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DES “PLANS D’ÉCONOMIES” INACCEPTABLES

Publie le dimanche 3 juin 2007 par Open-Publishing

Liberté 62 n°759 - Le 1er Juin 2007 – p.6/7 -Social

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HÔPITAUX PUBLICS

LES “PLANS D’ÉCONOMIES” À LENS ET À BÉTHUNE JUGÉS INACCEPTABLES PAR LES PERSONNELS ET LES SYNDICALISTES DE LA CGT

Par Pierre Pirierros

“Bientôt, la santé au CAC 40 !”, cette banderole apposée par la CGT au centre hospitalier de Béthune dit bien ce qu’elle veut dire. Qui privilégie quoi ? Jamais la situation n’a été aussi grave, non seulement dans les établissements du Nord/Pas-de-Calais mais aussi dans tout le pays. Tous les hôpitaux sont en déficit et cela pèse lourdement sur leur état de marche et surtout sur les patients.
Lors d’une récente rencontre avec Patrick Vanderpotte, secrétaire de la Santé CGT du Pas-de-Calais, nous avons constaté, avec lui, combien les plans d’économie sont injustes et injustifiés et qu’ils conduisent tout droit à des licenciements massifs. La dégradation dans les hôpitaux est, elle, chronique ! “Notre région demeure à la traîne et cela malgré des enveloppes que nous appelons à Béthune, “rebasage” ; notre région va mal, il est plus qu’urgent d’y remédier", poursuit le syndicaliste.
“Rebasage”, c’est à Béthune que l’action concertée des personnels a fait naître cette notion, c’est-à-dire, avoir des rallonges complémentaires, aujourd’hui, totalement vides de sens puisque la tarification à l’activité prime sur tout.

À Lens, le plan d’économies se traduit par des licenciements Ce qui se passe au Centre hospitalier de Lens est intolérable et inacceptable. Alors qu’en juin 2006, le budget de l’établissement était largement déficitaire, 16 millions d’euros, le déficit s’est accentué au cours des derniers mois. La somme de 18 millions d’euros est à souligner à la fin de l’exercice 2007. Devant cette situation, l’ARH (Agence Régionale d’Hospitalisation) et la direction du CHL ont voulu “éteindre le feu” mais en pratiquant des méthodes de pompiers pyromanes. C’est-à-dire qu’ils chargent à outrance le personnel hospitalier ; les décisions prises vont carrément à l’encontre de la bonne marche du service public et de l’accés de tous à la santé.

Ainsi, au Centre hospitalier de Lens, on apprenait, la semaine dernière, que l’intégralité du “plan d’économie” serait appliquée soit près de 500 suppressions de postes et la remise en cause des 35 heures, le directeur de l’établissement ayant les pleins pouvoirs. Le chantage à l’emploi de la direction de l’établissement est l’expression d’un mépris total envers les personnels, leurs statuts et la fonction publique hospitalière. À ce mépris envers les personnels, la direction avance le blocage des salaires, le blocage des déroulements de carrière et l’hypocrisie sur le “dialogue social”, le non remplacement des départs en retraite, le “redéploiement” de 185 postes, des gels de postes. Afin d’atténuer toute cette situation et afin que les médias “soient rassurés”, elle annonce tout de go, 17 jours de travail supplémentaire, la remise en cause des 35 heures et un partenariat intensif avec le privé.

Chaque établissement connaît un manque budgétaire évident pour 2006, cela est la résultante de l’État prévisionnel des dépenses et des recettes qui fait apparaître des dysfonctionnements pour la marche normale puisque les établissements sont obligés de solder leur passif et organisaient des reports de charges sur fonds propres.

À Lens, c’est le paroxysme. C’est une situation de crise mais les personnels n’ont pas à la subir !

À Béthune : “obligation", inique, de se serrer la ceinture

Au Centre hospitalier de Béthune, toujours la semaine dernière, l’on apprenait que l’ARH “invitait” les personnels à se serrer la ceinture avec l’obligation d’économiser un million d’euros avant fin 2007. Les réalités du terrain sont celles là ! L’hôpital public de Béthune c’est 75 % du budget résultant des activités et 25 % de recettes propres, or, cette part de 25 % a augmenté de 60 % en deux ans. Il faut à tout prix trouver des recettes propres, l’injonction est insupportable ; cette marche à suivre est dommageable pour tous, pour les patients, pour les personnels, pour les populations qui doivent trouver à l’hôpital tous les services qu’ils souhaitent trouver.

Il est inadmissible d’avoir recours au système libéral pour une mammographie, (ce service n’est plus assuré à l’hôpital de Béthune alors que le Département a lancé une grande campagne de dépistage) par exemple, ou une radiographie. Chaque établissement développe donc ses activités mais en même temps la valeur du point pour chaque activité baisse et la valeur diminue donc et conséquemment il faut encore plus d’activités.

Le patient est pénalisé directement car sur les 25 % de recettes propres, il y a le forfait hospitalier qui augmente, le prix des chambres, la restauration, le téléphone, la télévision... Ce “plan d’économies” imposé par le gouvernement ne répresente pas moins de 30 à 40 emplois (en fonction des catégories) que l’établissement ne pourra plus financer.

“C’est insupportable, observe la CGT, dans un établissement où les heures supplémentaires sont légion, où le matériel médical est à renouveler, où de grands travaux sont à réaliser, la direction impose des réductions drastiques de budget en demandant aux services d’économiser sur tout. Récemment, le conseil d’administration unanime (comité médical d’établissement, comité technique) refusait de voter le budget, c’est dire ! Et devant des centaines de personnes, Patrick Vanderpotte indiquait que les déficits de 2005 et de 2006 ne semblent pas inquiéter outre mesure la direction, comme si “le Centre hospitalier vivait au-dessus de ses moyens et dilapidait l’argent public”. “Travailler plus pour gagner plus” est une tromperie manifeste. Les personnels des hôpitaux publics ont de 150 à 300 heures supplémentaires à récupérer ; ces heures ne sont pas payées. Les budgets des établissements sont déficitaires. On nous impose des économies ! Ni le conseil d’administration, ni le syndicat CGT ne peuvent faire l’impasse sur les choix existants ; c’est, bien sûr, le maintien de l’emploi qui est prioritaire, sinon, c’est la population du Béthunois qui va trinquer et cela personne ne peut l’accepter. Il est hors de question que les personnels hospitaliers fassent les frais des réductions budgétaires alors que le président de la République vient parader à Dunkerque en annonçant une réforme, une de plus, de l’Hôpital public. Les syndicalistes sont conscients du travail à poursuivre dans leur établissement ; le projet “pharaonique” de la direction quant à une éventuelle extension de l’hôpital ne peut contenter qu’elle-même tant les retards, les atermoiements et autres volteface ont entâché un dossier très sensible eu égard aux besoins dans le Béthunois et aux avertissements récurrents des personnels. Pendant ce temps là, le privé se frotte les mains et les sociétés de gestion des cliniques privées se portent très très bien.

Réanimation, radiologie, archivages, ces secteurs sont au coeur d’une transformation radicale mais ces dossiers restent toujours des projets et la CGT entend bien faire entendre sa voix auprès du directeur de l’ARH, avec une entrevue pour définir les potentialités d’une bonne extension et ne pas laisser une direction s’enfermer dans ses illusions alors que les budgets ne le permettent pas. La CGT estime que l’entrée au conseil d’administration de l’ARH d’un élu du Conseil régional est une bonne chose.

Le syndicat CGT du Centre hospitalier de Béthune ne manque pas d’ambitions pour la santé publique, les personnels, les patients. Sa présence sur le terrain, sa prise en compte des nombreux dossiers, la bataille pour les 35 heures, sont des données appréciées par les 1200 salariés de l’établissement puisqu’ils placent ce syndicat en tête avec une nette majorité au Comité technique d’établissement, au CHSCT, au conseil d’administration.

Pas d’économies sur le dos des personnels

Il n’est pas possible de faire des économies sur le dos des Hôpitaux publics ; les produits financiers ont augmenté dans tous les établissements et réclamer l’augmentation à la Sécurité sociale est ridicule. L’assuré social, lui, n’a qu’à payer via sa mutuelle, qui très bientôt, ne pourra plus payer... Voilà, la situation actuelle. Et Patrick Vanderpotte de dénoncer la politique actuelle qui consiste à “restreindre l’offre publique des soins au profit du privé. L’action est menée dans tout le département pour condamner tout le bradage de la santé publique. C’est une action d’envergure qui y est menée pour obliger les direction à faire machine arrière. Une semaine d’actions avec une campagne de signatures a eu un véritable succès à Béthune, comme à Calais, pour la maternité, au demeurant, plus de deux mille signatures en quelques jours”.

À Saint-Venant, le budget est en déficit pour la deuxième année consécutive et au conseil d’administration, le député-maire, André Flajolet n’a pas trouvé d’autres mesures que de proposer de combler le déficit en diminuant les budgets des personnels.

À Bapaume, avec 25 % d’activités supplémentaires et malgré cela, le déficit est, pour cette année, de 400 000 euros.

À Saint-Omer (Helfaut), l’établissement disposait “d’une poire pour la soif” pour combler son déficit sinon, c’est plus de quatre millions d’euros de déficit.

À Arras, il y a un gros déficit, difficile à combler ; les conditions de travail s’aggravent de jour en jour. Le débat avec les personnels et les patients se tient évidemment à la lumière d’un contexte difficile à écarter pour apprécier des avancées éventuelles pour les salariés et pour le devenir du Service Public Hospitalier : qualité du dialogue social en baisse, dégradation historique de la situation budgétaire des établissements, vécu et conditions de travail difficiles, salaires et reconnaissance professionnelle en berne, déficit d’emplois, précarisation en augmentation, pénurie de personnels qualifiés.Donc, une crise professionnelle, budgétaire confirmée.

“L’hôpital public est en danger ! Tous ensemble, insistent les syndicalistes cégétistes, nous devons nous mobiliser pour sauver l’hôpital public en refusant les plans d’économies injustes. Exigeons des moyens pour améliorer la situation sanitaire des habitants du Nord/Pas-de-Calais”.

L’HÔPITAL PUBLIC

AVANT TOUT, UN CAPITAL HUMAIN

La première richesse des établissements de santé, médicosociaux et sociaux est le 1,8 million de femmes et d’hommes qui y travaillent. Ces professionnels ont déjà le respect de la population. Il faut dépasser les paroles pour passer aux actes, beaucoup trop d’attentes sociales restent sans réponse.

Quelques jours après l’élection présidentielle est paru au Journal Officiel un texte augmentant le nombre d’heures supplémentaires possible dans les établissements de la Fonction Publique Hospitalière.

Ce texte remet au goût du jour les 40 heures, il permet 220 heures annuelles pour : les infirmiers spécialisés, cadres de santé infirmiers, sages-femmes, sages-femmes cadres de santé, personnels d’encadrement technique et ouvriers, manipulateurs d’électroradiologie médicale. Et 180 heures annuelles pour les autres personnels (les deux tiers des personnels hospitaliers) autorisés à réaliser des heures supplémentaires payées (ce qui équivaut à environ 39 heures par semaine travaillée).Cette déréglementation des heures supplémentaires, prise de façon unilatérale par le gouvernement précédent, est la conséquence directe d’une absence de politique ambitieuse de l’emploi et de la formation dans le secteur sanitaire menée depuis plusieurs années, elle représente une attaque directe des 35 heures à l’hôpital.

Les syndicats CGT constatent que les établissements n’ont plus les moyens de faire face à leur mission. Rappelons que nous considérons qu’il manque plus de 2 milliards d’euros pour que les hôpitaux puissent remplir correctement leur mission en 2007. Par conséquent, les heures supplémentaires sont majoritairement non payées et placées sur divers comptes d’heures, dont le volume est connu du gouvernement mais dont les chiffres de l’enquête réalisée par le ministère en 2006 n’ont pas été publiés pendant la campagne présidentielle comme cela était prévu.

Notre région mérite beaucoup plus

Lors d’un déplacement de soutien aux candidats UMP aux législatives dans le Dunkerquois, le président de la République et la ministre de la Santé ont visité deux établissements de santé à grand renfort médiatique. Le Nord/Pas-de-Calais, région dont les femmes et les hommes ont payé de leur santé la contribution à l’essor économique national, mérite beaucoup plus que les déclarations d’intention générales.