Accueil > Augmentation du temps de travail, mode d’emploi
de Lucy Bateman
« Les 35 heures vont devenir de plus en plus virtuelles », protestait hier Maryse
Dumas, secrétaire de la CGT, en sortant du bureau du ministre délégué aux relations
du Travail, Gérard Larcher. C’est la CGT qui a ouvert la seconde série des « consultations » menées
cette semaine par le ministre auprès des syndicats et du patronat sur deux dossiers
clés : l’assouplissement des 35 heures et les restructurations. Sur le temps
de travail, les pistes du gouvernement étaient connues : il s’agit de vider les
lois Aubry de leur substance, mais uniquement en ce qui concerne la réduction
du temps de travail.
Les outils de flexibilité contenus dans les lois Aubry - modulation, annualisation - ne sont pas menacés.
Le poidS du chantage à l’emploi
Conformément à ses promesses, le gouvernement ne touchera pas à la durée légale du travail, qui n’est que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Il entend jouer sur deux leviers, afin de faire travailler les salariés plus longtemps et à moindre coût. Le premier concerne le compte épargne-temps : dans la foulée de la loi Fillon sur le temps de travail, qui en avait déjà « monétarisé » une partie, le gouvernement souhaite carrément transformer ces jours de congé ou de RTT économisés en épargne-retraite. Le second levier, ce sont les heures supplémentaires. Le gouvernement n’a pas précisé hier s’il entendait, comme le soupçonnent les syndicats, faire passer de 25 à 10 % leur taux de rémunération.
La loi Fillon le permettait déjà par voie d’accord, l’idée serait de l’étendre à toutes les entreprises. En revanche, le ministre confirme sa volonté de mutualiser le contingent d’heures supplémentaires au niveau de l’entreprise, et d’aller au-delà des 180 heures prévues aujourd’hui par salarié -, le MEDEF est favorable à un contingent d’heures supplémentaires de 220, voire 240 heures. « On sait qu’avec le chantage à l’emploi les salariés risquent d’être contraints à des durées très longues », indique Maryse Dumas, qui résume : « Il y a une volonté affirmée du gouvernement de parvenir par tous les moyens à un allongement de la durée effective du travail de ceux qui travaillent, en écartant ceux qui sont en sous-emploi ou au chômage. »
Rendre plus rapides les licenciements
Le second volet des discussions concerne les restructurations, et la suite législative que le gouvernement veut donner à l’échec des négociations sur ce thème entre syndicats et patronat. Le gouvernement veut abroger le volet « licenciements » de la loi de modernisation sociale, qui n’est pour l’instant que suspendu jusqu’à début janvier 2005. La volonté du ministre est connue : rendre plus rapides les procédures de licenciement collectif et « sécuriser » les accords et les plans sociaux, c’est-à-dire limiter au minimum le contrôle du juge sur ces procédures.
Des « accords de méthode » permettraient, comme l’explique Francine Blanche, membre de la délégation CGT, « à l’employeur d’arriver à ses fins en sachant quand ». En contrepartie, le ministre promet d’améliorer le reclassement des salariés des PME, « mais sans aucune obligation de moyens », déplore la CGT. La confédération demande au gouvernement d’améliorer le droit d’intervention des salariés dans la gestion des entreprises.
Sur le temps de travail, le régime dérogatoire des heures supplémentaires pour les petites entreprises arrive à échéance fin décembre 2005. Ce dossier sera suivi de près par le premier ministre Raffarin, qui rencontrera les syndicats la semaine prochaine sur la question. Sur les licenciements, le gouvernement veut un projet de loi au plus tard le 3 janvier 2005. « La CGT compte bien être force de propositions sur ce projet de loi », promet Maryse Dumas. Les syndicats envisagent de se retrouver à l’issue de leurs rencontres avec M. Larcher.
http://www.humanite.presse.fr/journal/2004-10-06/2004-10-06-401877