Accueil > Fermeture de la FNAC Bastille
Un séisme
De Bernard Delattre
On a appris la nouvelle ce matin, au saut du lit. On est tombé des nues. Et, pour tout dire, on n’en est pas encore revenu. Alors, bien sûr, dans la litanie quotidienne et déprimante des ravages de la crise économique mondiale, ce n’est qu’une anecdote. Un goutte d’eau dans un océan de malheurs sociaux. Une péripétie de plus. Une fermeture supplémentaire parmi tant d’autres. Une poignée de chômeurs certes, mais on en dénombre déjà tant et tant, et cela ne fait vraisemblablement que commencer. Une mauvaise nouvelle mais qui, assurément, sera vite chassée par d’autres mauvaises nouvelles, sans doute encore plus terribles. Il n’empêche, à la petite échelle de notre petit quartier, c’est vraiment énorme. C’est le ciel qui tombe sur la tête. C’est presque un séisme.
La FNAC Bastille ferme. D’ici à l’été, cette grande surface spécialisée dans la musique et les DVD aura définitivement baissé ses rideaux métalliques. Vu la crise mondiale en général et vu la crise frappant le secteur de la musique en particulier, le groupe de luxe PPR a décidé que cette enseigne n’était plus rentable.
Le grand magasin avait ouvert ses portes en 1990, dans les sous-sols de l’Opéra Bastille. Dix-neuf ans plus tard, ses quelque 60 salariés vont être remerciés. Ainsi le prévoit le plan social de la FNAC pour la capitale, qui entraîne la suppression de 168 postes dans les magasins parisiens de cette enseigne. « Aucune autre fermeture de magasin n’est prévue en France », a assuré hier la direction de PPR. La FNAC Bastille sera donc la seule à fermer ses portes.
La FNAC Musique, c’était vraiment une institution du quartier Bastille. Bien sûr, c’était un magasin très très grand public, et donc on y trouvait beaucoup de daubes ultra-commerciales, loin des choix plus pointus et plus intéressants des petits disquaires du quartier. Mais enfin, si qualitativement on trouvait souvent n’importe quoi dans les rayons de la FNAC Bastille, on y trouvait aussi un peu de tout. Donc, c’était finalement assez pratique et parfois même on y faisait d’agréables découvertes. Bien sûr, ce magasin très populaire était le plus souvent insupportablement bondé – jusqu’à l’horreur le samedi après-midi. Mais, certains jours à certaines plages horaires, on pouvait y déambuler encore relativement tranquillement. Bien sûr, avec la foule qu’elle draînait en permanence, la FNAC Bastille ne causait pas rarement des nuisances à ses riverains. En fin de journée le samedi, par exemple, la crasse à ses alentours était impressionnante.
Mais, malgré tout, ce commerce assurait à lui tout seul une bonne partie de l’animation du quartier. Sur la place de la Bastille, avec les foules de clients qui s’y pressaient, avec les cohortes de jeunes, de touristes et de paumés qui ont toujours squatté les marches de l’Opéra, avec le flux incessant des voitures tournant autour de la grande colonne de 1830, avec les magasins de meubles, les cinémas et les petits passages de la rue du Faubourg St-Antoine, avec les attractions foraines du bout du boulevard Richard Lenoir, avec le grand marché du jeudi et du dimanche, avec ces snacks à kebabs remplis en permanence de banlieusards, la FNAC faisait assurément partie de l’ambiance locale. Plus pour longtemps, donc. Cela va être un fameux changement pour cette partie du onzième arrondissement.
Ce matin, on pensait à tous ces employés qu’on a croisés à la FNAC Bastille pendant toutes ces années. A ces caissières, ces vigiles, ces responsables de rayons – en majorité très jeunes – à qui on a parlé. Hop : au chômage.
Du coup ce matin, cette crise économique mondiale jusqu’à présent géographiquement assez lointaine faisait violemment irruption dans le quartier. S’immiscait jusqu’aux portes de la vie quotidienne. Devenait donc extrêmement tangible, concrète. Se rapprochait, physiquement. Cela commençait à devenir un peu flippant.
Messages
1. fermeture fnac bastille, 7 mars 2009, 10:31
Après avoir sabordé le petit commerce, il nous faudrait pleurer sur la grande distribution et sa machine à laver les cerveaux et essorer les porte-monnaies.
Il est toujours navrant de voir des gens licenciés mais il faut quand même raison garder...
1. fermeture fnac bastille, 7 mars 2009, 13:27
Dans ce texte j’entends surtout des personnes défendre leur emploi dû à la crainte vérifié de ne pas en retrouver. Nous savons tous ce que le chômage amène comme galère quotidienne. On ne peut pas le reprocher aux futurs chômeurs.
Pour ces motifs il me semble nécessaire d’amener le débat sur un autre terrain que de vouloir absolument maintenir l’emploi ou de toute façon on à peine de quoi vivre et ou on participe à vendre une culture big mac etc, etc.
Si nous les chômeurs ou futurs chômeurs nous ne défendions plus l’emploi mais le droit de vivre son temps libre sans la misère, le flicage des pôles emplois, la trouille de se voir couper du jour au lendemain ses indemnités.
Revendiquons notre droit de vivre sans bosser et confortablement.
Du boulot y en a pas et c’est tant mieux. La plupart des tafs que nous occupons sont très mal rémunérés et nous maintiennent dans un état de semi esclavage vis-à-vis de la boite et du patron. Les tafs que nous occupons nous abiment le corps et la tête, nous prennent notre temps, ce temps si précieux que nous pourrions utiliser comme bon nous semble et en fonction de nos besoins, de nos désirs (se former, apprendre le mandarin, passer du temps avec sa mère-grand très malade).
Faut-il absolument réclamer de l’emploi ? De plus nous savons bien qu’une grosse partie des emplois que nous occupons sont inutiles à la collectivité (pollution des cerveaux, de la terre, fabrication d’armes, flics, vigiles, milice privé).
Ne suivons plus les syndicats qui travaillent à leur maintien dans les antichambres du pouvoir. Ne réclamons plus du taf, exigeons plutôt une liberté d’action et de pensée en brisant nos chaines.
2. Fermeture de la FNAC Bastille, 15 mars 2009, 12:14, par Jean-Luc Courtois
Merci, amis Belges pour ce très bel article à propos de la place de la Bastille...
Vous la décrivez fidèlement à ce que je "la vis" pour exercer depuis 16 ans ma profession d’infirmier à proximité.
Oui, il y règne parfois la "pagaille" latine que vous évoquez mais, audelà, elle est, à mon sens, un des lieux le plus hautement symbolique de la France, de ses paradoxes, de ses valeurs, de la colonne érigée vers "Liberté-Egalité-Fraternité" mais aussi de la culture via son Opéra...
La FNAC adjacente n’est en rien, comme la décrit un de vos lecteurs, un supermarché voué à "laver nos esprits" ou à "essorer nos porte-monnaies"...
Cela est, peut-être le cas des autres enseignes, mais pas de celle-la...
Pour qui y a évolué, comme l’auteur de cet article, on est subjugué par le puit de connaissances de ses vendeurs-conseillers qui, tous réunis, savent nous orienter dans nos choix mélomanes, aussi éclectiques soient-ils...
Ceci est la raison pour laquelle la disparition de "La FNAC Bastille" encore nommée "La FNAC Musique" endeuillerait le quartier biensûr mais aussi Paris, la France et plus loin encore comme l’atteste cette publication Belge, sans doute parceque Art et Musique n’ont pas de frontières...
Il s’agit, aussi, de la raison qui m’a incité à publier une pétition "contre la fermeture de la FNAC BASTILLE" sur le site "mesopinions.com", pétition civique et indépendante de toute orientation politique ou syndicale.
J’espère que nombreux seront ceux qui la signeront en France et ailleurs pour prouver au groupe financier dirigeant la FNAC combien nous sommes attachés à nos valeurs culturelles, celles-là même qui abolissent les clivages nationaux...
Jean-Luc Courtois
mail to : jeanluc.courtois@hotmail.fr
3. Fermeture de la FNAC Bastille, 4 avril 2009, 01:52, par fnac début de la fin ?
La grande majorité des vendeurs de FNAC sont peu sympatiques dans leurs réponses.
Leur site de vente en ligne indexe mal les livres, a peu d’évaluaation des livres, affiche la liste personnelle de livre moins bien que les livres suggérés par la fnace, ce qui montre bien ce qu’il pensent des clients !
Alors, si ils ne veulent pas tenir compte des clients qu’ils ferment je ne les pleurerai pas.
1. Fermeture de la FNAC Bastille, 4 avril 2009, 07:50, par charlelem
Ta réponse est nulle, tu reproches à des travailleurs les travers de leur direction. Et toi es tu sympatique avec "tes clients" si tu as à faire avec la clientèle, es tu sympatique avec tes collègues, travailles tu dans un secteur d’utilité public.
Tu vois bien que tes arguments peuvent se retourner contre toi.
Donc condamnes la direction de la FNAC mais pas les travailleurs de la FNAC.