Accueil > En Arizona, il vaut mieux faire les cochons
de MARCO D’ERAMO
Mardi 7 novembre, les étasuniens sont appelés à renouveler toute la Chambre des députés, un tiers des sénateurs, élire 27 gouverneurs et d’innombrables autres fonctionnaires : des juges, de province et d’état, des juges des diverses cours suprêmes, des shérifs, des agents du trésor, des membres de conseils universitaires.. Mais ça ne suffit pas : dans chaque état les citoyens sont appelés à se prononcer sur des myriades de référendum. Certains sont très sérieux, comme en Californie la Proposition 87, qui veut imposer l’extraction de pétrole jusqu’à fournir les 4 milliards de dollars à destination de la recherche et mise au point des sources énergétiques propres. D’autres sont le fruit du désespoir économique, comme le référendum Learn and Earn (« Apprends et gagne »), sur quoi voteront les citoyens de l’Ohio, pour autoriser l’ouverture de nouvelles maisons de jeux avec lesquelles financer le système scolaire en faillite.
En Arizona, les citoyens devront se prononcer sur divers arguments, parmi lesquels l’augmentation du salaire minimum et l’exclusion des immigrés illégaux des couvertures sanitaires et de la retraite. Mais le plus bizarre est un troisième référendum soumis aux arizoniens, sur l’élargissement des cages où sont enfermées les truies gravides : les dimensions actuelles constitueraient un acte de cruauté envers les animaux. L’argument a suscité une discussion passionnée, rapportée par le Wall Street Journal : partisans et opposants ont dépensé, de chaque bord, un million de dollars en publicité, avec spots télé tournés en cachette et études scientifiques sur la psychologie des porcs. En réalité, en Arizona, la mesure ne concernerait qu’un établissement, Pig for Farmer John, dans lequel sont élevés 140.000 animaux. Des salariés sensibles ont filmé là les souffrances des truies : en 1906 déjà, Upton Sinclair écrivait que dans les abattoirs de Chicago on pouvait entendre « le grognement de l’univers ». Mais l’aspect le plus intéressant de ce référendum vient des sondages, qui donnent 72% des habitants de l’Arizona favorables à la dilatation des cages, et 16% opposés. Jusque là rien d’étrange : signe seulement d’une délicate sensibilité d’âme. La donnée la plus bizarre est qu’un même 70% est favorable à des mesures punitives contre les clandestins. Dommage que les immigrés ne grognent pas !
Edition de vendredi 27 octobre 2006 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio