secrétaire du PCF » explique Christian Picquet. Olivier Darguioles, membre du PCF et porte-parole a déjà trouvé la parade : « si Marie-Georges Buffet est choisie, elle démissionnera de son poste de premier secrétaire pour mieux porter le projet ». Il contre-attaque en pointant l’inconvénient « d’une personne en dehors des partis qui risquerait de jouer l’homme providentiel ». Et si une candidature hors parti était impossible ? Claude Debons croit à la dissuasion : « Bien sûr, on peut avoir des tendances suicidaires, mais l’instinct de conservation existe, même pour les organisations. Ils paieraient très cher un échec. Les partis feraient un score de témoignage et casser la dynamique unitaire provoquerait une crise interne ». Il est vrai qu’aux législatives de 2002, moins de deux mois après le 21 avril, les listes emmenées par Olivier Besancenot et Robert Hue avaient fait respectivement moins de 2% et 5%. Le vote utile a la dent dure.