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Antisionisme ou antisémitisme ? Réponses à Ilan GREILSAMMER

Publie le dimanche 29 octobre 2006 par Open-Publishing
3 commentaires

(Article originellement paru sur revoltes.free.fr)

Dans Libération du mercredi 24 septembre 2003, Ilan GREILSAMMER, professeur de sciences politiques à l’université Bar-Ilan de Tel-Aviv, a publié un article fort intéressant, intitulé "La pente savonneuse de l’antisémitisme", sous forme d’une sorte de guide, de "FAQ", pour distinguer l’antisionisme légitime de l’antisémitisme. La reproduction de cet article étant interdite, nous ne pouvons hélas le publier ici dans son intégralité, mais vous pouvez le lire ici.

Ilan GREILSAMMER convient que "pour beaucoup de Juifs, toute critique à l’égard de la politique du gouvernement israélien, même la plus timide remarque, constitue de l’antisémitisme".

 "Cette accusation, qui tient du « Sésame ouvre-toi », est d’autant plus grotesque que c’est toute la gauche israélienne, toute la population modérée et libérale d’Israël qui critiquent amèrement le gouvernement Sharon, dans des termes souvent beaucoup plus violents qu’à l’étranger. Combien de fois me suis-je fait huer ou agresser verbalement dans la communauté, quand j’exprimais ma détresse face à la nullité absolue de mes gouvernants ?"

Ilan GREILSAMMER, s’inquiétant du renouveau de l’antisémitisme en France expose ensuite 11 "vérités premières" permettant, selon lui de distinguer l’antisionisme de l’antisémitisme. Ce sont ces 11 "vérités premières" que nous désirons contester, ou approuver.

1) "Il y a antisémitisme lorsqu’on est prêt à lutter pour l’indépendance nationale de n’importe quel peuple d’Europe, d’Asie ou d’Afrique, mais qu’on nie à un seul peuple au monde, le peuple juif, d’avoir son mouvement de libération nationale, le sionisme, et son Etat, l’Etat d’Israël."

Faux ! Ce qui est vrai, c’est que tout point de vue qui traiterait différement le nationalisme juif des autres nationalismes relèverait, elle, à l’évidence de l’antisémitisme. La judéïté relève de trois sphères : religieuse, communautaire, et culturelle.

En ce qui concerne la sphère religieuse, il n’y a pas de raison légitime de traiter différement les velleîtés d’établir des théocraties pour les sionistes d’israêl que pour les intégristes d’Iran ou les talibans Afghans. Les libres penseurs, les athées, et les anti-cléricaux ont parfaitement le droit de penser qu’un état doit être laïc.

En ce qui concerne la communauté Juive, nul ne peut faire abstraction de l’horreur de la Shoah, paroxisme de siècles de persécutions, en particulier en Europe. L’aspiration de la communauté juive à vivre libre, à se protéger, et à se défendre est donc tout à fait légitime, et doit être défendu sans faiblesse, partout dans le monde. Ce qui ne l’est pas, c’est de considérer que l’état d’Israêl relève de cette légitimité. D’abord parce que si l’on remonte 2000 ans en arrière pour assoir la légitimité des états, aucun des états actuel n’est légitime ! Selon ce principe, on pourrait de même défendre l’idée de faire de la France un état Gaulois, de l’Espagne un état arabo-andalou, et des états-unis un état Indien ! Ensuite parce que, que l’on soit d’accord ou non, il est tout à fait légitime de considérer Israël comme un oppresseur, un colonisateur, et non comme un "mouvement de libération nationale". Il existe bien en Palestine occupée en mouvement de libération nationale : celui du peuple Palestinien, un peuple Sémite, lui aussi.
Historiquement, les nationalismes ont toujours fait le lit du fascisme. En France, les idéologies nationalistes sont l’apanage quasi-exclusif des nostalgiques du nazisme. Pourquoi traiterait t’on le nationalisme sioniste différement des autres des autres idéologies non démocratiques ?

Enfin, sur le plan culturel, la judéïté se caractérise par une grande richesse, une grande diversité. Askénazes, Séfarades, Juifs Africains, ont chacun leur(s) culture(s), leur histoire, et leurs opinions : il n’existe pas d’unicité culturelle juive. Et encore moins de culture nationale commune, avant 1948.

2) "Il y a antisémitisme lorsqu’on nie ou qu’on cherche à occulter les liens historiques, culturels, nationaux du peuple juif avec cette terre de Palestine/Israël, et qu’on essaie de faire passer le retour des Juifs sur ce territoire comme du colonialisme pur et simple."

Faux ! La première partie de la phrase est en partie vraie : le lien religieux historique des juifs avec la Judée est au coeur du judaïsme. mais ça ne justifie en rien la deuxième partie de la phrase ! Les territoires bibliques de Judée et de Samarie ont étés successivement occupés par les Philistins, les Juifs, les Ottomans, et les Chrétiens ! Jérusalem, ville sacrée pour les trois monothéïsmes, reflète cette histoire tourmentée. Quelle occupation peut donc prétendre être la seule occupation légitime ?

3) "Il y a antisémitisme lorsqu’on feint d’ignorer que l’objectif des mouvements islamistes palestiniens, Hamas et Jihad, est de tuer le maximum de Juifs en tant que Juifs, pas en tant qu’Israéliens, et qu’on s’abstient de dénoncer ces organisations comme ce qu’elles sont : des organisations fondamentalement et essentiellement antisémites."

Faux ! L’islamisme est une (mauvaise) réponse (parce que) religieuse à une occupation de leur nation basée sur une autre "légitimité" religieuse. Longtemps, la résistance Palestienienne a été laïque. Or, les organisations de libération nationale laïques ont étés violement attaquées par Israël, qui dans le même temps a établi des contacts avec les islamistes, afin de casser l’unité du mouvement Palestinien de libération nationale. Un peu comme les états-unis ont longtemps financés les talibans pour leur anticommunisme.
Ceci dit, l’islamisme est lui aussi un obscurantisme religieux, tout aussi inquiétant que le sionisme ! Et son terrorisme "du pauvre" n’a pas plus de légitimité que le terrorisme d’état israëlien, même s’il fait 10 fois moins de victimes. mais il n’en reste pas moins que le mouvement de libération national Palestinien a toujours su se préserver de l’antisémitisme : ce qui est en cause, c’est le sionisme, la colonisation, l’occupation, la spoliation. Pas la judéïté. Même si dans un conflit aussi long, des haines tenaces se sont accumulées, celles-ci ne sont pas d’essence antisémites a priori.

4) "Il y a antisémitisme quand on ne dit pas un mot du style et du contenu de la propagande palestinienne, des caricatures à la Stürmer, ou encore du feuilleton antijuif (Cavalier sans cheval) que l’Egypte a fait passer durant des semaines, ou encore des téléfilms montrant Sharon comme un vampire assoiffé du sang des enfants palestiniens"

Faux ! Dans cette guerre qui dure depuis 60 ans, il ne serait pas objectif de monter en épingle la seule propagande de guerre palestinienne, sans effectuer un travail identique sur la propagande de guerre israëlienne. Par exemple, selon cette dernière, "les enfants palestiniens préfèrent la mort à la vie" (elle traduit ainsi "profession de foi islamique" ("Shahadah"), par "désir de mort"). Il est vrai (et bien sûr regretable) qu’il existe des dérive antisémites dans la propagande paelstinienne, mais un simple surf sur les sites Internet des deux camps permet de constater que celle-ci est en génréal bien plus mesurée que la propagande raciste que l’on trouve à foison sur les sites de propagande israëliens.

5) "Il y a antisémitisme lorsqu’on décrit les soldats de Tsahal comme des SS, lorsqu’on prétend (comme il n’y a pas si longtemps) que les soldats israéliens violent des Palestiniennes, quand on décrit la situation des Palestiniens prisonniers du Mur de séparation comme équivalent à un camp de concentration nazi."

Faux ! Ce qui est vrai, c’est que la barbarie de Tsahal, depuis soixante ans, reste sans commune mesure avec l’horreur absolue de la barbarie nazi. Israël a une politique d’apartheid, mais pas d’extermination. Et la Palestine occupée ressemble à un ghetto, pas à camp de concentration. Rien n’empêche de comparer les deux, mais en ayant l’honnêteté de faire ressortir les différences de nature et d’échelle de barbarie entre ces deux idéologies. Assimiler le sionisme au fascisme reste donc une diabiolisation excessive. Mais cette diabolisation du sionisme ne relève pas nécessairement de l’antisémitisme : il n’y a antisémitisme que si et seulement si TOUS les juifs sont visés. Sinon, on est certes dans l’excès de langage extrême, dans la comparaison abusive, mais pas antisémite.

6) "Il y a antisémitisme quand on considère que les seuls « bons » Juifs israéliens, ceux que l’on est prêt à inviter et à fréquenter, et à faire parler sur les campus, sont les Juifs anti-israéliens dont la seule occupation est de dire du mal de leur peuple et de leur pays."

Faux ! Et très démagogique : tous les sionistes ne sont pas juifs, tous les antisionistes ne sont pas antisémites (l’immense majorité ne l’est pas, et nombre d’entre eux sont juifs). Il n’est pas moins légitime de boycotter les intellectuels sionistes que de boycotter les dirigeants d’Afrique du Sud au temps de l’apartheid. Mais tout comme les dirigeants de l’apartheid étaient visés en tant que racistes, et non en tant que blancs, les sionistes sont l’objet d’opprobre en tant que nationalistes, colons, et oppresseurs, pas en tant que Juifs.

7) "Il y a antisémitisme quand les journalistes que l’on accuse de trop aimer Israël et de ne pas être assez critiques à son égard sont, comme par hasard, des Juifs, quand les intellectuels que l’on accuse de néoconservatisme et de partialité en faveur d’Israël sont eux aussi, comme par hasard, des Juifs. Sans parler, bien sûr, des dénonciations du fameux « lobby sioniste » qui n’est autre que celui des Juifs dégoûtés des attaques portées à l’existence même d’Israël."

Faux ! Il est tout à fait légitime de critiquer le travail de journalistes qui soutiennent de leur plume un régime d’apartheid, colonialiste, qui fait la guerre depuis 60 ans pour défendre une conception théocratique de l’Etat. Il est tout à fait légitime de critiquer le néo-conservatisme, que celui-ci soit défendu par des juifs, des arabes, ou par des américains : chaque année la misère fait 60 000 000 de morts par an, soit plus que la seconde guerre mondiale fit de victimes en 7 ans !
Quand au "lobby sioniste", son existence n’est pas contestée : tout comme il existe "un lobby militaro-industriel", "un lobby intégriste chrétien". Et considérer que ce lobby sioniste "n’est autre que celui des Juifs dégoûtés des attaques portées à l’existence même d’Israël" est une opinion politique très orientée. D’autres pensent que ce lobby entretient d’étroites collusions d’intérêts avec les lobbies militaro-industriels et intégristes chrétiens dans le but de soutenir l’impérialisme états-unien de Bush et de ses amis les magnats du pétrole.
Par contre, dès lors que des listes "de juifs", en tant que juifs, sont dressées, ou que la judéïté d’un journaliste est mise devant ses opinions politiques, il y a incontestablement résurgence d’un antisémitisme nauséabond.

8) "Il y a antisémitisme quand le seul pays au monde que l’on dénonce en termes orduriers, et que l’on associe aux « crimes » de Bush en Afghanistan ou en Irak, est... Israël, et qu’Israël se retrouve accusé partout, dans toutes les manifestations de rue, quels qu’en soient leur sujet et leur but."

Vrai ! Tout ce qui stigmatise un seul pays est d’emblée douteux. Et Israël n’est pas derrière tout les mauvais coups. C’est un pays puissant, mais un petit pays. Il compte nombre de scientifiques prestigieux. Des industries puissantes. Il a incontestablement développé les régions occupées (même si celà ne justifie pas plus qu’au Maghreb de parler d’un "rôle positif de la colonisation"). Il a même, par le passé, développé une utopie "collectiviste", parfois laïque : les Kibboutz.
Bref, Israël n’est pas tout noir, les régimes arabes voisins pas tous blancs non plus. Voir "la main du Mossad" partout relève donc de l’antisémitisme, de dénonciations calomnieuses. Ne jamais la voir nulle part relève par contre au mieux d’une naîveté extrême confinant à la stupidité, et au pire de la complicité.

9) "Il y a antisémitisme quand on se scandalise - avec raison - de la tragédie des réfugiés palestiniens alors que l’exode des Juifs originaires des pays arabes est présenté totalement dénué d’intérêt."

Vrai, mais fallacieux ! Mais il faut immédiatement nuancer : Israël a colonisé la Palestine. En réaction, les pays arabes voisins lui ont déclaré la guerre, et ont pour beaucoup expulsés et poussé à l’exil leurs population juives autochtones. C’est un drame de cette guerre, une "purification ethnique". Que ceci ait eu lieu suite aux actes unilatéraux et illégimes d’Israël ne saurait constituer une quelconque justification. A ce titre, il serait tout à fait légitime qu’Israël négocie le retour de ses réfugiés juifs dans leurs pays natal en échange du retour des réfugiés palestiniens sur leurs terres natales. Ceci dit, la situation actuelle des réfugiés juifs est de loin meilleure que celle des réfugiés palestiniens : il est donc tout à fait normal d’en parler plus, en raison de la situation humanitaire d’abord, et parce qu’Israêl ne demande aucun "droit au retour" pour ses réfugiés, parce que celà ne correspond pas à ses objectifs politiques.

10) "Il y a antisémitisme quand on cherche à impliquer Israël dans le combat contre la mondialisation et la globalisation, quand Israël est le seul pays au monde vilipendé par un leader de confédération paysanne, quand Israël est pris comme point de mire d’écologistes chantres des vertus de la Terre, lorsqu’on laisse sous-entendre qu’Israël a quelque chose à voir avec les multinationales et l’oppression des pays pauvres par les pays riches."

Faux ! Tous ces points de vues relèvent d’opinions politiques. On n’est pas plus américain quand on critique Bush, qu’anti-français quand on critique Chirac, ou qu’antisémite pour le seul fait de critiquer la politique israëlienne. Et l’attaque fielleuse de ces propos contre José BOVE, non cité nommément, relève de la diffamation de bas étage. En ce qui concerne les multinationales, Israël est un pays capitaliste parmis d’autres, responsable parmis d’autres, de la misère du monde causée par la globalisation impérialiste. Pas plus. Mais pas moins !

11) "Il y a antisémitisme quand des gens de gauche et d’extrême droite se mêlent pour affirmer un souverainisme nationaliste exclusif des immigrés... tout en condamnant spécifiquement Israël sur la scène internationale."

Vrai ! Si ça existe. Sauf que je ne connais pour ma part AUCUN mouvement ou parti de gauche qui défende "un souverainisme nationaliste exclusif des immigrés". J’ai même bien peur de reconnaître dans ce propos une thématique raciste courante, caractéristique de l’extrême-droite.

Reste que des collusions, des rapprochements entre souverainistes, nationalistes prétendument "de gauche", et extrême-droite, se sont produits. Heureusement, ils sont vigoureusments dénoncés, en particuliers par des sionistes très vigilants sur tout ce qui peut leur permettre de discréditer les antisionistes solidaires du peuple palestinien. Mais il existe également des collusions entre islamistes et "sarkozysme communautariste" pour remettre en cause la séparation de l’église et de l’état, des collusions entre extrême-droite et sionistes autour d’un racisme anti-arabe abject qui rappelle la propagande nazi, et bien d’autres alliances contre-nature.

Ce fait tient à l’entrisme de l’extrême-droite, qui tente toujours de se reconstruire par tous le moyens une honorabilité à jamais perdue. C’est un piège redoutable, une menace permanente, contre laquelle les progressistes, les démocrates, les humanistes, les internationalistes, doivent plus que jamais rester très vigilant. Mais ce n’est pas parce que ce risque est bien réel qu’il faut prendre sa fourche et se mettre à courir dès qu’un sioniste crie "au loup" pour vous éloigner de ce qu’il considère illégitimement comme son poulailler !!!

Sur le second point, il n’y a rien d’antisémite à "condamner spécifiquement Israël sur la scène internationale" pour les actes condamnables commis "spécifiquement" par Israël. Ainsi en va t’il de la prolifération nucléaire, de l’occupation de la Palestine, des crimes de guerre au Liban et à Gaza, ou de l’apartheid légal visant à préserver le caractère "juif" [1] de l’état sioniste.


Bref, après une introduction rappellant fort justement l’extrême facilité qu’ont les sionistes extrêmistes (de droite) à crier "à l’antisémitisme" à la plus infime critique du sionisme, Ilan GREILSAMMER dérape ensuite complètement sur sa "pente savoneuse" en assimilant ontologiquement ces mêmes critiques à de l’antisémitisme a priori.

L’antisémitisme est pourtant une notion bien définie : c’est une haine des juifs en tant que juifs, qui vise TOUS les juifs, pour ce qu’ils SONT (ou pour ce que les antisémites prétendent qu’ils sont). Rien à voir avec une critique, même radicale, du sionisme, qui critique CERTAINS juifs, et certains "goyims" pour ce qu’ils FONT, et pour ce qu’ils écrivent.

Tout comme la judéïté ne saurait servir de prétexte à la moindre discrimination négative, elle ne saurait être instrumentalisée pour défendre une discrimination positive voulant qu’on traite les nationalismes, les extrêmismes et les racismes défendus par DES juifs différement des autres idéologies fascitoîdes à l’origine des crimes contre l’humanité.

Minga
"Parce que le vrai courage est de faire ce qui est juste"


[1Au sujet du "caractère "juif" d’israël", voir notre article : "Israël : un état juif ? Faux ! C’est un état sioniste"

Messages

  • un mot à la hâte, je suis assez d’accord avec la plupart de ces définitions...
    Il ne faut pas confondre les choix politiques et l’aversion "raciale"^même quand elle frappe une religion qu’il s’agisse du judaïsme ou de l’Islam, dont les adeptes sont désormais placés à la même enseigne... Au point que l’incroyance n’est plus ni pour les uns, ni pour les autres une manière d’échapper à cette aversion, ce qui crée une situation invivable pour les laïques, les athés...
    Sans doute est-il plus facile pour quelqu’un qui a l’expérience de cette aversion de la reconnaître et donc de ne pas la confondre avec un choix politique... Mais je pense qu’avec un peu d’exercice de la raison chacun peut y parvenir... Et je trouve que ce texte est de ce point de vue d’un bon apport.

    Danielle Bleitrach

  • Magnifique et édifiant strip-tease dégonflant point par point les affirmations péremptoires du propagandiste
    Greilsammer !
    Merci pour nous tous.
    Tzigane

  • Ce qui est vrai, c’est que la barbarie de Tsahal, depuis soixante ans, reste sans commune mesure avec l’horreur absolue de la barbarie nazi. Israël a une politique d’apartheid, mais pas d’extermination. Et la Palestine occupée ressemble à un ghetto, pas à camp de concentration.

    J’imagine que les Libanais qui ont reçu, l’été dernier, des millions de bombes dont 1,5 million à sous-munitions, des bombes incendiaires au phosphore ainsi que les Palestiniens de Gaza qui ont reçu des Dense insert metal explosive (DIME**) ou tous les petits Mohamed El Dourra délibérément assassinés par les soldats israéliens ou même les habitants des villages de Safsaf et Salha devraient se réjouir d’avoir été victimes d’une barbarie moins absolue que l’horreur de la barbarie nazie !

    C’est à cette conclusion absurde et odieuse qu’on arrive en faisant du génocide des juifs un acte unique que rien n’égale et que rien ne peut égaler.

    Bien sûr que le génocide –pas exclusivement dirigé contre les juifs d’ailleurs même s’ils en furent les principales victimes- perpétré par les nazis est abominable. Mais en fermant ce crime sur lui-même, en le rendant incomparable, non seulement on ne pourra qu’« euphémiser » et finalement banaliser les autres crimes contre l’humanité -au nombre desquels se trouvent les atrocités commises par Israël- mais on n’en tire aucune leçon pour le présent et pour l’humanité. Car puisque seuls les juifs ont été victimes de l’horreur absolue, on peut tout se permettre, rien n’égalera cette catastrophe (Shoah). Et puisque seule la Shoah est le crime absolu, nul ne peut rappeler aux Israéliens des impératifs moraux et autres droits de l’homme.

    Et c’est malheureusement la position que soutiennent les sionistes et Israël et qui a les conséquences que l’on sait. C’est ainsi que les victimes d’hier (pardon pour la généralisation) deviennent les bourreaux d’aujourd’hui.

    Bien sûr Israël n’a pas installé des chambres à gaz, mais il ne cesse, au nom des notions de « peuple élu », de « peuple éternellement persécuté » et de « droit naturel des juifs à la terre de Palestine » depuis bientôt 60 ans, d’assassiner et tourmenter les Palestiniens de multiples façons dont la brutalité et la perversion absolue ne diffèrent pas essentiellement du comportement nazi.

    Antonio

    ** DIME : Les effets de ces DIME sont plus graves que ceux des anciennes bombes en acier. Quelques centaines d’éclats sont remplacés par une nuée déchirante de particules incandescentes qui pénètrent, coupent et brûlent leurs victimes jusqu’aux os. En l’espace de quelques minutes, elles provoquent la nécrose de membres entiers, et se déposent, à la fin, à l’intérieur du corps sans possibilité d’extraction. (voir http://www.legrandsoir.info/article...)