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Cuba serait-elle tentée par la voie économique chinoise ?
de Luc Torreele
Cuba cherche à doper son économie, le gouvernement cubain en est convaincu, il faut absolument trouver un moyen d’améliorer le rendement économique de l’île si l’on veut conserver le système social actuel et le faire perdurer. Une politique économique solide et dynamique sans coûts inutiles ni gaspillages doit former la base d’une gestion qui permettra d’améliorer le niveau de vie des Cubains.
Les dirigeants cubains misent pour ce faire sur une meilleure efficacité des systèmes de production ainsi que sur une amélioration des ratios entre le nombre de travailleurs productifs et les cadres

Il faut savoir que l’économie cubaine a été rudement touchée par les retombées de la crise économique mondiale ainsi que par les conséquences des ouragans de 2008 ; un des premier secteur touché est d’ailleurs celui du tourisme, ce qui signifie beaucoup moins de rentrées de devises. Pourtant une solution simple existe pour pallier à cette problématique : il suffirait que le Président des Etats-Unis Barak Obama, assouplisse enfin le blocus injuste qui gangrène depuis un demi-siècle le bien-être des Cubains, pour que les citoyens Américains puissent à nouveau voyager vers Cuba et y passer des vacances et donc y dépenser des dollars, boostant ainsi de manière exponentielle le secteur touristique de l’île, surtout que l’on constate également ces derniers mois une nette augmentation du tourisme chinois qui a découvert les charmes de l’île.
Deuxième secteur à pâtir de la crise, c’est l’export, ainsi le prix du nickel, première exportation de Cuba, a fortement baissé sur les marchés internationaux. Deuxième en ligne, la production de sucre : non seulement les prix ont baissés, mais de plus les quotas de production n’ont pas été atteints durant les six premiers mois de 2010, à cause de fautes de gestion mais également suite à la sécheresse qui sévit dans le centre et l’ouest du pays.
Les dégâts provoqués par les ouragans à répétition sont estimés à 3,5 milliards d’euros (soit 20% du PNB). Plus de 400.000 habitations furent touchées dont 63.000 complètement détruites, ce qui représente plus de 200.000 sans-abris. Réparer et reconstruire ces habitations a été considéré comme la priorité du régime et les résultats sont visibles, même si toutes les traces du passage des ouragans ne sont pas encore effacées, la réparation des habitations est en bonne voie d’achèvement. Il faut savoir à ce propos qu’à Cuba, 85% des habitants sont propriétaires de leurs habitations mais que c’est l’Etat qui se charge de l’entretien et des réparations. Les Cubains ont profité de ces travaux de grande envergure pour moderniser également les infrastructures de distribution d’électricité, ce qui a permis de juguler le phénomène bien connu des pannes de courant à répétition.
Le transport inter cités, le transport scolaire et le transport des ouvriers vers les chantiers et les usines se sont grandement améliorés, grâce à de nombreux bus livrés par la Chine et que l’on remarque maintenant en grande majorité sur le réseau routier cubain. Réseau routier dont hélas, l’état est encore catastrophique.
Un communiqué du syndicat Central de Trabajadores de Cuba, signale hélas, qu’étant donné la situation économique et les prévisions à cinq ans de la situation que plus de 500.000 emplois sont menacés, et que l’exécution de ces mesures de redressement de l’économie sont prévues pour le début 2011. Selon les données de ce même syndicat le nombre d’ emplois surnuméraires, atteint à l’heure actuelle le million de travailleurs.
Des alternatives ont été développées afin de reclassés ces emplois dans d’ autres secteurs, tels que la location de chambres (logement touristique chez l’habitant), la production et la vente de produits et marchandises en coopératives ou en nom propre. Des centaines de travailleurs migreront vers ces secteurs d’activités dans les prochaines années. Dans le secteur public, des projets ont été mis en place de façon à doter les postes en manque de main d’œuvre du nombre de travailleurs nécessaires, principalement dans l’agriculture, l’enseignement, le bâtiment, la police, l’industrie lourde, etc…
Il y a également de nombreux investissements de grande ampleur qui ont été réalisés dans les secteurs du pétrole, de la construction, de la biotechnologie, de l’industrie pharmaceutique et du tourisme. La production et les services d’autres secteurs sont également activement stimulés. Les autorités cubaines apportent la plus grande attention au développement des énergies renouvelables et à l’avenir écologique de Cuba, ainsi dans la région de Vinales, on construit à grande échelle des panneaux solaires, il y a également un parc de moulin à vents dans la région de Gibara, mais celui-ci a été gravement endommagé par les ouragans. Il a été décidé que la société publique Flora y Fauna, s’occuperait du reboisement de plus de 20% du territoire cubain.
Selon le syndicat CTC, une meilleure efficacité permettra également de meilleurs salaires. Le syndicat explique, que dans le cadre d’une répartition socialiste, il faut une équité pour chacun en fonction de la quantité et de la qualité du travail fourni. Ce système de salaire en fonction des résultats est déjà d’application dans les entreprises réformées et montre le chemin vers une augmentation de la production couplé à une augmentation des salaires des travailleurs. Selon le Conseil des Ministres cubain, en supprimant les emplois surnuméraires, les subsides excessifs, les gratuités inutiles et en développant une politique tendant à délester l’Etat de certaines activités, cela permettra de financer l’augmentation du bienêtre des travailleurs.
Certains pourraient penser que dans une société communiste il n’existe pas de critique, que les medias n’ont pas leurs mots à dire, surtout quand il s’agit de politique gouvernementale, et bien c’est faux ! A Cuba, par exemple le journal Granma a été très clair : « si lorsqu’il y a du travail pour une personne à un poste et qu’il y en a actuellement trois à ce même poste et si de plus ces postes sont dans le secteur non-productif, si la gestion industrielle est inefficiente et si ce ne sont pas les bonnes personnes qui sont en place des postes qu’elles occupent, comment Cuba peut-elle plus produire, offrir plus de services aux citoyens, comment peut-elle augmenter les salaires et le bienêtre de la population ?
A Cuba le régime communiste consacre un budget annuel de 1500 millions de dollars pour nourrir la population. Cet exploit est réalisé alors que seulement 50% des terres agricoles sont exploitées, il y a des endroits ou il y a plus de vigiles pour sécuriser les entrepôts que de travailleurs productifs. Tout cela est le résultat de mauvaises planifications économiques qui ont menées à un déséquilibre grandissant de l’économie cubaine, et le cadre commercial international auquel Cuba est confronté veut que le prix des importations augmentent tandis que celui des exportations est à la baisse.
Raul Castro a annoncé il y a un mois, qu’il était temps d’abandonner la gestion paternaliste du travail dans certains organismes de l’administration centrale, modèle de gestion archaïque, qui détourne les travailleurs de la notion de « travailler pour pouvoir vivre », cet abandon est une condition nécessaire à la diminution des frais non-productif causés par un salaire égalitaire garanti, à des personnes qui ne produisent pas. « Il faut définitivement abandonner l’idée que Cuba est le seul pays au monde où des citoyens puissent vivre sans travailler. » Raul Castro l’a affirmé, cette transition doit se faire en toute transparence, dans le dialogue en fournissant les informations nécessaires aux travailleurs et aux syndicats. Le principe de la disponibilité des travailleurs doit être strictement suivi en ce qui concerne l’attribution des postes de travail. Il ne saurait être question de quelque forme que ce soit, de favoritisme ou de discrimination.
Les syndicats se chargeront de certaines mesures d’accompagnement et veilleront à ce que tous les travailleurs soient intégrés dans le système réformé. Aucun travailleur ne sera abandonné à son sort. L’Etat garantit par le biais de la sécurité sociale à tous les travailleurs en incapacité de travailler des allocations leurs permettant de continuer à mener une existence digne.

Tous ces problèmes sont abordés publiquement et ouvertement, par les autorités et les syndicats, mais aussi par les comités de quartiers, ces mesures n’ont provoqués aucun choc parmi la population qui en a compris les motivations. D’énormes changements vont être opérés au sein de la société cubaine : il y a par exemple, une liste qui a été rendue publique de 178 professions qui seront accessibles pour des candidats qui veulent se lancer dans une activité en nom propre. Dans certaines d’entre elles il sera possible pour l’entrepreneur d’engager du personnel en dehors de sa famille, personnel pour lequel l’entrepreneur devra payer des impôts et des cotisations sociales.
Les Cubains ne sont pas pauvres, mais leur pouvoir d’achat est limité. Ils ne sont pas pauvres parce qu’ils bénéficient gratuitement ou presque, de différents services : enseignement, soins médicaux, culture, électricité, eau, nourriture.
La révolution Cubaine a plus de 50 ans, et plus que jamais les Cubains sont persuadés qu’il leur faut continuer à construire le socialisme en développant et en actualisant leur modèle économique tout en conservant leurs acquis.
Les Cubains savent que c’est leur unité qui est la clé de la réussite de leur Révolution et que même devant la tâche qui les attends pour les prochaines années et les réformes qui en découleront, ils resteront unis devant la difficulté.
LUCHAR CONTRA LO IMPOSIBLE Y VENCER
Messages
1. Cuba sur la voie chinoise ?, 26 novembre 2010, 21:59
Merci beaucoup de cet article, qui change des articles, haineux et caricaturaux, des medias bourgeois et capitalistes, sur Cuba.
2. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 01:35, par cop
j’espère qu’ils ne vont pas se laisser brider...
bonnes feuilles :
J’ai déjà entendu cela quelque part mais où ?
pour les impérialistes yankees , ça sera moins loin pour produire à faible coût que Shenzhen.
de quoi faire retourner d’un saut de carpe dans sa tombe Adolfo Mena González, mais auront-ils eu le choix ?
1. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 12:22, par Copas
damned !
j’ai aussi entendu cela déjà quelque part...
3. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 07:15, par Jacques-François Bonaldi
Je ne vois pas en quoi la voie que se propose Cuba est chinoise... Disons tout simplement qu’elle est cubaine, tout comme le fut, foncièrement, la "rectification des erreurs et des tendances négatives" qui avait démarré en 1986 et qui fut interrompue par la disparition de l’URSS et du camp socialiste pour plonger l’ile dans le trou et dans la Période spéciale, et qui n’avait rien à voir avec la perestroïka de Gorbatchev (et se faisait même contre elle)...
4. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 09:41
Le titre de cet article ne correspond, même sous forme interrogative, en rien à la situation cubaine !
– Cuba, 11 millions d’habitants, ne peut, en terme de force de travail ou en potentiel de consommation, se comparer à la Chine. Les capitalistes occidentaux, sauf rares exceptions, ne sont pas intéressés par une force de travail qui, de toute façon, sera plus chère (instruction, sanitaire etc..) que la chinoise. Et peut-être moins docile !
– L’embargo US entrave tout commerce, dans les deux sens, avec le principal marché de la région.
– Comme toujours depuis 50 ans, Cuba doit fonctionner soit avec des liaisons commerciale longues (Canada Europe), donc chères, soit avec des liaisons plus courtes (Amérique du sud), mais moins bien achalandées. En outre Cuba paie, toujours, la longue période "soviétique" où sa sécurité alimentaire était assurée par la mono culture de la canne qui était échangée avantageusement dans le COMECON. Déjà négligée avant la révolution, l’agriculture de subsistance doit être, quasiment, construite à partir de zéro, ce qui est à peu prés unique, au Monde, comme situation.
– Mais les pb commerciaux ne sont pas les seuls que compte l’ile. La conception même du travail, de sa valeur, et de son paiement, largement hérité du soviètisme poststalinien, faillit à l’Est, est à revisiter ; c’est ce que note , en définitive, cet article. C’est le "challenge" de Raoul, jeter l’eau sale tout en protégeant le bébé !
1. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 12:33, par Copas
ça intéressera comme destination touristique (pour les ricains) où un savoir-faire a commencé à se créer sérieusement (c’est long ça, c’est comme le savoir faire industriel, ça ne sort pas de terre d’une année sur l’autre comme des murs).
Maintenant, le tourisme peut sembler un grand attrait pour la classe populaire cubaine comme pour la direction du pays tant les taux de change sont distordus, mais le développement sous l’angle du tourisme comme principale ressource est un gros piège à cons (ça ne nourrira pas à terme une population assez nombreuse si les frontières tombent, ça crée des mentalités de serviteurs, ça pèse sur l’occupation foncière, etc).
Le développement des forces productives à Cuba a tout intérêt à être équilibré.
Par ailleurs, il convient de revenir à une analyse des rapports de force entre les classes, les diverses couches sociales, extérieures et intérieures, qui parcourent la société cubaine.
5. Cuba sur la voie chinoise ?, 27 novembre 2010, 09:42, par gb26100
L’article est intéressant. Cependant le titre ne correspond pas à son contenu.
Rien à voir avec la Chine et son productivisme.