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Consensus fastoche

Publie le mercredi 19 décembre 2007 par Open-Publishing

L’invité de la semaine du journal l’Humanité
 http://www.humanite.fr/2007-12-18_T...

Arezki Metref

Journaliste et écrivain algérien vivant en France
Consensus fastoche

On l’a échappé belle ? Kadhafi est resté en France cinq jours au lieu des dix qu’il aurait souhaités. Privés de la moitié du cirque. Remboursez ! Il faut être fermé au monde pour ignorer que le « Guide » est un pétro-dictateur mégalo, irascible. C’est un fossile des années soixante-dix, ce temps du monde où on pensait que le renversement de la monarchie vermoulue des Senoussi par un jeune nassérien allait dans le sens de la révolution.

Au fil du temps, le jeune révolutionnaire s’avère un névrosé du pouvoir, qui guide son pays à la matraque. « L’agité du bocal », pour reprendre le mot de Céline, à l’étroit dans sa Libye, se met à ses moments perdus à fomenter des coups pendables contre ses voisins qu’il n’arrivait pas à séduire par les pétrodollars. Combien de tentatives d’unification n’a-t-il pas essayé avec la Tunisie, l’Algérie, etc. ? Combien de coups n’a-t-il pas tentés contre ces mêmes pays et d’autres ? C’est à ce despote sans pitié, sanguinaire, que Nicolas Sarkozy est allé demander de venir planter sa tente dans le jardin des droits de l’homme. Absous par son hôte élyséen, il aurait renoncé au terrorisme, a libéré les infirmières bulgares, commencé à articuler, sous le contrôle d’orthophonistes francs du collier, son babil démocratique. Un petit effort, quelques petits contrats encore et il sera totalement sortable, le « Guide » !

La leçon de la visite de Kadhafi en France claque en deux volets. Le premier, c’est l’administration de la preuve à Nicolas Sarkozy que, quand on fait dans le culot, on trouve son maître. Culot de justifier les caprices d’un signataire d’un contrat de 10 milliards d’euros par les soi-disant signes de démocratisation, perceptibles ici et là ? À ce culot du tonnerre, Kadhafi répond en faisant plus fort. Il nie avec aplomb avoir été interpellé sur les droits de l’homme, parle des banlieues comme d’un territoire où l’étendard des droits de l’homme est en berne. Culot aussi dans le show médiatique dans lequel, avec son hôte qui s’y connaît, ils se disputent la vedette. Le numéro de Kadhafi est cependant mieux rôdé. Ray Ban, « girls band », la tente de Bédouin au milieu de Paris et, sous le bras, invisible, le livre fondateur des États-Unis d’Afrique dont il est forcément le chef.

Le beau consensus à gauche et au centre contre la venue du tyran en France aurait gagné à se réaliser, ma foi, contre la détérioration du pouvoir d’achat, la flambée des prix, la politique ouvertement antisociale du gouvernement. C’est la deuxième leçon du volet : des consensus qui se perdent !

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Commentaire du lecteur qui vient de poster ce billet : Bien vu, camarade !