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"Etats généraux de la culture", Ralite

Publie le dimanche 12 octobre 2003 par Open-Publishing

Jack Ralite, organisateur ce dimanche des Etats généraux de la culture :
« Le ministère se vide de sa substance »

Par Bruno MASI

samedi 11 octobre 2003

« Ces Etats généraux de la culture, c’est un retournement de situation :
cesser d’être des ralentisseurs et passer à l’offensive. » Jack Ralite
Etats généraux de la culture

Dimanche, de 10 heures à 19 heures ; ateliers de 10 heures à 16 heures ;
soirée publique à partir
de 16 heures. Au Zénith, Paris XIXe, entrée libre.

Jack Ralite, 75 ans, fut maire d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) pendant
dix-neuf ans. Fondateur des premiers Etats généraux de la culture en 1987,
le sénateur (PCF) et ancien ministre de la Santé dans le gouvernement Mauroy
rassemble, dimanche, artistes et comédiens pour de nouvelles rencontres.
Sociologues, chercheurs, philosophes et professionnels du spectacle
débattront de la question du travail (Théâtre international de langue
française, la Villette), d’un nouveau contrat entre les arts et la société,
et de l’exception culturelle (La Commune, Aubervilliers), ou de l’école,
l’éducation et la recherche (Cabaret sauvage, la Villette). L’occasion
également de revenir sur la crise des intermittents ou sur les effets de la
décentralisation.

Les Etats généraux de la culture ont lieu dans un contexte tendu...
Durant l’été, des centaines de personnes se sont retrouvées pour débattre de
la culture. En quelques mois, c’est devenu une question d’ordre national.
Auparavant, ces échanges ne circulaient que dans des milieux très
restreints. C’est désormais un problème public dont l’Etat ne pourra pas
ignorer l’existence.

Quel regard portez-vous sur la crise que traversent les intermittents ?
Quand Aillagon dit que l’accord du 26 juin est irréversible, il a tort.
Politiquement, c’est provocateur. Le Medef, à l’évidence, veut aller plus
loin et supprimer les annexes. Mais la mobilisation ne cesse pas. Peut-être
est-elle moins visible, tout simplement parce que les intermittents ont dû
retourner travailler pour vivre. Mais elle se structure. Le gouvernement
devra lâcher prise. Peut-être reviendra-t-il sur le texte après le 1er
janvier, quand il se rendra compte qu’il n’est pas applicable. Mais le débat
dépend de la mobilisation, notamment de la rencontre avec les partis
politiques.

C’est l’objectif final de ces rencontres ?

Le premier effet des Etats généraux est de faire parler. Il faut ensuite
qu’ils débouchent sur une grande interpellation en direction des forces
politiques qui ont laissé en friche ces questions. En 1987, les Etats
généraux et la déclaration qui en a découlé ont empêché les grandes dérives
de la « financiarisation » qui a opéré dans d’autres pays. Du moins, elle les
a ralenties. Mais comme le dit Robert Guédiguian : « J’en ai marre d’être un
ralentisseur. » Ces Etats généraux de la culture, c’est un retournement de
situation : cesser d’être des ralentisseurs et passer à l’offensive.
Aujourd’hui, le marché est la règle. L’exception culturelle est ce qui tente
de l’atténuer ou d’en modifier le cours. Nous voulons qu’elle devienne la
règle généralisée.

En 1987, quel fut le point de départ des Etats généraux ?

On voulait combattre les ségrégations révoltantes qui sclérosaient l’art et
la culture. Malgré leurs spécificités, les artistes se retrouvaient sur de
nombreux points. C’est cette même démarche qui nous anime aujourd’hui. Mais,
depuis 1987, le paysage culturel s’est considérablement transformé : qui
parlait à l’époque de friches artistiques ou de théâtre de rue ? Surtout, la
vitesse des changements s’est accrue. Ces rencontres tenteront de saisir
l’état de la culture en mouvement : l’uniformisation musicale ou littéraire,
la notion de travail, l’exception culturelle... On veut chercher les débuts
d’histoires qui s’écrivent au jour le jour, travailler sur des nouveaux
commencements.

Le ministre organise les Assises du spectacle vivant en janvier, pilotées
par Bernard Latarjet, qui a toutes les peines du monde à rassembler les
différents intervenants. Vous organisez les Etats généraux et tous les
artistes sont disposés à venir. Cette crise n’est-elle pas, finalement,
celle du ministère de la Culture ?

Les artistes et comédiens, cinéastes ou metteurs en scène seront présents.
Des chercheurs viendront débattre également. Je doute que les Assises de
Jean-Jacques Aillagon aient réellement du succès. Le ministère est
aujourd’hui fissuré. Il se vide de sa substance. Ce phénomène s’est amorcé
sous Douste-Blazy. A partir de ce moment-là, le ministère a commencé à ne
plus se respecter. Aillagon a été bien accueilli. Aujourd’hui, il n’est même
plus ménagé par le gouvernement. La question culturelle est dépolitisée.
Quand les politiques ne se sentent plus concernés par un phénomène social
aussi important, c’est que la question elle-même est malade.