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Devine qui est venu diner à Seignosse ?

Publie le dimanche 13 septembre 2009 par Open-Publishing
2 commentaires

Les propos du ministre de l’intérieur, lors de l’université des jeunes populaires, ont déjà été largement commentés, limitons-nous à une petite remarque complémentaire.

L’explication auvergnate embarrassée est contredite par l’enchaînement des échanges. Elle vient même renforcer la perception au premier degré du caractère raciste de ce qui est présenté comme une plaisanterie « Quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes. ».

Brice Hortefeux parlait bien des arabes ou supposés arabes et non des auvergnats.

Mais tout autant que les paroles du ministre, c’est l’ambiance générale qui régnait dans le groupe présent qui choque ceux qui visionnent la séquence vidéo.

Cette vidéo s’apparente à un mauvais remake du film de Stanley Kramer « Devine qui vient dîner ce soir » sorti en 1967. Sans se débarrasser d’un paternalisme de bon aloi, le film faisait la promotion des couples mixtes dans un pays qui digérait mal le jour où Rosa Park, la couturière de Montgomery, refusa de céder sa place à un blanc, dans un bus de la ville.

La fille de la famille venait présenter le jeune noir qu’elle voulait épouser à ses parents, Katherine Hepburn et Spencer Tracy. La pilule passait mal, mais la fin était d’autant plus heureuse que l’élu était médecin et non pas ouvrier dans Harlem. Hormis la couleur de sa peau, il correspondait donc parfaitement au « prototype » culturel de la famille d’accueil.

A Seignosse, l’heureux élu n’est pas noir et médecin, mais la militante UMP qui le présente au ministre et à sa famille politique, tient à préciser « Il est catholique, il mange du cochon et il boit de la bière ». D’après le journal Sud-Ouest, l’auteur de ce commentaire qui traduit une ouverture d’esprit très particulière, serait Marie Apathie secrétaire départementale de l’UMP.

Amine est donc un "spécimen" tout à fait « intégrable » contrairement à un « prototype » jugé sans doute un peu « racaille » sur les bords.

Il est tellement intégrable que la famille émerveillée, pourtant parfois plus encline à refermer les portes de ses charters qu’à ouvrir celles de ses salons, scande comme sur l’air des lampions « Amine, Amine, Amine c’est l’intégration ! »

L’une tapote gentiment la joue de l’heureux intégré.
L’autre, (selon SO toujours Marie Apathie qui décidemment doit avoir la -case de l’oncle Tom- comme livre de chevet !), donne une précision « c’est notre petit arabe ! » , entraînant ensuite la réplique ministérielle fatale.
Pour finir « Brice Hortefeux » pose une main affectueuse sur l’épaule du jeune à l’honneur.

Les adaptations cinématographiques franchissent difficilement l’Atlantique, surtout 42 ans après .« Devine qui vient diner à Seignosse » n’a plus les aspirations progressistes du premier film, il n’en reste qu’un paternalisme beaucoup moins sympathique que dans l’original.

Un jeune français est tout d’abord enfermé dans ses origines arabes supposées, pour être finalement généreusement « assimilé » par la France chrétienne, la viande de porc et la Kro..

Ce parfum de paternalisme néo-colonial ne peut qu’entretenir les stéréotypes et le racisme.

On pense alors à ce grand homme qui nous a quitté : « Aimé Césaire ». Dans un entretien qu’il avait accordé sur France culture en 1976, il avait dit « . J’ai horreur du paternalisme, des gens qui me tapent sur le dos. J’ai ça en horreur. J’ai ça en horreur et je vois très bien à quoi je pense .

Gageons que la séquence de Seignosse lui aurait inspiré le même commentaire.

http://www.mrap-landes.org/spip.php...

Messages

  • Je suis d’accord avec cette analyse. J’ai été moi aussi autant choqué par le contenu des échanges précédant la remarque d’Hortefeux que ladite remarque : "c’est notre petit arabe !", "il est catholique, il mange du porc et boit de la bière !". On aurait dit que la personne qui clamait ces stupidités voulait justifier devant Hortefeux et Copé la respectabilité de ce jeune homme.