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En Libye, le contrôle du pouvoir est une affaire de famille

Publie le mardi 11 décembre 2007 par Open-Publishing

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En Libye, le contrôle du pouvoir est une affaire de famille
CLAN | 00h20 Depuis son coup d’Etat de 1969, le colonel Kadhafi s’appuie sur sa nombreuse descendance et sa tribu pour se maintenir aux affaires. Avec succès jusqu’ici.

BERNARD BRIDEL | 11 Décembre 2007 | 00h20 - 24 H quot suisse

Absence de liberté d’expression, sort peu enviable pour les migrants, prisonniers embastillés sans procès, tortures et mauvais traitements… Comme l’ont « expérimenté » les infirmières bulgares, la situation des droits de l’homme au pays du colonel Kadhafi n’est guère enviable. La plupart des ONG, Human Rights Watch en tête, confirment.

A l’heure où Nicolas Sarkozy reçoit en grande pompe et pour cinq jours le « Guide de la révolution », au pouvoir à Tripoli depuis son coup d’Etat de 1969, un petit retour sur la nature du régime libyen n’est pas sans intérêt.

« On a clairement affaire à un régime familial et tribal », explique Hasni Abidi, directeur à Genève du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam). « C’est un système fait de différents cercles concentriques, avec la famille et les favoris qui gravitent autour du colonel, un peu comme dans l’Irak de Saddam Hussein. » Même si on ne sait pas grand-chose d’eux et que le visage de certains reste inconnu, la présence des enfants de Kadhafi à des postes clés montre combien on est plus proche en Libye d’un système clanique que des standards occidentaux.

Le favori
A la tête de la Fondation Kadhafi, Seif al-Islam (littéralement « le glaive de l’Islam ») est sans doute le plus connu des rejetons de la tribu de Gaddafa, après son colonel de père. Son rôle clé dans le dédommagement des familles des victimes de Lockerbie et du Boeing d’UTA, ou encore dans la libération des infirmières bulgares, « lui a permis de se donner une stature d’homme d’ouverture sur la scène internationale », explique encore Hasni Abidi.

Mais s’il fait figure de favori à la succession de son père, Seif al-Islam n’est pas le seul prétendant. Son demi-frère aîné Mohammed est très discret, mais jouirait d’une bonne image auprès des islamistes et des traditionalistes. Grand patron des télécoms libyennes, il est à la tête d’une puissance économique formidable.

Motassim Billah, un temps écarté pour s’être compromis lors d’une tentative de coup d’Etat, est lui aussi sur les rangs. Il occupe un poste stratégique au Conseil pour la sécurité nationale.

Mais, au fond, le régime est-il aussi solide qu’on le dit ? « Difficile de répondre catégoriquement, assure Hasni Abidi. Il a ses failles, économiques, politiques, sécuritaires. Mais surtout, il donne des signes d’essoufflement. »

Des faiblesses dont pourraient essayer de profiter les deux principaux cercles d’opposants au « système Kadhafi » que sont « les islamistes et la vieille garde de la révolution », conclut le directeur du Cermam.

Sarkozy se justifie et aligne les contrats
« C’est bien beau les leçons de droits de l’homme et les postures entre le café Flore et le Zénith », mais « ce n’est pas comme ça que je vais défendre les droits de l’homme », a lâché hier Nicolas Sarkozy, contraint au premier jour de la visite de Mouammar Kadhafi de se justifier face au flot de critiques. La France devait signer hier soir avec la Libye « une dizaine de milliards (d’euros) de contrats », portant sur une « collaboration pour une usine de dessalement de l’eau de mer avec un réacteur nucléaire », « une coopération en matière d’armement » et « différents contrats économiques », selon le président français.
Depuis quelques jours, beaucoup ont haussé le ton – du Parti socialiste à des personnalités actives au sein du gouvernement, en passant par le philosophe Bernard-Henri Lévy – pour critiquer la visite en France du dirigeant libyen, la première depuis 1973. La secrétaire d’Etat française aux droits de l’homme Rama Yade, a déclaré hier que le colonel Kadhafi devait « comprendre que notre pays n’est pas un paillasson sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s’essuyer les pieds du sang de ses forfaits. La France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort. » « La voix de la France est exprimée par le président de la République, a rétorqué le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant. Mme Yade a exprimé une sensibilité, mais pas la voix de la France. »
Mouammar Kadhafi se rendra samedi en Espagne, où il rencontrera le chef du gouvernement José Zapatero. Une visite à Rome pour s’entretenir avec Romano Prodi est également prévue.
(ndlr : il n’y passera pas 5 jours !!!!!)