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Chroniques citoyennes (9) : Le marché

Publie le jeudi 12 avril 2007 par Open-Publishing

Le marché est, au choix, un lieu ou un concept extraordinaire. Au premier abord, il symbolise les échanges entre les hommes depuis des siècles et des siècles* et de ce fait installe cette liberté de vendre et d’acheter si chère à nos économistes qui en ont fait un espace virtuel propice à tous les coups fourrés, les astuces pour devenir riche et surtout qui l’ont érigé en dogme pour satisfaire leurs pulsions d’asservissement de la majorité d’entre nous. Le « marché est pittoresque », lit-on au détour d’un dépliant touristique et le pittoresque vantant les mérites de tel village, ou de telle contrée…. Bientôt, dans notre société si éprise d’argent roi, nous trouverons la même description pour une visite hautement touristique de la bourse de Londres, de Paris ou de Frankfort.

Pour ma part, j’aime bien le marché de ma ville, il est la respiration de la population qui la compose. Il est parfois morne les jours pluvieux, les lendemains de catastrophes, les fins de mois ; parfois il est pimpant et riant aux journées printanières, toujours vivant, chargé de couleurs, d’accents versatiles ou joyeux dans une foule sans cesse renouvelée dans laquelle s’immiscent curieux et touristes d’un jour portés par les odeurs, par la diversité des étals. Comment voulez-vous comparer ce marché, notre marché avec ceux là même qui spéculent d’un simple clic sur le clavier de leur ordinateur ?

La comparaison n’a pas lieu d’être entre ses requins de la finance et cette dame à qui je prends depuis longtemps déjà une à deux salades le dimanche, et cet autre qui a toujours le bouquet de persil qui me manque été comme hiver, à cette troisième dont les œufs sont toujours du jour. D’un côté il y a le bon sens et la réalité quotidienne qui se joue et se dénoue dans tous ces groupes d’hommes et de femmes qui discutent à l’angle des allées et de l’autre il n’y a que la froideur des chiffres et des statistiques qui ne font plaisir qu’à ceux qui les comprennent, qui ne désespèrent que ceux qui en bout de course sont les petites mains des prochaines délocalisations.

Le marché est presque symbolique de notre société car il en est le reflet, le thermomètre permanent avec ses commerçants ou paysans qui en pliant leurs stands peuvent vous dire si les affaires ont été bonnes, si la conjoncture a permis de rassasier toutes ses bouches à nourrir, si chacun a trouvé son content de bonnes choses… Et dans le cas contraire, parions que les commentaires porteront sur les difficultés du moment, les craintes en un avenir tout à coup moins réjouissant. J’aime me promener dans ce marché là, pour oublier l’autre, celui qui nous oppresse et porte sur nous l’hypothèque de l’avenir. J’aime me fondre dans la foule de parasols en tonnelles pour entendre, écouter, surprendre parfois ce que disent les gens, le peuple de ma ville et m’imprégner de ce brouhaha, et tenter de comprendre où va le monde.

Car de cette proximité, je me ressource et imagine comment serait notre vie, comment se construirait notre futur si, à la destinée de notre planète, il n’y avait que ce marché là… Chaque dimanche !

* une définition instructive donnée sur l’encyclopédie interactive et gratuite http://fr.wikipedia.org/wiki/Marché

Le 8 avril 2007
Démocrite