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FRANCE : De moins en moins une terre d’asile

Publie le mercredi 12 juillet 2006 par Open-Publishing

De moins en moins une terre d’asile
BERNARD DELATTRE (libre belgique)

Mis en ligne le 12/07/2006
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Alors que le gouvernement s’embourbe dans le dossier des sans-papiers, un gros rapport dit ses « inquiétudes ». En cause notamment, « un mal français récurrent ».

CORRESPONDANT PERMANENT À PARIS

Dans ses termes, la politique d’asile de la France est claire. Le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy l’a encore rappelé lundi à la Conférence de Rabat : Paris rejette à la fois le « mythe dangereux » de « l’immigration zéro » et « le discours extrémiste des partisans de l’immigration sans limite ». Mais dans les faits, cette politique est parfois laborieuse.

On en a l’illustration depuis la fin de l’année scolaire, avec la gestion du dossier de la régularisation des jeunes sans-papiers scolarisés jugés intégrés au pays. Depuis dix jours, les estimations les plus fantaisistes circulent, y compris dans la bouche d’officiels, sur le nombre de clandestins concernés : 700 familles, quelques milliers, voire plusieurs dizaines de milliers ? L’administration a dû convenir qu’on n’en saurait rien avant le milieu de l’été. D’où le flottement actuel, qui place Nicolas Sarkozy au centre de toutes les critiques, que ce soit des associations, de la gauche ou de l’extrême droite.

Mardi, c’est l’association « Forum Réfugiés » qui donnait de la voix, via la publication de son rapport annuel. Ce document de près de 200 pages exhorte Paris à ne pas « laisser filer le droit d’asile ». Après avoir rassemblé une masse de données jugées « alarmantes », il déplore que « dans sa course à l’Europe de l’asile, la France semble ne plus devoir hésiter à dégrader son propre standard de l’asile, qui était jusque-là l’un des plus élevés de l’Union européenne ».

Le document dénonce notamment le fait que, dans la liste des « pays sûrs » (pays pour les ressortissants desquels l’asile n’est plus accordé) établie par Paris, figurent des Etats (Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Inde, etc.) « dont la sûreté est très relative et fort contestable ». Il épingle aussi les « pratiques divergentes » des préfectures selon les départements et se demande si ce manque d’harmonisation ne constitue pas « un mal français récurrent », qui fait « irrémédiablement partie de la culture administrative » hexagonale.

« Une doctrine minimaliste »

« Forum Réfugiés » souligne encore que les « délais extrêmement courts » d’examen des requêtes d’asile « laissent perplexe sur la qualité du traitement des dossiers ». Elle s’inquiète de la « doctrine minimaliste » en cours à Paris relative à la conception du droit d’asile. Constate que les améliorations apportées au dispositif d’hébergement n’empêchent toujours pas « bon nombre de personnes de rester sur la touche, avec la rue comme seule solution ». S’indigne « des droits sociaux toujours insuffisants » accordés aux plus faibles.

Et s’alarme des « retours forcés » : ces expulsions par vols charter notamment, qui lui semblent menées « parfois au mépris du respect des droits des personnes placées en centre de rétention et de la possibilité de voir étudier leurs demandes d’asile dans des conditions convenables ».