Accueil > Contre les radars sur les feux rouges
INTERVENTION DE CEDRIC MAISSE, conseiller municipal communiste à Amiens :
Le contrôle automatisé pose bien plus de problèmes que l’on croit. On s’appuie sur un faux consensus pour faire admettre des décisions lourdes de sens et de conséquences :
Au niveau pratique et juridique :
1) la photo prise par l’automate se fera sur l’arrière du véhicule. Comment prouver qui conduit au moment de l’infraction ? Ce genre de questions vient de plus en plus encombré les tribunaux. La perte de points, et donc à terme, du permis de conduire, peut compromettre l’avenir professionnel de beaucoup de monde. C’est pourquoi de plus en plus de gens conduisent sans permis. C’est l’échec du tout-répressif.
2) On a entendu sur France-inter le 5 octobre 2010 le cas d’une automobiliste qui a été flashée parce qu’elle avait franchi le feu rouge pour laisser passer les pompiers. Elle a voulu faire appel de la sanction. C’est impossible. Il faut payer avant toute démarche ! L’administration lui a même dit qu’elle n’avait plus à céder sa place aux pompiers si elle ne voulait plus être sanctionnée.
Pourquoi met-on partout des radars ?
D’abord pour en faire des pompes à finances. On utilise le code de la route pour remplir les caisses de l’Etat. Il faut sanctionner les chauffards c’est sûr mais il faut le faire avec discernement. Or ce discernement est perdu dès qu’il s’agit de remplir les caisses. On s’en aperçoit aussi avec l’instauration du stationnement payant à Sainte Anne.
De plus les automates permettent d’appliquer la RGPP, la révision générale des politiques publiques. On a pu lire dans le Courrier Picard du 7 octobre 2010 le témoignage du gendarme Jean-Hugues Matelly qui faisait le constat de la réduction des moyens dans la police et la gendarmerie. On supprime des postes de fonctionnaires et cela aboutit à éloigner le citoyen de la police. Les automates permettent de supprimer des postes.
Ensuite pour garantir la sécurité. Le gouvernement actuel s’inscrit dans la volonté de créer un système permanent d’enregistrement. Ce système est une sorte de contre-utopie décrit par le philosophe Michel Foucault : surveiller et punir. Le but d’un Etat qui se veut autoritaire est de tout voir, tout enregistrer. C’est impossible, il y a toujours des failles. Tout le monde le sait mais peu importe il faut atteindre ce but impossible. Ainsi on nous a dit en commission que le produit des amendes sera affecté à la mise en place de caméras de video-surveillance. Le système nourrit le système...
On sait que c’est inefficace. La répression fonctionne mais sur un temps donné. Ensuite elle incite les automobilistes à trouver des failles. Ainsi certains prennent des voitures immatriculées à l’étranger pour échapper à toute sanction. D’autres prennent le risque de conduire sans permis. Le remède rend le mal plus important.
Il s’agit de voir aussi les implications philosophiques. Le tout répressif infantilise l’automobiliste. Il le rend irresponsable. Le gauche fonde sa démarche politique sur l’humanisme. Or que disent les humanistes ? Que le progrès se fonde sur l’éducation, c’est-à-dire la prévention et l’explication. On respecte le code de la route pour sa sécurité à soi et celle des autres et non parce qu’on a peur de la sanction. La peur, c’est régressif.
Donc il faut conserver une dimension humaine. Un agent est là pour constater la faute. Il est plus difficile de le contester au contraire d’un automate. Il est là pour constater, adapter son jugement à la situation et expliquer. Mettre des machines partout déshumanise la société.
Le progrès serait de faire changer les mentalités. Aux Pays-bas, dans une petite ville, ils ont réussi à retirer les panneaux de signalisation car les automobilistes étaient assez matures pour comprendre par eux-mêmes qu’il faut respecter les autres usagers de la voie publique. Ce n’est pas en installant des automates partout que l’on atteindra ce résultat.
Cela habitue plutôt les gens à être constamment surveillés, ce qui est contraire à tout sentiment de liberté. Pour toutes ces raisons mais surtout par défense des libertés individuelles nous votons contre cette délibération.
CONTRE : 3 (F. Debeauvais, M.-H. Loew et C. Maisse)
ABSTENTION : 1 (P. Joan)